Cela fait partie des appels et discussions que l’on appréhende un peu, forcément. Car on sait le sujet épineux, et le mental forcément touché par ces semaines de stress, prises de tête et négociations éreintantes. Mais ainsi va le travail, et le besoin d’en savoir plus sur la perception des acteurs du football au sein du Grand-Duché se fait sentir.
C’est peu dire que la décision prise par le gouvernement courant décembre d’instaurer un passe vaccinal — créant ainsi une forme tacite d’obligation — a chamboulé le monde du football au Luxembourg. Dans un état proche de la panique, chaque club a dû faire un inventaire de ses joueurs, analyser la situation et remettre en cause son fonctionnement. L’inquiétude était telle que, pendant quelque temps, l’idée d’un report de la 15e journée de BGL Ligue avait fait son trou.
Cette décision gouvernementale a permis de mettre en lumière le taux assez conséquent de joueurs n’étant pas encore vaccinés dans le sport le plus populaire du pays. Alors que certains championnats étrangers approchaient le 100 % de joueurs ayant reçu leurs doses, le Grand-Duché semblait particulièrement loin de tout cela. Une situation qui a forcé dirigeants et entraîneurs à agir au plus vite afin de se soumettre aux nouvelles règles. Un empressement qui n’a pas nécessairement été bien accueilli par les joueurs, comme le confirme sans concession Koray Ozcan, portier de l’UNA Strassen : « Beaucoup d’entre nous, et moi le premier, avons tenu aussi longtemps que possible, jusqu’à l’obligation du vaccin. C’est sûr que certains n’ont pas nécessairement été contents, mais ils se sont faits à l’idée, et ont réalisé qu’il y avait énormément à perdre s’ils ne le faisaient pas. »
Contacté à de nombreuses reprises par les médias ces dernières semaines, nous avons préféré laisser tranquille Fabrizio Bei, dont les signes de frustration et d’agacement face à une situation épineuse laissent penser qu’il vaut mieux éviter le sujet pour le moment. Ce qui est certain, c’est que les dirigeants des différents clubs n’ont absolument pas hésité à mettre la pression à leurs joueurs, en affirmant un positionnement clair : vaccination ou départ. À l’image du président de Wiltz, Michael Schenk, qui a posé un ultimatum au dernier joueur n’étant pas encore vacciné début janvier ; l’heure de la négociation et de la patience semblait passée.
Pour certains clubs néanmoins, la situation n’a pas été particulièrement complexe. À l’image du Racing, de Rodange ou du Swift, dont les entraîneurs Jeff Saibene, Éric Picart et Nello Parisi nous ont bien confirmé que tous les joueurs étaient à jour de leur vaccination.
Mais dans ce contexte pesant, et au sein d’une société de plus en plus polarisée sur le sujet, il était inévitable que certains clashs aux réelles conséquences se produisent. Le départ d’Aurélien Joachim du FC Differdange est un exemple parfait des difficultés à convaincre ceux qui ont un avis bien tranché et sont peu enclins à le modifier.
Dans cette ambiance assez tendue, certains joueurs réfractaires aux vaccins n’entrent pas dans la confrontation et souhaitent simplement trouver le juste milieu entre le bien collectif et les opinions de chacun. C’est le cas de Julien Klein, capitaine du Fola qui, ayant contracté le covid, n’a pas encore eu besoin d’une injection : « Je n’ai sûrement pas toutes les compétences pour juger la situation, mais j’ai des difficultés à voir l’utilité de ce vaccin. Quand on constate que 80 % des gens qui l’ont reçu attrapent le coronavirus, c’est forcément perturbant. Je n’ai aucun problème avec les vaccins de manière générale, j’ai toujours été d’accord sur les autres, et je respecte tous ceux qui veulent se faire vacciner. Mais, au-delà de mes interrogations sur sa pertinence, je ne suis pas énormément fan de la façon dont tout ceci a été amené. Cela me dérange plus que le vaccin en lui-même. » Face à l’expiration de son exemption dans un futur proche, le défenseur assure qu’il se fera vacciner, même à contrecœur : « Je n’ai jamais été contre la vaccination. Tout ceci me fait réfléchir, et si je peux éviter, je préfère le faire. La réglementation change aussi constamment, c’est infernal à suivre. Mais je ne veux pas créer de problèmes. Si pour le bien collectif on m’oblige à le faire, alors j’irai. »
Guéri, la solution parfaite ?
Une alternative a alors commencé à être envisagée : celle d’avoir dans son effectif des joueurs guéris plutôt que vaccinés. À l’image du club de Mondorf, qui s’est retrouvé avec treize joueurs contaminés durant la trêve pour qui le problème s’est, d’une certaine manière, résolu tout seul. S’il n’est pas possible de parler d’entourloupe, certains dirigeants ont tout de même publiquement exprimé leur espoir de voir certains joueurs attraper le virus, afin de pouvoir continuer avec eux sans passer par la case ultimatum. Une manière d’aborder la situation qui n’a pas nécessairement plu ; Schenk, président de Wiltz, a par exemple dénoncé un manque de courage et d’honnêteté.
Ainsi est-on face à un véritable capharnaüm, où les uns doivent jongler avec les opinions des autres afin de trouver un équilibre bancal. Néanmoins, alors que la situation en décembre faisait craindre le pire, force est de constater que le bilan final semble acceptable. Malgré quelques départs et certaines brouilles inévitables, les équipes de la BGL Ligue retrouvent les pelouses avec des effectifs plus ou moins au complet. En espérant que l’évolution de la vie avec le covid n’oblige pas à prendre de nouvelles mesures qui pourraient cette fois-ci définitivement faire s’écrouler l’édifice.
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