Entre les États-Unis et le Luxembourg, les liens sont forts depuis plus d’un siècle. De nombreux Luxembourgeois ont migré outre-Atlantique au cours des siècles précédents à la recherche d’une vie meilleure, alors que d’autres ont fait le chemin inverse, comme on a pu le voir avec le skeletoneur Jeff Bauer. Une émigration aux USA qui a débuté au XIXe siècle, avec le départ d’un Luxembourgeois sur quatre vers cette destination. À l’époque, le Luxembourg est loin d’être le pays florissant qu’il est actuellement. Le Grand-Duché est pauvre, et fortement rural. Accablées par les mauvaises récoltes et la famine qui en découlent, des familles entières décident de tout quitter pour s’offrir le « rêve américain ». Entre 1845 et 1892, on estime à 72.000 le nombre de Luxembourgeois partis vers les États-Unis d’Amérique.
Les régions rurales du pays sont donc désertées. Pour la plupart des immigrés luxembourgeois, il vaut mieux partir cultiver les terres fertiles et surtout bon marché américaines. Et ces terres sont de plus en plus nombreuses, au moment de la fameuse « conquête de l’Ouest », qui prive de leurs terres sacrées les Amérindiens, mais offre aux immigrés la possibilité d’une vie meilleure. De nombreux États rejoignent successivement l’État fédéral américain, comme l’Arkansas en 1836, le Michigan en 1837, le Texas en 1845, l’Iowa en 1846, le Wisconsin en 1848, la Californie en 1850, et pour ce qui nous intéresse, le Minnesota en 1858.
C’est dans cet État du Midwest, situé à la frontière canadienne et bordé par le lac Supérieur, que les ancêtres de Ben Sathre débarquent, comme l’explique le coureur : « Je vis aux États-Unis, dans une petite ville du Minnesota. J’ai fait ma demande de naturalisation en 2016, parce que mes grands-parents ont émigré aux USA. C’est en discutant avec des proches que l’idée m’a été soufflée. C’était pour moi une bonne opportunité de représenter le pays de mes grands-parents. »
Une opportunité qui se refuse difficilement grâce à la possibilité offerte depuis quelques années aux descendants de Luxembourgeois ayant au fil des générations perdu la nationalité grand-ducale. Une fois la procédure administrative selon l’article 14 de la loi du 23 octobre 2018 officialisée par les autorités du pays, Ben Sathre a trouvé de l’aide par l’intermédiaire de Charel Grethen : « Quand j’ai obtenu la nationalité, j’ai essayé de contacter la FLA. J’ai eu un peu de mal au début, mais Charel Grethen a facilité les choses. Il a été un relais entre la FLA et moi. »
Objectif 2h11’30’’
Avec un record personnel à 2h15’’11 établi au marathon de Houston en janvier 2019, Ben Sathre a encore un peu moins de quatre minutes à aller chercher s’il veut valider son billet pour Tokyo 2021. Mais grâce à son affiliation à la FLA et au COSL validée par l’IAAF, il peut aussi espérer obtenir son précieux sésame grâce au classement mondial, où il occupe actuellement la 702e place, après avoir atteint au maximum le 596e rang.
Cela fait désormais 15 ans qu’il use ses baskets sur les routes et les pistes américaines : « C’est ma sœur qui m’a encouragé à me lancer. À l’université, j’ai réussi quelques performances, notamment sur des cross et sur des longues distances sur piste », se remémore l’Américano-Luxembourgeois. Sans sponsor, Ben Sathre travaille 40 heures par semaine et s’entraîne sur son temps libre, mais il bénéficie tout de même d’un petit soutien de la FLA, mais aussi du COSL, dont il fait désormais partie du cadre Élite, et qui lui offre un coup de pouce, notamment pour ses voyages.
Et comme de nombreux athlètes actuellement, il est pénalisé par la situation liée à la crise sanitaire aux États-Unis, entre restrictions et lockdown. Les possibilités afin d’accomplir les minima requis pour aller à Tokyo seront donc peu nombreuses, mais nul doute que le marathonien n’hésitera pas à les saisir. « Ça va être difficile, j’ai repris l’entraînement il y a quelques semaines parce que j’avais besoin d’un break, notamment au niveau mental. Je ne sais pas comment les choses vont évoluer, mais c’est la vie, il y a des choses qu’on ne contrôle pas », explique Ben Sathre avec philosophie.
Et même si la qualification pour la prochaine olympiade au Japon lui file entre les doigts, Ben Sathre ne compte pas remiser ses chaussures au placard et sera « focus » sur la suivante, à Paris, en 2024 : « Je veux maximiser mon potentiel et emmagasiner de l’expérience car le potentiel est là, donc je ne lâcherai pas le marathon. D’autant plus que j’aurai 34 ans en 2024 et qu’en marathon, on peut encore s’améliorer jusque 35 ans… »Mais avec tout cela, quand aura-t-on l’occasion d’apercevoir le marathonien dans son pays d’adoption, le Luxembourg, et à Dudelange, où il a des « cousins » maternels ? « J’aimerais rester un peu en immersion dans le pays, je ne connais que la Coque et le centre-ville de Luxembourg. Il y a un an, j’avais pu venir courir à Francfort et j’avais notamment rencontré Yonas Kinde. » Entre les États-Unis et
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