À l’occasion de la journée mondiale du sport féminin (mercredi 24 janvier) s’est déroulée hier soir une soirée ciné-débat autour du football féminin à la Kulturfabrik d’Esch. Au programme, la projection du film Um Ball de Tessy Troes suivie d’une table ronde instructive. Moien-Mental y était.
Souligné par de magnifiques images, d’un travail de plus de 150 interviews et d’archives dénichées par Tessy Troes, le propos du documentaire Um Ball s’inspire du constat amer d’ancienne joueuse de la réalisatrice et journaliste : le football, c’était pour les garçons. Une barrière infranchissable jusqu’en 1970, et la fondation du FC Atert Bissen qui remporta les deux premiers championnats (1973 et 1974) avant la période hégémonique du Progrès Niederkorn.
Pourtant, les obstacles vont s’enchaîner, bien aidés par le manque de soutien, d’investissement voire d’enthousiasme de la fédération de football jusqu’à la disparition de la division féminine ou encore l’équipe dames de Luxembourg en 1987 interdite de concourir sous la bannière de la FLF! Loin de sombrer dans le piège mélo ou le pamphlet à charge, le reportage créé dans le cadre de Esch 2022 nous plonge pendant plus d’une heure dans le passé, avec ses dérives sexistes ; mais aussi dans un présent optimiste où des stars ont émergé, Amy Thompson et Laura Miller en tête, tout en s’expatriant pour réussir, où la sélection nationale joue au Stade du Luxembourg, même s’il sonne creux faute de campagne de communication plus que d’engouement pour les Roud Léiwinnen.
La Ville d’Esch-sur-Alzette organisait après la projection une table ronde animée par Joëlle Letsch (dont vous retrouverez l’interview exclusive dans le prochain numéro de Mental! en kiosques la semaine prochaine) : l’occasion de confronter le point de vue de la réalisatrice avec les avis de la jeune joueuse du Fola Belma Sabotic, de son président Josy Dilk, et de Carol Bragança-Kayser, membre du comité de la Jeunesse Esch.
Si le diagnostic est unanime (le sport n’a pas de genre, mais les préjugés y ont toujours existé), l’analyse des causes et les projections dans le futur peuvent diverger.
D’après Belma Sabotic, milieu de terrain en Ligue 2 Dames, le manque de reconnaissance de la FLF est crucial, qu’il s’agisse de couverture médiatique avec la promotion en amont des matchs, des retransmissions de rencontres ou des avantages financiers loin de satisfaire à l’égalité femmes-hommes.
Pour le président du Fola, la responsabilité incombe aussi aux clubs qui doivent fournir les infrastructures nécessaire à la croissance du football féminin qui soit à la hauteur de ses ambitions. Pour son équipe féminine senior, il fait le voeu qu’elles puissent profiter des mêmes installations que les hommes.
Chez sa rivale de la Jeunesse, l’humeur est davantage à se féliciter des progrès accomplis depuis une dizaine d’années. Carol Bragança-Kayser sait ce qu’être une femme de responsabilité dans un monde d’hommes demande comme force de caractère, mais elle n’oublie pas les avancées spectaculaires dans les mentalités et encourage les lycées à faire la promotion du sport chez les jeunes filles, pour ne plus jamais connaître les situations de décrochages massifs ou d’exode à l’étranger qui ont contribué à mettre un terme au championnat.
Tessy Troes, moins optimiste, sait à quel point les femmes, particulièrement au Luxembourg, partent de loin. Et n’hésite pas à pointer du doigt la FLF autant que la presse, qui réduit selon elle la portion attribuée au sport féminin dans les médias à une minorité à peine visible. Notre Dribble d’or décerné à la meilleure joueuse de Ligue 1 Dames est l’arbre qui cache une forêt bien désertique. Afin d’achever la soirée sur une note positive, la réalisatrice nous enjoint toutes et tous à venir supporter les équipes de football féminin les weekends et d’investir en nombre les stades où brillent les Roud Léiwinnen, pour que le déséquilibre avec le foot masculin s’estompe.
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