Il est 18h00 à Cessange. Le soleil, bien discret après une journée assez capricieuse, est enfin de sortie. Un timing idéal pour tous les membres de l’équipe qui se sont retrouvés au terrain de sports de Boy Konen. Ignacius Gómez-Acebo, avant de laisser les joueurs se dépenser sur le terrain dispense ses derniers conseils tactiques. À l’aide d’une palette et des pions, il dégaine les explications, conseils et instructions à tout l’effectif, particulièrement à l’écoute. Passé ce brief tactique, l’heure est maintenant à la pratique. Pendant 90 minutes, les jeunes courent sans se reposer et essaient d’appliquer les consignes tactiques que leur coach leur a distillé. Ainsi vit le hockey sur gazon, discipline originale au Luxembourg, mais en essor continu.
Nouvelle journée, et nouveau costume. Aujourd’hui, c’est sous le poste de présentateur de la Fédération que « Nacho » nous reçoit. Pour faire le point avant tout sur la situation de cette fédération, et analyser le travail accompli depuis maintenant quatre ans. Et force est de constater que la plupart des voyants sont au vert : augmentation du nombre de membres, participation à des compétitions européennes, présence tant masculine que féminine : les raisons de se réjouir sont multiples.
Nacho, ancien joueur professionnel à Saragosse a rejoint le projet en 2017. « Quand on a commencé le projet il y a quatre ans, il n’y avait absolument rien au Luxembourg, ce qui nous a permis de pouvoir avoir carte blanche sur ce que l’on voulait créer. On pouvait tout faire. Ce challenge m’a plu car tout était aligné. Les bonnes personnes étaient là au bon moment, et je me suis dit « pourquoi pas ? ». Il y avait tellement de choses à faire, mais je voyais ça comme une motivation plus que comme un obstacle. » Il est vrai qu’à l’époque, lorsque le projet se lance, on est au point zéro. Au Luxembourg, le hockey sur gazon est au mieux une curiosité, au pire une inconnue. Ce qui n’empêche pas les acteurs de plancher dur pour démarcher des joueurs. Le processus de recrutement et de mise en visibilité de cette discipline sportive passe donc par des évènements ci et là. En école, lors de journées organisées et autres après-midi découverte, le sport se dévoile de plus en plus et parvient assez vite à trouver quelques membres. Un travail de longue haleine mais qui porte ses fruits, au vu du nombre de joueurs présents aujourd’hui lors des compétitions.« À l’époque, quand on faisait les entraînements on se retrouvait avec deux à trois enfants par tranche horaire, et parfois personne ne débarquait. Il y avait toujours des excuses de la part des élèves pour ne pas toujours être la. Cette dernière semaine, par tranches horaires nous avions environ 40 à 50 enfants. C’est une énorme progression. Faire de la compétition, avoir des bons entraîneurs et créer un sens de communauté a vraiment aidé à faire évoluer les choses. Créer des liens entre les joueurs garantit qu’ils auront envie de revenir pour retrouver leurs ami(e)s. »
« Quand on a commencé le projet il y a quatre ans, il n’y avait absolument rien au Luxembourg. (…) Il y avait tellement de choses à faire, mais je voyais ça comme une motivation plus que comme un obstacle »
Au-delà des résultats satisfaisants en termes de recrutement, Nacho se félicite de l’impact positif qu’apporte ce sport à de nombreux jeunes. « C’est un sport collectif, ce qui garantit un développement humain très positif pour ceux qui vont le pratiquer. Travailler en équipe n’est pas évident, et cela peut aussi avoir des répercussions positives sur les métiers que feront tous les membres plus tard dans la vie. C’est une préparation au travail en groupe ». Des apports humains qui semblent aussi satisfaire les parents, heureux de voir les enfants se développer, et qui s’impliquent énormément dans le développement de la Fédération. Une aide qui est nécessaire, voire indispensable selon l’entraîneur, bien conscient que ces parents facilitent grandement la vie, tant sur le point logistique que par le soutien moral toujours agréable : « Franchement, avec les parents, cela se passe très bien. On a trouvé un noyau fort, bien engagé, qui nous aide sur énormément d’aspect du développement, y compris sur l’administratif ou les réseaux sociaux. Il y a quelques années, nous avions un bus pour déplacer les joueurs. Et c’était l’entraîneur qui s’occupait de conduire, c’était assez compliqué. Aujourd’hui nous avons instauré un système de roulement qui fait que les parents s’organisent pour se relayer et s’occuper du déplacement des joueurs. Cette implication est une vraie aide, qui nous permet de continuer le développement de la Fédération. Ils sont présents, et on les en remercie ».
Sans surprise, tout n’est pas non plus parfait. Commencer de zéro implique forcément des contraintes. « Les plus grands soucis que l’on a actuellement au Luxembourg, c’est la recherche de ressources humaines. Tout le monde ne peut pas venir ici pour développer un sport. Les pays autour sont déjà à un niveau supérieur. Donc forcément, les habitants belges qui habitent à Bruxelles par exemple, dans un rayon de 20 kilomètres ont une cinquantaine de club. Pourquoi venir au Luxembourg si tous leurs amis, mais aussi les infrastructures sont bien plus proches dans leur pays ? Aussi, nous n’avons pas de compétition ici. Nous devons prendre la voiture tous les week-ends, et aller à Namur, Liège, Bruxelles.. C’est sûr que c’est contraignant. »
« Cette implication des parents est une vraie aide, qui nous permet de continuer le développement de la Fédération. Ils sont présents, et on les en remercie »
Mais, loin d’être freinée par ces obstacles ci et là, la Fédération continue encore et toujours de chercher de nouveaux joueurs. Avec un objectif fixé à 400 membres d’ici 2025, et 250 personnes déjà inscrites à l’heure d’aujourd’hui, la FLHG semble dans les clous pour atteindre sa mission. Et essaye de s’adapter à une popularité croissante avec des solutions en interne : « On sait que l’on peut toujours s’améliorer. Par exemple, avoir plus d’entraîneurs sur le terrain pourrait être utile. La semaine dernière, le ratio entre joueurs et coach était trop en faveur des jeunes. Nous avons crée un système d’entraîneur qui permet d’impliquer tout le monde. Pour les tout petits, nous utilisons le système de « Youth trainer : c’est alors un joueur de 16-17 ans, qui est bon et très impliqué qui s’occupe de l’entraînement des plus jeunes. Quand il sera au terrain sous la casquette de joueur, il sera alors entraîné par moi ou Vitaly lors de ses sessions. Cela permet de former nos adolescents et leur faire mieux comprendre le jeu, ainsi que de les responsabiliser. On les paye aussi un petit peu, ce qui leur donne de l’argent de poche, et les parents sont contents des bénéfices que cela leur apporte. » Ainsi, la FLHG pourrait se retrouver débordée par le nombre de joueurs dorénavant présents pour les entraînements. Une situation que Nacho préfère analyser et regarder d’un oeil positif : « Plus nous avons d’encadreurs, plus nous pouvons permettre aux membres un suivi personnel, un meilleur feedback et une progression plus efficace. Mais on va dire que c’est une frustration liée au succès : après tout, c’est parce que nous avons énormément de membres que nous sommes confrontés à ce souci. Cela reste dans l’ensemble un bon signe. »
Ainsi, en responsabilisant certains des meilleurs éléments, la Fédération fait d’une pierre deux coups : d’abord, sur le plan logistique, ce système leur permet de considérablement améliorer la qualité des entraînements et de pouvoir toujours se focaliser sur l’amélioration de ces joueurs. Mais aussi, en faisant de certains membres des entraîneurs, le sentiment de communauté augmente considérablement, et l’attachement à la discipline, de par la proximité de tous se cimente elle aussi encore plus.
« Pour les tout petits, nous utilisons le système de « Youth trainer : c’est alors un joueur de 16-17 ans, qui est bon et très impliqué qui s’occupe de l’entraînement des plus jeunes. »
Les choses se compliquent néanmoins un peu vis-à-vis des compétitions. Ainsi, avec un seul club au pays, il n’est pas possible à l’instant d’offrir de championnat au sein du Grand-Duché. Une situation qui est évidemment handicapante, lorsque l’on connaît le monde du sport, et que nous savons parfaitement à quel point les rencontres à enjeu permettent d’augmenter le niveau global, ainsi que l’expérience, précieuse denrée. Pour contourner ce souci, les équipes jouent principalement en Belgique, et la sélection alterne les compétitions pour ses différentes catégories : « On fait un tournoi international avec les U16 garçons ou filles, U18 garçons ou filles, U21 garçons ou filles, et seniors. En gros, on peut faire un ou deux tournoi international par an.
« Pour ce qui est des clubs, tous les ans, nous participons au Club challenge, qui nous permet de nous mesurer à d’autres équipes européennes ».
Pour la sélection nationale, les soucis résident aussi dans le fait que bon nombre de joueurs de club n’ont pas de passeport luxembourgeois. Ainsi, la Fédération se retrouve dans une situation somme toute assez incongrue dans laquelle l’équipe de club est supérieure à la sélection. Une situation qui s’explique tant par les soucis administratifs que par le fait qu’à l’heure actuelle, le défi demeure toujours de réussir à attirer des joueurs luxembourgeois au sein de la FLGH, et non pas que des étrangers : « Un des objectifs demeure toujours de faire rentrer la culture hockey dans la société luxembourgeoise. Pour les étrangers et expatriés, cela marche plutôt bien. On est dans les écoles et on arrive à se faire connaître. Mais pour les Luxembourgeois, c’est une vraie découverte, il faut y aller étape par étape, les familiariser avec ce sport dont ils ne connaissent au final que très peu. »
Enfin, pour continuer à vraiment développer cette discipline au Grand-Duché, une étape conséquente pour continuer de faire avancer les choses serait d’accueillir une compétition. Une manière toujours efficace d’apporter un peu de lumière avec l’arrivée d’équipes de nombreux pays, et la sensation d’avoir un véritable évènement se déroulant au Luxembourg. Le choix de tournoi à organiser ? Le fameux Club Challenge : « Dans le désir de développement de la fédération, nous aimerions organiser cette compétition dans un futur proche. Cela permettrait de valoriser encore plus ce sport. En termes d’infrastructures, nous sommes ok. La seule chose qui manque c’est les ressources humaines, car cela demande énormément en termes d’organisation. On apprécierait aussi pouvoir accueillir une équipe nationale d’ici peu de temps. »
« Pour les Luxembourgeois, c’est une vraie découverte, il faut y aller étape par étape, les familiariser avec ce sport dont ils ne connaissent au final que très peu. »
Ainsi, les missions demeurent multiples, mais la motivation intacte. Après avoir déjà fait un grand bon en quatre petites années, Nacho et ses collègues aspirent encore et toujours à grandir la Fédération, tant en nombre qu’en notoriété. Et, si les joueurs Luxembourgeois manquent encore un peu, l’entraîneur se sent confiant dans un pays où selon lui, le sport joue un rôle conséquent : « La culture sportive ici est dans la bonne ligne selon moi. Je me promène beaucoup et je vois généralement d’excellentes installations. La promotion du sport est faite dès l’école ce qui permet d’impliquer tôt les plus jeunes. Le climat n’est pas l’idéal pour faire des sports à l’extérieur, mais on s’adapte, on n’a pas le choix. On a beaucoup de support de la part des ministères, nous avons des réunions régulièrement pour parler des avancées. On sent vraiment que la fédération a un support derrière. «
Le véritable objectif dans tout cela ? La Fédération ne s’en cache pas, et l’affiche d’ailleurs fièrement sur son site. Celui-ci se situe dans trois ans, et dans la ville Lumière. Les Jeux Olympiques de 2024 sont en effet le grand rêve pour le comité, qui verrait en une participation aux olympiades la consécration de longues années d’effort. Pour cela, pas de miracles : il faut continuer à s’appuyer sur un élargissement des effectifs, et le gros du travail se situe dès le plus jeune âge : « Ce que l’on recherche principalement, c’est attirer les plus jeunes. Il faut que la base de la pyramide soit grande pour pouvoir monter le plus haut possible. Avoir une école de jeunes talentueux et motivés, cela implique de faire beaucoup de promotion, formation, activer le bouche à oreille et ainsi de suite… Avoir des gens attirés par ce sport dès le plus petit âge, c’est la garantie du futur de la Fédération. Quand bien même par la suite ces jeunes vont étudier ailleurs en Europe, ils peuvent continuer à jouer. Et s’ils ont le passeport du pays, ils peuvent revenir en sélection ce qui est toujours une très belle chose. »
« Avoir des gens attirés par ce sport très jeunes, c’est la garantie du futur de la Fédération. »
Ainsi, le pari fou débuté en 2017 semble bien parti pour s’achever en réussite. Bâtie à coup de long labeur, une détermination de tous les instants et « les bonnes personnes au bon moment », la FLHG a tout à fait trouvé sa place dans le microcosme des disciplines sportives au Grand-Duché. Assistera t-on au rêve de voir une équipe luxembourgeoise concourir aux Olympiades de Paris 2024 ? Pour le moment, on ne peut le garantir. Mais le simple fait de pouvoir se poser cette question, sans nécessairement connaître la réponse trois ans avant la compétition prestigieuse se doit, assurément, d’être vu comme une victoire.
Vers la création d’un nouveau club
La création d’un nouveau club fait aussi partie des objectifs de la fédération. Toujours dans le désir de développent, la Fédération de Hockey sur Gazon aspire à créer une nouvelle équipe au sein du Grand-Duché. Le but derrière tout cela : pouvoir créer de la compétition au sein même du pays, et ainsi ne pas devoir continuellement reposer sur des rencontres dans des pays frontaliers, voire encore plus lointains. Si le projet en est encore dans les toutes premières étapes, son aboutissement lui ne semble faire preuve d’aucun doute.
Un Club challenge tronqué par le COVID
Alors que l’on commence à penser que la vie sous Covid s’estompe tranquillement, le voyage de la Fédération à Zagreb pour le Club challenge a malheureusement rappelé que le virus circule toujours.. Avec plus de la moitié de l’équipe positive, la dernière rencontre a dû être annulée, et les précédentes se sont déroulées avec un effectif décimé. Si l’expérience de compétitions demeure, les résultats eux, n’ont pas été au rendez-vous, sabotés par des circonstances dépassant le cadre du simple sportif….
Adel Nabhan est Chief Marketing Officer chez De Groof Petercam, sponsor principal de la Fédération de Hockey sur gazon. Après deux années de partenariat, la banque – forte d’une histoire remontant à 1871, revient sur les décisions de soutenir cette discipline, et son opinion sur le développement de cette dernière au Grand-Duché.
Pourquoi avoir décidé de former un partenariat avec la Fédération de Hockey sur Gazon ?
Avant tout, De Groof Petercam est une banque aux origines belges et nous soutenons en Belgique des équipes de hockey depuis un certain nombre d’années. Quand l’opportunité est venue de soutenir cette discipline au Luxembourg, on s’est dit qu’il y avait une belle histoire à raconter. Nous avons fait le choix de sponsoriser la Fédération, tout en haut de la pyramide donc. Ils ont pour ambition de développer ce sport. C’est une Fédération jeune, avec un réel désir d’augmentation des licenciés, et avec un programme qui s’adresse aux jeunes. Faire découvrir un sport assez méconnu au Luxembourg, qui procure des sensations de plaisir extrêmement rapidement et permet rapidement de vite avoir un certain niveau est quelque chose qui nous a réellement attiré. C’est un sport rapide, plaisant à observer en tant que parents ou simples spectateurs. Mais aussi, nous sommes persuadés que le hockey est porteur de valeurs extrêmement similaires à celles de notre banque. D’exceller, car nous sommes portés par l’idée de se dépasser et trouver une solution pour nos clients, tout comme il faut toujours être actif et alerte dans le hockey. Ce sport véhicule aussi la valeur de faire équipe, de travailler ensemble pour un objectif commun, là aussi cher à De Groof Petercam. Et enfin, il y a dans cette Fédération un côté humain. Nous sommes une petite banque, avec 400 personnes au Luxembourg et 1 400 à travers l’Europe. Nous restons familial et à taille humaine. En ce sens, un partenariat nous paraissait couler de source. L’adéquation était totale entre notre taille, nos valeurs, et le désir de se développer avec de grandes ambitions. Mettre nos logos sur les maillots des joueurs était donc aussi une manière de montrer que nous sommes présents au Luxembourg et que nous aussi avons un vrai désir d’expansion. C’est un mariage qui fonctionne parfaitement.
Comment jugez-vous l’évolution de la Fédération depuis sa création ?
Pour avoir suivi la Fédération depuis 2019, ils sont très actifs, notamment dans la promotion de ce sport auprès des écoles. Il y a eu un gros travail de fait auprès des écoles internationales au Luxembourg. Il ne faut pas oublier que c’est un sport très connu à l’étranger comme en Espagne, au Pays-Bas ou en Belgique. D’ailleurs, la success story de l’expansion de la discipline en Belgique – qui n’existait quasiment pas il y a dix ans et qui maintenant est devenu populaire – nous a aussi donné l’envie de refaire la même chose. Et on voit jusque maintenant des très bons signes d’une démocratisation de tout cela. La Fédération a malheureusement été un peu freinée par le COVID, mais elle a une réelle volonté de faire connaître le hockey et le rendre plus présent dans la diaspora sportive du pays. Les moyens sont limités mais l’attitude est excellente, et c’est pour cela qu’on voulait les soutenir financièrement pour les aider à atteindre leurs objectifs.
Vous avez eu la chance de vous rendre au tournoi à Zagreb cet été, qu’en retenez-vous ?
Ce fut une très belle expérience. J’en retiens d’ailleurs une anecdote assez marquante puisque sur place, toutes les équipes présentes semblaient jalouser le maillot de la Fédération luxembourgeoise, et trouvaient que c’était le plus beau de tous. D’entendre ça et d’avoir vu en effet notre logo accolé à un maillot perçu comme le plus réussi de la compétition, c’était une sacrée fierté. D’’ailleurs, quand on regarde bien le logo de De Groof Petercam, le D et le P se rapprochent assez facilement d’une crosse de hockey. Cela permet de faire un petit clin d’oeil supplémentaire à notre attachement à ce sport.
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