Guillaume Bouzar : « La bonne trajectoire »

Ils sont tous passés par là. À l’image des vingt pilotes qui composent la grille de Formule 1, la plus précoce des antichambres du sport automobile en a révélé plus d’un. Le karting fait partie intégrante du parcours de formation des apprentis champions, et nombre d’entre eux ont été biberonnés aux tours chronométrés. De l’inspiration à l’aspiration, tour de chauffe avec un jeune pilote en mission quand il enfile sa combinaison.  

Coup de foudre à Lommange

La révélation a lieu à une vingtaine de kilomètres de la frontière luxembourgeoise, sur un circuit où le jeune pilote effectue ses premiers tours de roue. « J’ai commencé le kart sur une toute petite piste en forme de Y. Avant cela, j’avais essayé le football, mais je n’ai pas spécialement accroché. » C’est une fois les crampons raccrochés que Guillaume Bouzar va adhérer à l’asphalte. Un peu par hasard. « Mon père m’a amené un jour faire du karting de location. Puis j’ai commencé à m’entraîner, à m’améliorer, et petit à petit, j’ai pris part à des courses. » 

« On n’a pas d’histoire dans le karting ou dans le sport automobile », complète Cédric Bouzar, son père, qui accompagne le jeune pilote sur ses premières compétitions. 

2016, l’année où tout commence

L’année aussi de la première licence. Guillaume n’a pas encore sept ans. « Il a commencé avec une licence française, le Luxembourg n’acceptait pas les pilotes de karting avant neuf ans. C’était la réglementation. » 

Guillaume fait ses gammes et use ses gommes dans la région Grand Est, et débute lors de petites courses régionales. Et comme il s’en sort plutôt bien, il participe très vite à la Coupe de France à Laval, où il impressionne par ses temps. Mais au moment de commencer la course, il se casse la cheville. Une équipe l’approche : « Il a du potentiel, si vous voulez, vous pouvez faire la saison avec nous’’ et vu que je ne suis pas très doué en mécanique, j’ai dit oui », se souvient son père. 

Un titre et cap sur l’Italie

L’apprentissage se poursuit dans la catégorie mini. 2018 marque un tournant et c’est l’année du premier titre pour le jeune talent. Sacré champion d’Île-de-France, il est récompensé d’une troisième place lors de la Coupe de France. L’occasion rêvée pour embrayer et aller se mesurer à des adversaires de l’autre côté des Alpes. « On a découvert un peu par hasard les compétitions en Italie en 2019, où sont organisées des courses avec une centaine de pilotes à chaque départ. L’environnement est super intéressant, on s’est dit qu’il fallait essayer, et le niveau est beaucoup plus élevé. » Dans un premier temps, il rejoint un team indépendant, au volant d’un kart floqué d’un célèbre patronyme, le RS Ralf Schumacher. Des compétitions où il n’est pas rare de croiser quelques visages connus ayant gardé un attachement particulier à la discipline, comme Alonso, Norris ou Kubica, tous trois ayant lancé leur marque de kart. 

Après quelques résultats prometteurs en WSK Super Master Series et en Euro Series, Guillaume découvre la catégorie OK-Junior en cours d’année et se rend à ses premiers Championnats du monde à Portimão, pour observer et se juger. Il s’agit d’une étape majeure quand on passe du mini à la catégorie supérieure. Cela représente aussi une occasion de prendre de l’épaisseur en se mesurant aux meilleurs. 

L’année 2021 du jeune prodige va cependant être tronquée en raison d’une double fracture du bras qui le freine pour quelques mois. Une pause de courte durée cependant, car le pilote peut s’entraîner sur un simulateur à la maison et rester concentré sur son pilotage. « Je me familiarise avec les voitures, avec certains systèmes d’aileron, de moteur, de carburateur, la pression des pneus et des stratégies en course. Je dispose d’un volant avec des retours de force, des pédales avec pression. Le jeu m’aide aussi à mieux appréhender l’accélération. »

Ne pas court-circuiter la scolarité

Comme tout jeune sportif accompli, Guillaume arrive à concilier ses activités en piste sans laisser sa scolarité prendre l’échappatoire. Un équilibre à trouver, comme l’explique Cédric Bouzar : « Il faut chercher un compromis entre l’école et le karting. Aujourd’hui, on arrive à ce qu’il récupère les cours qu’il a manqués et il a un professeur qui assure du soutien à côté. Il faut aussi savoir si on veut totalement basculer. Il y a des enfants complètement déscolarisés quand ils font ça à plein temps. De notre côté, on a décidé de voir comment ça se passe d’ici les Juniors. Si les résultats montrent qu’il a le talent, on avisera. Pour l’instant, on essaie de trouver l’équilibre entre les deux. » 

Un compromis avec lequel le jeune pilote semble parfaitement aligné : « L’année dernière, quand je revenais du karting, je travaillais beaucoup le lundi, pendant les pauses de midi. Quand tout le monde jouait dehors, je recopiais mon cours et je rattrapais, petit à petit. Pour l’instant je suis toujours dans la moyenne. » 

Départ lancé réussi avec Koski

Le feu vert est donné en février pour la nouvelle saison au sein de Koski Motorsport, une jeune structure privée finlandaise évoluant régulièrement aux avant-postes sur la scène internationale en FIA Karting. Guillaume a déjà pu reprendre la température le 13 mars à Napoli, en Italie pour les WSK Super Master Series. 

Il sera engagé cette année pour un programme d’une douzaine de courses, alternant les Champions of the Future, le FIA European Championship et les Championnats du monde en point d’orgue. 

La discipline se professionnalise. « Il a un mécanicien dédié, quelqu’un qui s’occupe des datas pour analyser les tours, un team manager. En termes de ressources, c’est très complet. » 

L’avenir pourrait s’écrire au volant d’une monoplace. À condition de réussir quelques étapes. « Après la catégorie OK-Junior, il y a la OK. Et la Formule 4 commence à partir de l’âge de quinze ou seize ans. Les deux prochaines années seront déterminantes. » Un rêve qui peut devenir réalité, à l’image de quelques pilotes révélés au volant d’un karting et partis rejoindre les filières de jeunes pilotes ambitieuses comme Red Bull ou McLaren. 

Il reste encore du chemin avant peut-être un jour de le voir briller en Formule 1. « Je ne sais pas où le karting le mènera, mais c’est certainement une bonne école. »  

Vu des stands avec Jan Koski, responsable de l’équipe Koski Motorsport : « Je travaille avec Guillaume depuis peu de temps. Nous avons réalisé quelques journées d’essais et une course, et je peux dire qu’il m’a déjà convaincu par son talent. Il est très rapide en piste et bon pour s’adapter aux nouvelles pièces sur son kart. Il est aussi très intelligent pour comprendre comment extraire le maximum de son pilotage et comment régler son kart. » 

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