Au début du mois de novembre 1972, le club de handball israélien de l’Hapoël Ramat Gan est en déplacement au Luxembourg pour y affronter le HB Dudelange. Quelques semaines seulement après la prise d’otages des J.O. de Munich, cette rencontre va se dérouler dans un contexte totalement inédit.
972 résonne encore cinquante ans après comme une date traumatisante pour le monde sportif. Nous sommes à la fin du mois de septembre, et l’ombre de la prise d’otages sanglante des Jeux olympiques plane encore sur l’Europe et le Proche-Orient. Le 9 septembre, Israël entame des représailles après la mort de ses athlètes, en bombardant des bases de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) en Syrie et au Liban, et fait 200 morts.
Tsahal déclenche ensuite sa plus grande opération militaire terrestre depuis la guerre des Six Jours. Les troupes israéliennes occupent dès lors une grande partie du Sud-Liban. Pour venger l’État hébreu des événements tragiques de Munich, le Mossad met ensuite sur pied l’opération « Colère de Dieu », visant à éliminer des commanditaires présumés de la prise d’otages meurtrière. Des événements relatés dans le film Munich par Steven Spielberg.
Des conséquences sportives au Luxembourg
Les conséquences sportives pour les athlètes israéliens voyageant à travers le monde vont être nombreuses. Certains faisant même appel, dès lors, à des gardes du corps personnels lors de leurs déplacements. La hantise d’un nouvel attentat obsède le gouvernement israélien, qui va alors prendre des mesures drastiques. Et un club de handball en déplacement au Grand-Duché de Luxembourg va en faire l’expérience…
Champion d’Israël de handball, l’Hapoël Ramat Gan doit affronter son homologue luxembourgeois du HB Dudelange à l’occasion du premier tour de la Coupe des clubs champions européens de handball 1972/73, devenue de nos jours la Ligue des champions de l’EHF. Une double confrontation qui aura lieu au Luxembourg, mais dans des conditions très particulières.
L’INS à huis clos
Le match aller est programmé le 4 novembre 1972, et personne n’a le droit de révéler – pas même les journalistes – où se déroulera la rencontre. C’est au dernier moment qu’ils apprennent que c’est à l’INS, à huis clos et sous bonne garde, que se joueront les deux manches. Entre les deux, les joueurs israéliens seront hébergés dans un lieu placé sous haute surveillance : la caserne militaire de Diekirch.
Le match aller tourne à l’avantage des Israéliens 18-16, mais selon la presse de l’époque, tout reste possible pour les Dudelangeois. D’autant plus que le club se montre ambitieux sur une scène européenne où ils se retrouvent fréquemment depuis plusieurs saisons. À cette époque, c’est Marcel Kreuter qui tient les rênes de l’équipe. Figure du handball luxembourgeois dans les années 60 et 70, il joua 69 fois sous le maillot luxembourgeois (92 buts inscrits), et en plus du HBD, il entraînait dans le même temps la sélection (de 1970 à 1974).
Et finalement l’élimination…
Mais le match retour, lui aussi disputé à l’INS, ne tournera pas non plus en faveur des Luxembourgeois. Il est écrit dans Le Républicain Lorrain du 6 novembre 1971 : « Le champion grand-ducal, victime de deux passages à vide, et aussi de la très modeste performance de ses gardiens, a pourtant espéré jusqu’à la 45e minute (10-10). » Et pourtant, le HB Dudelange n’arrivera plus à inscrire un seul point et s’inclinera finalement 15-10. Le journal conclut son article par ces mots forts : « Mais de cette double confrontation, c’est le sport qui apparaît comme grand perdant, car un match de Coupe d’Europe disputé sous la protection de gens armés est un spectacle déprimant. »
Les Israéliens de l’Hapoël Ramat Gan n’iront ensuite pas plus loin que les huitièmes de finale de la compétition européenne, éliminés par le champion suédois du IK Hellas Stockholm (19-36 sur l’ensemble des deux matchs). Quant au HB Dudelange, il sera de nouveau sacré champion du Luxembourg lors de la saison 72/73.
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