Huit jours après le triste épisode vécu à Tbilissi par nos Lions Rouges, la VAR est toujours au coeur des débats. Cet outil censé régler les injustices ne semble pas avoir réussi sa mission de trancher toutes les situations complexes du jeu. Pire, les rangs de ses détracteurs grossissent à vue d’oeil. Alors, la VAR : stop ou encore ?
Personne n’a pu passer à côté. Dans l’un des matchs les plus importants de l’histoire de la nation, un acteur bien connu des fans de football a fait basculer la rencontre côté géorgien. Et cet acteur ne se situait pas sur la pelouse, puisqu’il s’agit de la VAR, qui a dans un premier temps oublié de signaler une situation litigieuse en première période, avec une grosse semelle de Kakabadze sur Micah Pinto qui aurait probablement mérité un carton rouge après visionnage des images, puis dans un second temps annulé le but de l’égalisation de Gerson Rodrigues pour revenir à une située antérieure et donner un carton rouge à Maxime Chanot, et ainsi enterrer les espoirs de qualification des joueurs de Luc Holtz.
Un scénario très dur pour nos Roud Léiwen, et un sentiment d’injustice qui reste, puisque les situations évoquées précédemment semblent avoir été mal jugées par l’arbitre central, ce qui peut évidemment arriver, mais également par la VAR, ce qui est plus problématique et pose une vraie question : la VAR est-elle si utile que ça ?
La VAR réduit les injustices
Si l’on se penche un peu sur les statistiques mises à dispositions, qui ne sont pas légion, la VAR aurait corrigé par exemple 83% des erreurs effectuées par les arbitres centraux sur la saison 2022-2023 chez nos voisins français en Ligue 1.
Des statistiques plus que raisonnables, et d’ailleurs en nette progression si l’on prend en considération que ce chiffre s’élevait à 68% pour la saison 2018-2019, et 75% pour la saison 2021-2022. Une amélioration d’année en année donc, mais certaines situations qui passent toujours entre les mailles du filet, et surtout certains effets pervers qui semblent apparaitre et qui posent question.
Des arbitres déresponsabilisés
Car si la VAR à un ratio de correction des erreurs qui semble s’améliorer, le recours à l’outil est lui aussi en augmentation, passant par exemple de 2,6 interventions par journée de championnat en 2021-2022, à 3,3 la saison suivante, toujours chez nos voisins français.
Des chiffres qui semblent permettre de dégager une tendance au niveau de l’arbitrage : ces derniers semblent de plus en plus amenés, consciemment ou inconsciemment, à ne pas décider dans l’immédiat, puisque la VAR leur permet en cas d’erreur manifeste de revenir sur la situation plus tard s’ils sont appelés par les arbitres visionnant les ralentis.
L’outil qui semblait donc au départ destiner à devoir aider les hommes au sifflet à corriger certaines erreurs de jugements, donne désormais l’impression de décider à la place de l’arbitre central sur certaines situations litigieuses et parfois difficiles à juger en temps réel.
Cela pose problème, car la VAR ne peut appeler les arbitres centraux qu’en cas d’erreur manifeste de ces derniers, ce qui peut donc mener à certaines situations qui vont être jugées « par défaut » par l’arbitre central, et qui ne seront pas forcément corrigées par la VAR, car délicates à juger. L’arbitre, de ce fait, se déresponsabilise et va parfois prendre des décisions différentes de celles qu’il aurait pu prendre il y a quelques années, à l’époque où la VAR n’existait pas encore.
Des acteurs encore plus frustrés
L’un des autres effets pervers de la VAR réside dans le fait que, bien qu’elle semble corriger bon nombre d’erreurs, elle ne parvient pas à corriger TOUTES les erreurs, des humains étant derrière un écran pour revisionner les images au ralenti.
L’erreur humaine reste donc évidemment possible, car malgré les ralentis, certains faits de jeu échappent à la VAR.
Cela augmente donc la frustration des acteurs qui subissent des injustices malgré la présence de cette technologie, puisque cette dernière est censée pouvoir corriger les erreurs d’appréciation de l’arbitre central.
À l’image du sélectionneur national Luc Holtz, qui n’a pas mâché ses mots pour dire ce qu’il pensait de la Video Assistant Referee, en expliquant que c’était « de la merde ».
Frustrant donc, d’avoir le sentiment de subir une injustice, alors que l’outil à même de réparer cette injustice existe, mais n’a pas fait ce pour quoi il a été mis en place.
La VAR accentue certains contacts
Autre point fréquemment évoqué, la VAR est accusée de dénaturer le football, car les ralentis accentuent parfois le ressenti que les arbitres peuvent avoir de certains contacts.
Certains pénaltys notamment vont être sifflés sur des contacts somme toute minimes, et là aussi frustrer les acteurs, qui avaient pour habitude que ces situations ne soient pas sifflées par le passé.
La technologie mène donc à une certaine adaptation contrainte qui pose problème à certains suiveurs du sport roi.
Un mésusage de l’outil ?
Cependant, la VAR reste un outil qui permet de corriger la plupart des erreurs, ce qui en fait forcément un atout de poids au moment de peser le pour et le contre. D’aucuns pensent que cela suffit amplement à justifier son utilisation afin de limiter de plus en plus les injustices.
L’instauration de la VAR semble partir d’un bon sentiment, car qui ne voudrait pas voir moins d’injustices dans le sport qu’il adore regarder ?
Cependant, le débat devrait peut-être se focaliser un peu plus sur la manière de l’utiliser, en instaurant un cadre mieux défini.
Le fait de pouvoir revenir à une action ayant eu lieu 2 minutes avant sous prétexte que le ballon n’est pas sorti de l’air du jeu durant ces deux minutes semble par exemple être un point à améliorer.
Surtout, il parait nécessaire d’aider les arbitres avec cette technologie, la majeure partie d’entre eux ayant démarré l’arbitrage à une époque où l’outil n’existait pas.
Évidemment, des formations sont mises en place, mais bon nombres d’arbitres ont déjà évoqué la sensation d’être abandonné sur le sujet.
La VAR étant un véritable bouleversement dans le monde du football, les adaptations semblent donc destinées à prendre du temps. Apprendre de ses erreurs semble être l’expression d’usage sur le sujet, mais pendant que les instances continuent à chercher la meilleure formule à mettre en place, des injustices et des sentiments d’incompréhension continuent à sévir semaine après semaine, avec cette rencontre Géorgie-Luxembourg qui en est, malheureusement, l’une des dernières illustrations en date.
Boris Saint-Jalmes
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