Le Luxembourg affronte l’Islande dans le cadre des éliminatoires pour l’Euro 2024. C’est bien le ballon rond qui a permis de montrer une autre facette que les paysages de carte postale de cette île de 370 000 habitants.
L’Islande est désormais un territoire bien connu des amateurs de football. Pourtant cela n’a pas été toujours le cas. Bien que le ballon rond ait une histoire ancienne sur cette terre volcanique (le tout premier championnat a été créé en 1912), le football aura eu bien des difficultés à se pratiquer tout au long de l’année dans ce pays aux conditions climatiques extrêmes. Il n’en reste pas moins un sport populaire avec la création de sa sélection nationale, Strákarnir okkar (« Nos gars »), dès 1946. De quoi affirmer un peu plus la pleine autonomie de l’Islande, deux ans après avoir rompu tout lien avec le Danemark pour devenir une république indépendante.
C’est bien plus tard, à partir des années 1990, que l’Islande commence à avoir une véritable réflexion sur comment faire émerger une équipe nationale compétitive et ainsi se faire connaître sur la scène internationale grâce au sport. À l’image de du handball, où l’Islande est parvenue à terminer à une étonnante 4e place aux Jeux olympiques 1992 de Barcelone. Les éliminatoires de l’Euro 2000 sont à ce titre une première étape dans ce chantier, puisque l’équipe islandaise parvient à faire douter des sélections comme celles de la France et de la Russie.
Terrains synthétiques et formation : les clés de la réussite islandaise
C’est d’ailleurs à partir de ces années-là que la fédération islandaise de football et les pouvoirs publics mettent en place des investissements importants dans les infrastructures : construction de terrains couverts et chauffés, pelouses synthétiques, subventions importantes sur la formation avec un réseau d’éducateurs dans tout le pays… Gunnar Birgisson, l’un des entraîneurs de Breidablik – l’un des principaux clubs du pays – dira d’ailleurs à l’occasion d’un reportage de France Inter que « ces installations nous ont beaucoup aidé, car chez nous l’été ne dure que deux ou trois mois. Maintenant, nous pouvons jouer au foot durant tout l’hiver. Aujourd’hui, nous avons aussi plus d’entraîneurs professionnels à plein temps. »
Ces investissements portent leurs fruits bien des années plus tard, avec la signature de plusieurs joueurs islandais hors de leurs frontières et, pour certains, dans des clubs de renom. À l’image de Gylfi Sigurdsson à Tottenham, Kolbeinn Sigthórsson à l’Ajax Amsterdam ou encore Birkir Bjarnason au FC Bâle. La star Eidur Gudjohnsen, passé par Chelsea et le FC Barcelone, n’est ainsi plus le seul footballeur connu de cette terre de glace et de feu.
L’apothéose intervient en 2016, quand l’Islande se qualifie pour la première fois de son histoire à un Euro de football. Le tout grâce à un onze expérimenté et rugueux, coaché par Lars Lagerbäck, qui est enfin capable de rivaliser avec l’Europe du ballon rond face à des nations européennes avec un vivier de joueurs pourtant bien plus important.
L’un des petits poucets de cette compétition va même faire plus fort qu’une simple participation anecdotique. Les Vikings vont surprendre leur monde avec une spectaculaire victoire contre l’Angleterre en 1/8e de finale. Surtout, on retiendra de cette compétition le lien fort qui unit l’équipe nationale et son public, à travers notamment un clapping qui restera dans les mémoires. Près de 30 000 supporters avaient alors fait le déplacement en France pour ce Championnat d’Europe des Nations. Soit… 10% de la population.
Une sélection islandaise en pleine reconstruction
L’Islande a ensuite surfé sur cette réussite sportive, avec une première qualification en Coupe du monde en 2018. Hélas, les résultats sont un peu plus en berne depuis. La sélection islandaise n’est pas parvenue à se qualifier pour l’Euro 2020. Même chose pour la Coupe du monde 2022, où elle n’a terminé qu’à la cinquième place de son groupe de qualification, entre l’Arménie et le Liechtenstein.
Il est en effet plus complexe pour ce petit pays de 370 000 habitants de renouveler une équipe nationale compétitive. D’autant plus que les héros des années 2010 arrivent en fin de carrière et qu’un certain creux générationnel se fait sentir. Le football reste toutefois un sport populaire avec une importante vitalité. La Fédération islandaise compte aujourd’hui près de 20 000 licenciés, ce qui représente plus de 6% de la population, et dispose, en moyenne, d’un entraîneur diplômé de l’UEFA pour 500 habitants.
Le football islandais n’a donc plus une sélection nationale aussi dangereuse que par le passé. Les éliminatoires de l’Euro 2024 ont d’ailleurs plutôt mal démarré pour les Islandais avec trois défaites contre des concurrents directs pour une éventuelle qualification (Bosnie-Herzégovine, Portugal, Slovaquie) bien qu’ils aient réussi à se défaire largement du piège du Liechtensteinois (7-0). La sélection du Luxembourg affrontera donc une sélection en pleine reconstruction et pourrait, avec une victoire, se rapprocher elle aussi d’une qualification. Et pourquoi pas d’une fantastique épopée lors d’un Euro, comme l’Islande huit ans plus tôt.
Kevin Veyssière
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