Avant toute chose, il est nécessaire de différencier les composantes qui caractérisent un athlète, un cyber-athlète et plus généralement l’humain. Nicolas Besombes, enseignant chercheur à l’université de Paris dont l’objet de recherche principal est l’esport, identifie plusieurs dimensions. « La dimension physique et mentale sont liées. Si on est mal dans son corps, ça a des répercussion psychologiques et si on va mal dans sa tête, le physique sera aussi tout aussi impacté. Mais ce n’est pas tout, puisque la dimension social du corps est elle aussi très importante. La façon dont on utilise notre corps est fondamentalement culturelle, elle s’ancre dans un milieu social ». Une dimension sociale tout aussi primordiale pour un gamer. « Par exemple, pour un joueur asiatique qui vient jouer en Occident, ce n’est pas la même langue, la même nourriture, le même rythme de vie, et avec l’éloignement de la famille, il peut y avoir un mal du pays. Ce bien-être social est donc extrêmement important ». Un bien-être social dans l’accès au haut niveau qui implique en grande partie la famille et plus particulièrement les parents. D’une époque différente où les nouvelles technologies n’existaient pas, le jeu vidéo a naturellement été « une source de conflit à un certain moment, mais les parents ont toujours été des soutiens quand la communication était établie. Mais comme pour de nombreux sports, les compétiteurs de haut niveau, ça reste une poignée d’élus parmi des millions de personnes qui en rêvent. Et à ce titre-là, ce n’est pas un projet de carrière avec des débouchés faciles. L’inquiétude des parents par rapport à des jeunes qui voudraient s’investir dans la pratique compétitive, elle est de ce fait tout à fait légitime et elle se comprend. Ce qu’on observe, c’est que les parents exigent tout de même de leurs enfants qu’ils atteignent un certain niveau d’études avant de s’engager dans la pratique professionnelle ».
Les coachs mentaux pour engranger de la confiance
S’il y a une pratique qui tend à se démocratiser dans les années à venir pour les gamers, c’est la préparation mentale. Pourtant, aujourd’hui, faire appel à des préparateurs mentaux est « rarement à l’initiative des joueurs eux-mêmes. Ce sont plutôt les structures qui, plus elles sont professionnelles, plus elles prennent en considération le fait que la performance ne passe pas seulement par celle dans le jeu mais aussi tous ce qui touche autour. Certaines font seulement la proposition de faire appel à un préparateur mental ou un psychologue du sport qui va les accompagner, tandis que d’autres vont les intégrer directement dans leur préparation, en mettant par exemple une séance par semaine avec des préparateurs mentaux » nous confie Nicolas Besombes. Il n’y a par conséquent par réellement de norme établie, et chaque joueur peut encore faire comme il l’entend. « Tout le monde n’y voit pas de l’intérêt immédiat. Pour les structures, cela dépend de la façon de penser la performance et d’imaginer comment elles peuvent accompagner leurs joueurs. Mais c’est quelque chose qui est de plus en plus développé au niveau professionnel ».
Pour des gamers professionnels, l’apport de ces préparateurs mentaux est d’ailleurs essentielle. Apprendre la gestion des émotions, contrôler son stress pour éviter de se laisser submerger dans une compétition… Mais ce n’est pas tout. « L’idée est de faire en sorte que le joueur se sente bien dans sa peau et dans sa vie pour pouvoir maximiser sa performance. Si l’athlète est en adéquation entre son activité professionnelle, familiale, de loisirs, ça va permettre de lui faire appréhender les entrainements et les matchs dans les meilleures conditions possibles et de pouvoir travailler sur autre chose, libérer son esprit pour se concentrer sur des aspects tactiques, techniques ». Et c’est sous différentes formes que le préparateur mental va pouvoir fournir son aide au joueur : de la méditation, de l’imagerie mentale, des focus groupe, des entretiens individuels…
Et le physique dans tout ça ?
On l’a bien compris, l’aspect physique et mental sont liés et l’un ne va pas sans l’autre. Véritable outil de travail des cyber-athlètes, le corps est constamment sollicité et entrent alors en jeu plusieurs facteurs primordiaux : le repos et l’alimentation. Le premier s’inclue dans tous les dispositifs de récupération, que ce soit à travers des étirements, des massages, de la kinésithérapie, de l’ostéopathie mais aussi et surtout le sommeil. Nicolas Besombes explique : « Lorsqu’on sur-sollicite le corps, il s’use, que ce soit au niveau de l’articulation, des chaines musculaires ou au niveau cognitif. La question du repos est essentielle pour pouvoir ré-oxygéner le cerveau pour que les performances cognitives puissent continuer à s’établir, mais aussi traiter les traumatismes qui peuvent être créés par une mauvaise posture par exemple ». Par conséquent, le tout n’est pas de s’entrainer le plus, mais de s’entrainer de manière optimale en cumulant plusieurs types de pauses. Car certains temps de repos permettent, entre autres, d’oxygéner le cerveau et de reposer le corps tandis que d’autres, plus longues, parfont un équilibre de vie dans lequel le joueur se vide complètement la tête et passe du temps avec ses proches. Le sommeil, dans tout ça, doit passer par une phase dite « profonde » afin que la récupération soit la meilleure possible.
L’alimentation est l’autre facteur qui a son importance et qui a, pour le coup, « le plus vite été mis en place par les structures ». En effet, comme le corps est l’outil de travail des joueurs, l’énergie engrangée par ces derniers passe notamment par leur alimentation. « Le corps besoin d’énergie, demande des vitamines, des stimulants tels que la caféine donc la nutrition joue un rôle à la fois dans la récupération, dans la performance, mais aussi dans l’image qu’ont les joueurs d’eux-même ». Une image qui prend de plus en plus d’importance dans une ère où n’importe quelle personnalité connue dans son milieu devient une marque. « C’est important de refléter une image d’eux-mêmes avec laquelle il sont à l’aise. Une situation de surpoids, ce n’est pas forcément l’image qu’ils veulent renvoyer aujourd’hui et ce n’est pas une image qui est bénéfique pour leur business ». C’est pourquoi les structures d’esport mettent à disposition, pour la plupart, les conseils d’un nutritionniste ou d’un diététicien qui évaluent leurs besoin caloriques et émettent des préconisations.
L’aspect physique est complété par la préparation physique du gamer. Celle-ci peut-être générale ou spécifique, « avec un accent sur les bras, les avant-bras, les poignets, les mains, les doigts mais aussi les yeux. Les chaines musculaires posturales aussi sont travaillées : le dos, les lombaires, les cervicales. Sans être extrêmement développée, la musculature doit être suffisamment solide pour encaisser des heures de pratiques dans la même position ».
En somme, le bien-être d’un gamer passe par tout un tas de facteurs. Le facteur social va lui permettre de se sentir bien dans un environnement qui peut parfois changer du tout au tout. Le facteur mental, lui, va passer entre autres par la gestion des émotions et du stress lors des compétitions mais aussi dans la vie de tous les jours. Enfin, le facteur physique va permettre au joueur d’optimiser au maximum ses performances. Toutes ces composantes sont étroitement liées et négliger l’une d’entre elles risquerait d’entrainer un déséquilibre.
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