La tenniswoman luxembourgeoise, tout juste retraitée, est revenue sur sa longue carrière sur le circuit du WTA, son avenir dans le monde du sport, et la période qu’elle a vécue en parallèle du tennis lors de ses grossesses.
Comment se passe la vie d’une néoretraitée du tennis ?
Bizarrement, j’ai continué à faire plein de choses dans le tennis ! Je m’entraîne et je joue encore un peu. Il n’y a plus de déplacements ni de tournois professionnels, mais le tennis est toujours mon travail jusqu’à la fin de l’année, je continue de gagner de l’argent grâce à cela. Avec deux enfants, j’ai un planning de ministre ! (Rires) C’est un peu difficile d’arrêter du jour au lendemain, mais le temps que je me réoriente, j’ai un peu plus de temps pour mes enfants.
Vous dites que c’est dur de dire stop ?
Oui, c’est très dur ! Mais il fallait trouver le bon moment, car j’avais encore un bon niveau. J’ai bien gagné ma vie avec le tennis. Si j’avais été blessée ou si j’avais échoué, j’aurais dû me réorienter vers autre chose plus tôt, mais ça a finalement été une grande partie de ma vie, donc c’était difficile. Cependant, je pense avoir trouvé le bon moment pour dire stop. Tout était planifié pour arrêter.
Que retenez-vous le plus de vos vingt-deux ans de carrière dans le circuit professionnel ?
Je retiens surtout tout ce que le circuit m’a appris, les valeurs que j’ai acquises. Finalement, ce ne sont pas un ranking ou des résultats dont je vais principalement me souvenir, mais plutôt tout ce que cela m’a apporté, la mentalité, tout ce qu’il y a à côté. Cela m’a formée pour la vie et j’en suis très reconnaissante.
Quelle est la plus grande fierté de votre carrière ?
Ce sont mes enfants plus que le tennis ! Mais c’est une question que je me suis posée ces derniers jours. Finalement, les gens voient des victoires, mais la chose dont un sportif est parfois le plus fier, c’est de rebondir à chaque fois qu’il est au plus bas. Cela m’est arrivé deux ou trois fois et je ne pensais pas m’en sortir, mais j’ai finalement trouvé la force de persévérer et de me relever, et ma plus grande fierté est d’être restée aussi longtemps sur le circuit. Les résultats sont la récompense de tous ces efforts.
Et votre plus grande déception ?
Il y a eu des matchs qui me restent encore en travers de la gorge, dont deux face à la même adversaire, l’Américaine Sloane Stephens. À Wimbledon, où j’ai mené avant de perdre 8-6 au troisième set, puis à New York, sur Armstrong et devant dix mille personnes, où j’ai là aussi perdu au troisième set. Donc il y a des matchs qui me sont restés en travers, mais de grosses déceptions, je ne crois pas réellement en avoir eu. Avec le temps, on apprend à accepter tout ça.
Y a-t-il quelque chose que vous avez regretté ?
Non, si ce n’est peut-être les Jeux olympiques que j’ai loupés de justesse. Il me manquait deux ou trois places pour en faire partie, mais il y avait un trou dans le système, car ce n’est pas la WTA qui gérait cela, donc j’aurais pu être acceptée. C’est dommage, mais c’est comme ça.
On parle peu souvent des sportives professionnelles qui attendent un enfant et qui continuent parfois à exercer leur sport pendant plusieurs mois. Comment avez-vous vécu cela de votre côté ?
Quand je suis tombée enceinte de ma première fille, en 2016, j’étais à la 69e ou 70e place au classement WTA, soit l’un des meilleurs rankings de ma carrière. On était hyper contents, mais ça a été un petit choc, car c’est arrivé à un moment où j’aurais pu aller encore plus haut. Cependant, j’étais certaine de pouvoir jouer deux Grand Chelem en tableau final à mon retour, donc je me suis d’abord dit que j’allais retenter une année après la naissance de ma fille pour voir si tout allait bien et si je pouvais rejouer. J’étais un peu dans l’inconnu, je me suis dit : « Si ça ne marche pas, j’arrête. » Finalement, ma motivation est revenue à son maximum et huit mois après mon retour, j’étais dans le top 100.
Mentalement, c’est peut-être aussi le fait de ne plus avoir seulement le tennis dans la vie qui m’a donné une autre force. Malgré les nuits horribles et tout ce qui n’est pas en accord avec la vie d’une sportive de haut niveau, j’ai réussi à revenir, et il y a plein de sportives qui prouvent que même en ayant un enfant, c’est possible.
Vous aviez vous-même décidé d’arrêter à un certain moment ?
Les médecins m’avaient dit qu’il n’y avait aucun problème pour continuer tant que ça allait. Mon corps a l’habitude, et je n’ai pas eu de problèmes durant ma grossesse, donc j’ai continué jusqu’au huitième mois. Ça m’a maintenue en forme.
Avec un métier qui met le corps à rude épreuve, cela n’a pas été difficile de reprendre ?
Physiquement si, ça a été dur. J’ai repris après trois mois et demi et au début, j’ai bien souffert. Le corps a besoin de temps, et j’ai commencé à être vraiment en forme au bout de six ou sept mois. Mais après mon deuxième enfant, tout a été encore plus difficile. Deux enfants, c’est énormément de travail, donc plus de fatigue. Ça a été plus dur de rester en forme pendant la grossesse, j’ai eu des soucis de santé qui n’ont pas aidé, et puis j’avais quelques années en plus !
Quels sont vos projets pour le futur de votre carrière professionnelle ?
Pour l’instant, j’ai beaucoup de rendez-vous pour m’orienter vers quelque chose d’autre. J’aimerais avoir encore un rôle dans le sport au Luxembourg, mais je ne peux pas en dire plus parce que je ne sais pas encore exactement comment cela se traduira. Cependant, j’aimerais voir plus loin que l’horizon du tennis.
Comment voyez-vous le futur du tennis luxembourgeois ?
Pour l’instant, il n’y a pas énormément de jeunes qui se lancent. Chez les féminines, il y a Marie Weckerle, qui a envie de tenter l’aventure et met tout en œuvre pour monter au classement, ou Laura Palumbo, qui a du potentiel. Chez les hommes, il y a un peu plus de monde. Certains partent aux États-Unis, ce que je trouve très bien. Il faut leur donner une chance de se développer. Pour l’instant, les résultats ne sont pas forcément énormes, mais je suis sûre que cela viendra dans le futur.
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