Il n’a fallu qu’une seule saison à Steve Jung pour devenir double champion SWASV en Autocross. Il a démontré une nouvelle fois, s’il existait encore des personnes qui en doutaient, qu’il est capable de s’imposer sur tous les terrains. Qu’à cela ne tienne, en 2025, il retrouvera le bitume en revenant au rallye, avec en ligne de mire, un titre de champion national qu’il a déjà remporté en 2014. Entretien avec le couteau suisse du sport mécanique luxembourgeois
Steve Jung, vous donnez décidément le tournis à vos suiveurs. On s’habitue de vous voir dans une certaine discipline et 12 mois plus tard, vous vous retrouvez sur la ligne de départ d’une tout autre. Vous avez quasiment touché à tous les sports automobiles pratiqués au Luxembourg…
Steve Jung : C’est vrai… J’aime toucher à tout. Le rallye, le stock-car, l’endurance. J’ai connu une belle première partie de carrière à l’échelon national, mais j’ai décidé de tout mettre entre parenthèses à la naissance de ma fille. À ses 2 ans, ma femme m’a encouragé à reprendre et de but en blanc, je me suis décidé à m’essayer à l’autocross. J’ai alors acheté un bon buggy et je me suis inscrit au SWASV. Ce qui m’a attiré dans ce championnat, c’est sa popularité. À chaque weekend de course, il y a environ 200 véhicules inscrits. Ça ne se voit quasiment nulle part ailleurs. Et en plus, il y a des pilotes internationaux qui viennent se mesurer à nous, ce qui fait monter le niveau.
Immédiatement, vous vous retrouvez à vous bagarrer dans le groupe de tête. C’est inné chez vous cette capacité d’adaptation ?
L’adaptation découle du travail. Quand je mets un casque, c’est pour gagner. Parfois, ce n’est pas possible et il faut reconnaître la supériorité de l’adversaire. Et c’est à ce moment-là que j’apprends. Mais dans tous les cas, quand on a une ambition, il faut se donner les moyens de l’atteindre. Cela passe par le travail. Je ne connaissais aucun circuit. Je partais avec un gros désavantage par rapport à mes concurrents qui roulent depuis des années. Je devais compenser avec une préparation sérieuse. Je veillais à mes temps de sommeil. Quand les autres pouvaient se permettre de décompresser, je m’efforçais de parcourir la piste à pied 6 ou 7 fois pour en cerner les subtilités et comprendre comment elle se dégradait. Ce qui ne jouait pas non plus en ma faveur, c’est qu’on n’avait aucun essai libre. Les premiers tours de roues comptaient immédiatement pour la qualification. Et celle-ci est primordiale, vu que je n’avais pas vraiment l’expérience des dépassements en course. Du coup, il n’y a pas le choix : il faut apprendre vite.
L’état de la piste, c’est une chose. Mais, en plus en autocross, vous vous retrouvez dans des duels plus agressifs que dans les autres disciplines auxquelles vous étiez habitué.
Que ce soit en rallye, en autocross ou dans n’importe quelle autre discipline de sport mécanique, c’est la constance qui prime. J’ai un style de conduite très propre et je parviens à maintenir un rythme uniforme tour après tour. Si je ne suis pas gêné, ma trajectoire ne varie quasiment pas entre deux tours de piste. À tout moment, je m’appliquais dans l’entrée des virages et je mettais mes roues droites avant tout le monde, ce qui me faisait sortir plus rapidement. Si je me retrouvais derrière un adversaire qui défendait bien, je ne prenais pas de risques démesurés pour le dépasser. Je préférais perdre un ou deux points sur la manche que de tenter le diable et en perdre 10. C’est sur ce point précis que je me suis démarqué par rapport à mes principaux adversaires. À la différence d’eux, j’ai réussi à marquer de gros points à toutes les manches.
Et donc, en une seule saison, sans expérience préalable, vous parvenez à glaner deux titres : le Spezialcross bis 1600ccm et le Spezialcross über 1600ccm. Le tout avec le même buggy. Pourtant, votre buggy devait être en sous-performance dans la seconde catégorie, non ?
À vrai dire, non. Oui, en vitesse de pointe, je ne pouvais rien faire face aux machines plus puissantes. Mais, mon buggy était plus léger et bien plus maniable. Je refaisais tout mon retard dans les portions plus sinueuses.
Ce double titre d’entrée, c’est votre plus bel accomplissement en sports mécaniques ?
C’était un très gros challenge, mais mon plus bel accomplissement en sports mécaniques reste toujours ma saison 2014. J’étais engagé en rallye sur une Citroën C2 R2 Max. Cette saison avait été incroyable. Je n’ai pas connu le moindre abandon et je termine Champion de Luxembourg, Champion ERT, Vainqueur de la Coupe de Luxembourg et 3e du Championnat du Saarland.
Le rallye vous manquait ?
À vrai dire, je ne savais pas ce que je ferais cette saison. Participer au championnat d’Europe d’Autocross, il n’en était pas question. Les manches sont trop éloignées. Tests compris, c’est une saison qui comporte un total de 28 000km de trajet. Quand on a une famille, c’est de trop. Un beau jour, j’écrivais avec Steve Fernandes (ndlr : patron de FS-Sport) sur un sujet totalement différent. Il n’empêche qu’à un moment donné, je lui ai dit que ça me plairait de reprendre le rallye, mais que j’hésitais encore. Ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Il s’est donné le temps de la réflexion et m’a transmis une offre. À partir de là, je savais que 2025 serait l’année où je reviendrais au rallye. Je vais donc concourir sous la direction de Steve Fernandes avec une Peugeot 208 Rally 4. C’est aussi FS-Sport qui s’occupera de mes assistances. Ça va être quelque chose de totalement nouveau pour moi, parce que mes assistances, je les ai toujours gérées avec un groupe d’amis jusqu’à présent. Ça va me permettre de me consacrer entièrement au pilotage et je sais que pour l’assistance, la voiture sera dans les mains de personnes qui la connaissent à 100%. Je vais faire tout le Championnat de Luxembourg. Certaines des manches sont reprises dans le Championnat ERT. Mais de là à dire que je vais faire tout le Championnat ERT, je ne sais pas. Ça dépend du budget, du temps et de la disponibilité des copilotes.
Précisément, savez-vous déjà qui prendra place à votre droite ?
J’ai une shortlist. Je cherchais quelqu’un qui a la même vision des choses que moi et qui a une bonne expérience dans le domaine. J’en connais quelques-uns qui cochent toutes les cases. Mais chaque chose en son temps, je vais d’abord continuer de trouver des partenaires financiers qui m’accompagneront dans ce projet.
L’objectif sera d’être de nouveau sacré champion ?
Comme d’habitude, si je m’inscris, c’est dans le but de devenir champion. Le défi sera de taille. Les voitures d’aujourd’hui sont beaucoup plus performantes que celles que je pilotais il y a 10 ans et les autres pilotes auront plus d’expérience que moi sur ces nouveaux modèles.
Est-ce que vous avez développé en autocross des compétences que vous pourrez appliquer en rallye ?
Non, pas vraiment : les techniques de pilotage sont très différentes. Sans même parler du fait que mon buggy était un 4 roues motrices, la technique pour prendre les virages est complètement différente. En autocross, il faut être de travers avant l’entrée dans le virage et être pied au plancher au moment de le franchir. C’était vraiment bizarre au début… En rallye, l’entrée dans le virage se fait de manière tout à fait classique. L’art du pilote de rallye, c’est de trouver le moment exact où l’on peut ré-accélérer et d’y mettre le bon dosage. Comme vous le voyez, ce n’est pas du tout la même chose. Le point commun, ce sera ma manière de piloter. Je privilégierai toujours la constance par rapport à la performance. Je préfère terminer 5 fois deuxième que de gagner 3 fois et d’abandonner 2 fois.
Propos recueillis par : Andy Foyen
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