Est-ce que vous pouvez revenir avec nous sur le match de ce week-end ?
Mercredi dernier, j’ai été en contact avec le coach de Wincrange. Il m’expliquait qu’il y avait deux cas de Covid au sein de son effectif, et que dans l’absolu, il aurait aimé le report du match. Je lui ai expliqué que nous sortions d’un forfait contre Bertrange, que dans une semaine, notre rencontre face au Fola étaiy aussi reportée à cause d’une sélection des U17. Si on acceptait ce report, qui n’aurait pas forcément été validée par la fédération, on se retrouvait à reprendre le championnat le 19 mars… Ajouté à cela qu’à partir de ce moment, nous allons enchaîner des rencontres tous les trois jours régulièrement, ça n’était pas vraiment possible… Ma direction m’a aussi conforté là-dedans, en rappelant que nos joueuses ne sont pas des professionnelles et qu’elles font énormément d’efforts. Elles sont déjà obligées de poser des heures de congé pour les rencontres le mercredi soir, on ne peut pas en demander plus.
Quelle a été sa réponse ?
Il m’a dit qu’il comprenait, et qu’il allait essayer de récupérer quelques joueuses d’ici ce week-end, et que cela irait… On arrive donc samedi à Wincrange…
Quand vous arrivez, vous ne vous doutez absolument pas qu’il y a anguille sous roche donc ?
Absolument pas. Pour moi, nous allons avoir un match, un vrai match. Nous sommes alors dans le vestiaire, je suis en pleine causerie, et l’arbitre, qui vient toujours voir les tenues des deux équipes avant la rencontre, m’annonce à ce moment que l’adversaire n’a que sept joueuses de présentes. On l’apprend donc en pleine causerie. On connait ce scénario, puisqu’on l’a déjà vécu…
Se retrouver à jouer à 11 contre 7, c’est dénué de tout intérêt on imagine…
C’est exactement ça. C’est dénué de tout intérêt. Les filles, je ne les ai pas reconnu pendant les vingt-huit minutes de jeu. Elles étaient dégoûtées. Quand on connait l’effectif qu’a la chance d’avoir le Racing aujourd’hui, avec des joueuses qui ont connu la première division allemande, française, la Coupe du monde… elles étaient écoeurées. Moi qui ai entraîné en championnat de France, à un moment, c’est surréel…
Vous n’êtes pas dupe sur les raisons derrière ce forfait après le lancement du match…
Absolument pas. L’explication est toute claire. Wincrange a fait un forfait à Junglinster en décembre, lors d’un match en semaine. Ce que je peux comprendre, évidemment, ce sont des déplacements très difficiles en termes de temps. Même si, au passage, ils n’ont eu aucun problème à me proposer à moi de venir un mercredi soir… Mais aujourd’hui, avec un nouveau forfait ce week-end, ils se seraient retrouvés dans la même situation que Niederkorn l’an dernier, avec un forfait général. Tout simplement.
Quels sont vos recours de votre côté ?
Aussi triste que ça puisse être, ils ont fait tout ce qu’il fallait pour être dans les normes de la règlementation. Ils ont démarré le match, donc pour eux ça n’est pas un forfait. Ils ont simplement obligé un club à faire un aller retour de 100 kilomètres, mais aussi à un pauvre arbitre.
Mais ne pourrait-on pas parler de la loi et de l’esprit ? On sait tous qu’il y a une règlementation, mais l’esprit logique ne doit-il pas perdurer à un moment pour essayer d’éviter ce genre de situations, voire mettre des sanctions à posteriori ?
Moi, j’aimerais y croire. Nous avons vécu exactement la même situation plus tôt dans l’année face à Hesperange, mais rien n’a changé. Donc je ne suis pas confiant. Et aujourd’hui, ce qui s’est passé est un manque de respect total envers tout le monde. Envers l’adversaire, envers un arbitre qui a peut-être autre chose à faire que faire 100 kilomètres pour arbitrer 20 minutes… Quand on regarde le cas d’Hesperange, absolument rien n’est fait pour empêcher ce genre d’abus. C’est un énorme foutage de gueule, tout simplement. Il n’y a pas d’autres mots. Prenez le championnat de France : quand une petite équipe reçoit Lyon ou Paris, elle en prend aussi 8 ou 9… Mais il n’y a pas de forfait. Elles jouent le jeu, et elles apprennent aussi dans la défaite. Tout ceci est un manque de respect total. Cela fausse l’équité sportive, y compris pour nos concurrents. Nous aurions sûrement gagné ce match oui, mais on doit pouvoir jouer. Et je vais même aller plus loin : on aurait sûrement gagné plus que 4 – 0. Nous avons des joueuses ici qui luttent pour le titre de meilleur buteuse, pour le record du nombre de buts par saison… Entre le forfait de Bertrange, l’arrêt du match de Wincrange, l’arrêt du match contre Hesperange… Ce sont des filles qui ratent peut-être 10-15 buts sur trois matchs. C’est un manque de respect pour tout le monde.
Si on revient à ce qui s’était passé contre Hesperange, vous dîtes qu’il n’y a eu aucune conséquence… Mais avez-vous eu un dialogue avec la fédération, une explication ? Est-ce que vous savez ce qu’il s’est passé ?
Notre direction avait alerté tout le monde. Les seuls retours qu’on a eu de la Fédération, c’est que les clubs ont été dans les règles. Après, si on parle d’éthique, il faudrait quand même qu’on nous explique comment on peut envoyer l’équipe réserve à 14 joueuses, tandis que l’équipe première se déplace à 7… Donc en termes d’éthique, il n’y en a absolument aucune. La seule sanction qu’ils ont eu si je ne me trompe pas, c’est 20 ou 30 euros pour manque de joueuses. À ce tel niveau de ridicule, j’aurais préféré qu’il n’y ait rien. C’est du foutage de gueule.
Vous avez l’impression qu’il y a des gens concernés par la situation au sein des instances ? Des personnes qui se planchent sur la situation ?
C’est un sujet que nous avions déja évoqué la saison dernière, puisqu’il y avait eu le forfait général de Niederkorn. On a eu une réunion en fin de saison où il a été demandé de réduire le championnat à 8 ou 10 équipes… Les seules réponses que l’on a eu, c’est que la fédération ne pouvait pas décider, et qu’il fallait l’accord des clubs. Mais à un moment, il va bien falloir quelqu’un qui porte ses coui***es et dise « Ça rassemble à une parodie de championnat et il faut changer les choses » ! Un club comme Bertrange, pour qui j’ai énormément d’estime, en particulier pour ces joueuses qui bossent et prennent des tôles chaque week-end, a quand même demandé en rester en Ligue 1 Dames l’an passé. Donc soit je veux être dans la meilleure division, j’assume, et je joue le jeu à fond. Soit je ne viens pas participer.
Vous êtes leader du championnat, en quart de la coupe, mais probablement le nombre le plus faible de matchs joués… Comment les joueuses vivent-elles la situation ?
Elles sont dégoûtées. Aujourd’hui, nous sommes qualifiés en quart de finale de la Coupe de Luxembourg sans avoir joué un seul match dans la compétition ? Vous vous rendez compte ? Les joueuses le vivent très mal. Elles travaillent, elles prennent des congés, elles font des sacrifices, pour ça comme résultat ? C’est déprimant. On se retrouve avec une trêve le 11 décembre, et une reprise du championnat le 26 février, ce qui fait déja deux mois et demie de pause… Et là, avec la situation, on va jouer notre vrai premier match mi-mars… Même si on prend le match face au Fola du week-end prochain : une joueuse de 14 ans est sélectionné en U17, et la rencontre d’une équipe est reportée ? On marche sur la tête. C’est complètement grotesque. Mais les clubs s’adaptent avec un règlement qui doit dater d’avant-guerre…
C’est donc bien l’instance dirigeante qui est responsable plus que les clubs ?
Absolument. Déjà la saison dernière, quand tout le monde a émis le souhait de diminuer le nombre d’équipes, il y aurait du y avoir des actions. C’est à la Fédération de prendre ses responsabilités. C’est à eux de bouger.
Quelle est la solution pour vous selon vous ?
Passer à un championnat à huit équipes à partir de la saison prochaine. Des matchs aller-retour, des playoffs de montées, de titre, et de descente. Augmenter la compétitivité. C’est à faire urgemment. On ne peut pas laisser passer une saison de plus.
Vous pensez que ça peut se faire ?
J’ai vu que Dan Santos pensait aussi qu’il fallait une réforme du championnat. On ne peut qu’espérer qu’il y ait une réaction rapide…
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