Ivan Caçao Coelho, Responsable Jeunes au F91, nous a ouvert les portes du Centre «Gigi l’Amoroso». Auréolé des succès de l’équipe U19 ces deux dernières années et de l’envol de ses poulains, il nous raconte l’histoire, les principes, les pépites et les projets de la formation made in Dudelange.
Quand on pénètre les infrastructures du Stade Aloyse Meyer, difficile de ne pas comprendre pourquoi le Centre de Formation « Gigi l’Amoroso » est l’une des deux académies du foot les plus prolifiques du Grand-Duché. 4 terrains sans compter le Barozzi à quelques minutes à peine, tous aux normes en matière de dimensions, dont un synthétique remis à neuf cet été et le terrain herbe historique du Stade Dudelange. Un énorme complexe hybride et de qualité, puisqu’il s’agit du centre d’entraînement de l’équipe première du F91. Et c’est là tout le génie de Guy Hellers qui a posé les bases de la formation à partir du centre créé en 2009-2010, et après lui Alvaro Da Cruz et Ronny Bonvini : permettre aux plus jeunes de bénéficier des équipements des cadres A. Salle de fitness pour le renforcement musculaire, le gainage ou la récupération, sauna, bains froids : autant d’installations qui bénéficient à la fois à Hadji et consorts qu’aux U19.
Ivan Coelho, 26 ans au club, dont 12 comme joueur des poussins à l’équipe A et 7 comme formateur, est Responsable Jeunes au centre de formation depuis 2019. Il fait le lien entre le Directeur sportif Manou Georgen et les pas moins de 27 coachs employés par le club. Aux côtés de son complice le coordinateur sportif Alvaro Da Cruz, il gère les 521 licenciés actifs répartis dans 24 équipes de jeunes, dont 3 nouveaux groupes : deux Jeunes filles et une équipe Cadettes. Car le foot féminin était le parent pauvre du F91, privé d’équipe Dames depuis 2010. Et désormais dans les plans dès la saison prochaine, avec pour objectif de lutter parmi Ell, Wormeldange, le Swift et Racing en 2028-2029. Le tout grâce à une équipe nourrie par le centre de formation et la cinquantaine de filles intégrée au programme cette année grâce à une détection qui a remporté un succès dépassant toutes les espérances. Un projet certes ambitieux ; mais à gravir les marches menant au premier étage du bâtiment et traverser le Hall of Fame, quoi de plus logique ?
Tout est fait pour que les jeunes soient imprégnés du patrimoine du F91. Dès le bureau d’accueil des familles, avec les trophées des équipes jeunes. Puis dans les escaliers où l’on est entouré d’affiches des plus grands exploits du club. À l’étage où l’on côtoie dans la salle d’analyse vidéo et de réunion tous les maillots de l’histoire du club depuis 1991 et la fusion des trois équipes de la ville, jusqu’au mur des trophées où figurent parmi les trophées de champions les derniers coupes remportées par les juniors : Coupe du Prince et Coupe des Cadets 2024. Des lieux empreints des victoires et légendes, avec fanions des plus grands d’Europe et des espaces de team buildings qui confèrent dès les U15 une véritable identité à chaque joueur qui porte les couleurs de la Forge du Sud. Au dernier étage, une salle de détente avec billard, tennis de table, fléchettes, télévision et kitchenette pour se retrouver en dehors de l’aspect sportif.
Voilà par où sont passés les Gil Neves, Ruben Carvalho ou autre Sofiane Ikene. Et surtout les jeunes actuellement au club dont se montre le plus fier celui qui les a connus dès la catégorie Scolaires : «Il faut se rappeler d’où l’on vient, nous confie Ivan Coelho. On leur donne des ailes ici pour qu’ils s’envolent à l’étranger ; s’ils réussissent, on est heureux, sinon, on les accueille à bras ouverts quand ils reviennent.» C’est exactement ce qui s’est passé pour Migui Gonçalves ou Diogo Monteiro, que le F91 est allé chercher pour les former puis les laisser partir. « Migui est l’un des premiers joueurs venus de l’extérieur, de l’US Esch. Après l’opportunité à Gil Vicente au Portugal, il est revenu et se montre de plus en plus intéressant en BGL Ligue. Il est plus intelligent sur le terrain que la plupart des jeunes de son âge. Diogo était à Ehlerange. J’étais formateur U15 à l’époque, et quand je l’ai vu, j’ai immédiatement insisté qu’il nous rejoigne : je voulais lui permettre de se confronter à une véritable concurrence pour progresser. Il a ensuite rejoint le centre de formation de Kaiserslautern puis en Italie. Ça ne s’est pas passé comme il le voulait à Monza, il ne s’est pas intégré ou on ne l’a pas bien intégré, car ce n’est pas toujours la faute du joueur quand ça ne matche pas. Comme ses parents nous font confiance, au club et à ses responsables, il est revenu pour notre plus grand plaisir. »
En effet, après un an à prendre en main les aspect extra-sportifs, Ivan Coelho a posé sur la table au comité un plan quadriennal : en faire un centre de formation compétitif pour que le F91 devienne le meilleur club formateur, non seulement comme tremplin vers le monde pro, mais aussi pour le club. L’objectif ? Faire en sorte que « d’ici deux ou trois saisons, on ait 5 à 6 joueurs de l’équipe première issus du centre de formation. » Et un budget conséquent pour y parvenir : environ 15% du total des finances du club sont injectés dans le centre qui porte le nom de son sponsor principal. Et une gestion raisonnée qui a permis de ne pas subir les difficultés économiques du F91 : en plus des investissements de Luigi Tallarico, des subventions de la commune à qui appartiennent les locaux, et des subsides de l’UEFA et de la FLF, le Centre de formation a conçu un plan d’épargne dès le départ de Flavio Becca. De cette manière, il est moins dépendant des résultats de l’équipe-fanion et d’une éventuelle défaillance de résultats et de ses conséquences financières. Et l’émergence de jeunes pousses prometteuses, Ivan Englaro ou Miguel Gonçalves en tête, mais aussi Enzo Lima, Valentino Tallarico, Rodrigo Tavares ou le jeune gardien Joao Alves, pourrait donner envie de croire à un retour des heures de gloire du F91 et viser la lune ? Pas dans l’immédiat : « avec les jeunes actuellement en équipe A, ce sera difficile de renouer avec le Dudelange de Becca » pour un Ivan Coelho réfléchi et lucide. Même s’il y a des joueurs particulièrement talentueux à suivre. Et on ne s’interdit pas de rêver à plus long terme avec eux.
Ce sont les pépites. Les jeunes qui ont ce petit quelque chose en plus. Chaque année est établi un listing de joueurs à fort potentiel. Pour certains, on leur donne l’opportunité de faire leurs preuves et se confronter au haut niveau, en PH par exemple (à Walferdange pour Calvin Madimba), ou prêté en BGL Ligue (Evan Mendes au Fola). Pour d’autres, le destin est plus fulgurant. Christophe Brites était sur cette liste dès la 2e année de catégorie Scolaires. Et a bénéficié de la détection de la FLF en intégrant le CFN de Mondercange. Lui qui a gagné la finale de Coupe du Prince pour le club de la Forge du Sud et fait ses débuts en sélection à Belfast en septembre a reçu les louanges des cadres de l’équipe A : « Mehdi Kirch et Samir Hadji ont tous les deux été très positifs sur lui à l’entraînement. » Des avis intéressants à plus d’un titre : la formation n’est pas que l’affaire des éducateurs et entraîneurs. La part de transmission par les cadres et le partage d’expérience est une part non négligeable dans l’apprentissage des jeunes diamants bruts qu’il faut polir pour les voir briller. Une autre pierre précieuse semble être promise à un avenir lumineux et figurait elle aussi sur ladite liste : Tiziano Mancini. Même si Ivan Coelho ne veut pas nous révéler son nom tout en admettant avec un sourire complice que notre proposition est loin d’être erronée, le défenseur de 18 ans fait l’unanimité parmi les scouts et formateurs du club. Titulaire dans la charnière centrale des Rout Léiwen U17 en 2022-2023 puis chez les U19 depuis cette année, il pourrait partir à l’étranger et suivre le destin d’un Aiman Dardari.
Et il y a également une part de chance pour définir la destinée entre intégration à l’équipe première à domicile ou exportation au plus haut niveau en pro à l’étranger : le formateur détermine en effet en premier lieu les postes sur lesquels il y a un besoin. « C’était le cas pour Migui par exemple : en défense on avait déjà beaucoup de talents et des contrats qui nous liaient à des joueurs » explique Coelho. C’est cela aussi la vie d’un club : jongler entre les ambitions sportives, l’humain, le cadre administratif ou légal et le projet global. « On est en lien constant avec Marco Martino, et c’était déjà le cas avec Carlos Fangueiro, pour construire l’avenir du club, ensemble dans la même direction. » On l’aura compris, Dudelange n’est pas prêt d’abandonner sa forge de talents.
Ils font le bonheur du club de la Forge du Sud et poussent au portillon de l’équipe nationale. Focus sur les étoiles montantes prêtes à prendre le chemin de leurs aînées vers les plus hauts cieux.
Un parcours étonnant pour celui qui a bluffé tout le monde en étant convoqué par Luc Holtz en septembre alors même que peu de cadres à Dudelange le connaissait. Et pour cause, le jeune ailier droit s’entraîne au Centre de Formation National de la FLF de Mondercange, et a été repéré par Mario Mutsch qui craignait que le Portugal ne nous ravisse une nouvelle pépite. Intégré aux Rout Léiwen U16 puis U17 en 2023 sous les ordres de René Peters, il bascule alors dans le grand bain en se voyant offrir une première cape internationale en équipe A le 5 septembre dernier à Belfast, lors de la rencontre de Ligue des Nations face à l’Irlande du Nord (2-0). Un quart d’heure au plus haut niveau face à des adversaires qui pour certains ont déjà eu du temps de jeu en Premier League… De quoi débuter son CV de la plus belle des manières. Laissé avec les U19 de Mutsch lors du rassemblement d’octobre, il a participé aux trois rencontres dont deux comme titulaire dans l’entrejeu et même comme arrière gauche. La palette du tout jeune Brites n’est pas prête de s’éteindre.
Migui a fait ses premières classes à Esch-sur-Alzette : d’abord à la Jeunesse de 7 à 9 ans, puis à l’US Esch, avant de rejoindre le centre de formation Gigi l’Amoroso à 11 ans. Passé chez les U17 de Dudelange, il partira en prêt à Pétange avant de vivre une aventure d’un an parmi les U19 de Gil Vicente au Portugal et de revenir au F91, où il figure parmi les meilleurs espoirs de la BGL Ligue et prend de plus en plus d’ampleur.
Au niveau international, il compte 7 sélections chez les U19 de Manuel Cardoni et 10 au sein des U21 de Dan Huet dont il a pris le capitanat et est devenu titulaire indiscutable, en attendant la prochaine étape ?
Passé lui aussi par l’incontournable Académie du Racing de 6 à 8 ans puis les jeunes du FC Metz, Ivan intègre la formation du F91 dès l’âge de 13 ans. Prêté au Swift durant la saison 2021-2022, il passe en équipe première à Dudelange dès son retour. Remplaçant de qualité cette saison, il est entré sur le terrain au cours de 11 des 12 matchs de BGL Ligue disputés par les hommes de Marco Martino, après une saison où il a participé à 25 rencontres dans l’élite et délivré 4 passes décisives.
Depuis septembre 2023, il a intégré l’effectif des U21 du Luxembourg et a démarré titulaire la totalité des matchs disputés en 2024 par le groupe de Dan Huet.
Ces trois espoirs ne sont pas les seuls à attirer la lumière au F91 et bénéficier des conseils précieux de Mehdi Kirch, Vincent Decker et autres Samir Hadji. Tim Flick, formé à Norden et passé par les jeunes de l’Eintracht Frankfurt, est arrivé du Fola cet été à 18 ans et figure parmi les talents les plus prometteurs de sa génération. Fort de près de 20 sélections luxembourgeoises en U15, U17, U19 et désormais U21, l’attaquant espère un avenir en pro pour franchir un cap. Le défenseur Tiziano Mancini a intégré l’équipe-fanion du F91 l’an passé après des apparitions chez les Rout Léiwen U17 sous Daniel Zirbes. Cette saison, Mario Mutsch l’a convoqué en octobre pour la campagne de qualification à l’Euro U19 et l’a titularisé lors des trois rencontres. Diogo Monteiro arrivé à 14 ans à Dudelange et passé par le centre de formation de Kaiserslautern est revenu l’hiver dernier d’Italie pour grossir les rangs de l’équipe première : à son actif, quelques piges en BGL Ligue en août et 23 matchs internationaux, dont 11 chez les espoirs de Manuel Cardoni. Qui a dit que la Forge du Sud était vieillissante ?
Crédits photos : Steve Birtz
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