Le gamer est gras et con.
Difficile de leur en vouloir, tant l’exercice fut réussi. South Park, en parodiant les joueurs de World of Warcraft il y a maintenant de cela plusieurs années avait écrit un de leurs épisodes les plus mémorables et drôles. Les quatre gamins affrontaient un adversaire intouchable qui, sur l’écran inspirait le respect, et hors de celui-ci, la pitié. Car l’homme, dans sa trentaine, gras, mal habillé et au regard vide était à l’antipode de son personnage incarné dans le jeu. Ce « gamer » est vite rentré dans la postérité, et a même fait preuve d’un cosplay mémorable de Jarop Nandin, décédé récemment du COVID, lors de Blizzcon 2013.
Plus qu’un simple épisode, cette image s’est ancrée dans l’imaginaire collectif. Ainsi, l’amateur de jeu vidéo rentrait dans la catégorie « loser » et somme toute pathétique. Bien entendu, la réalité ne pourrait être plus éloignée de ce stéréotype.
A l’image de la team Complexity, l’entraînement aujourd’hui ne se limite plus qu’à la simple pratique du jeu vidéo. Salle de sport, running, alimentation adaptée : tant de composantes qui sont maintenant inhérentes à la vie d’un joueur professionnel. Et qui amène à des résultats sans appel : selon une nouvelle étude publiée récemment dans l’International Journal of Environmental Research and Public Health, les joueurs d’e-sport ont un poids jusqu’à 21% plus sain que la population générale, fument peu et boivent peu d’alcool. Allez faire un tour dans une rue de la soif à 2h du matin un vendredi soir, et posez-vous vraiment la question : ce type-là, qui est en train de vomir dans une poubelle publique, il est vraiment plus sain et malin ?
Le gamer est asocial
Autre cliché tenace, l’idée qu’un amateur de jeux vidéos est un personnage solitaire, presque reclus de la société. Un stéréotype qu’il n’est pas vraiment difficile à comprendre sans même pousser loin sur l’aspect technique. Il est parfois compliqué de concevoir pour les générations plus âgés que, casque sur la tête, le joueur pratique une activité sociale. Pourtant, en discutant sans cesse avec des amis, camarades, ou inconnus, le Gamer s’ouvre au monde de par la pratique du jeu. De nombreuses études prouvent aujourd’hui que cette activité permet d’élargir largement les interactions sociales, offrent des compétences et talents que l’école ne peut enseigner, et commence à être traité comme un médicament pour traiter certains troubles que l’hyperactivité ou encore l’anxiété.
Il est d’ailleurs bon de rappeler que le désaveu d’une pratique nouvelle n’est en aucun cas quelque chose de notre temps. Cela a été ainsi depuis toujours. L’arrivée des chats en ligne tels que MSN ou Caramail a longuement inquiété les parents, alors que tout ceci n’était autre qu’une nouvelle forme de communication. Et, aussi fou que cela puisse paraître, le cinéma et même la littérature ont pu être considéré par le passé comme des activités abrutissantes et freinant l’insertion de ces pratiquants dans la vie sociale. Ainsi, certains parents qui ont pourtant fréquenté les bornes d’arcades et acheté les premières consoles domestiques arrivent à s’inquiéter de cette nouvelle manière de consommer des produits virtuels, sans réussir à prendre le recul nécessaire sur une simple nouvelle manière d’interagir, comme chaque génération invente inlassablement.
Le gamer est abruti par sa pratique
Autre idée préconçue, celle que la pratique assidue de jeux vidéos entraîne un abrutissement global de la personne s’y adonnant. Alors oui. Évidemment que certains poussent un peu trop loin. Pourquoi le nier ? C’est une vérité. Mais n’est ce pas le cas pour l’alcool, la cigarette, les vidéos de chat ou les selfies ? Toute pratique à la consommation potentiellement illimité peut-être poussée à un niveau trop élevé. Et ce n’est pas un exemple parmi des milliers qui se doit de devenir la référence d’une discipline ou loisir. Il faut savoir, encore et toujours, nuancer et rappeler que les histoires les plus extraordinaires sont bien cela : des anecdotes qui sortent d’un ordinaire dans laquelle la pratique est quelque chose de banal, et absolument pas périlleux.
Les jeux vidéos, c’est pour les gosses
Ici, il convient de préciser qu’il pourrait y avoir une forme de gentillesse dans cette idée reçue. L’opinion que, quel que soit son âge, lorsqu’on se retrouve avec un clavier ou une manette en main, on retombe dans une forme d’insouciance que l’on peut associer à l’enfance. Bon, pourquoi pas. Sauf que généralement, cette phrase a plus tendance à vouloir faire dire que la pratique du jeu passé un certain âge montre une personne immature, incapable de vivre dans « sa » réalité. Au-delà du raisonnement profondément débile retrouvé ici (que reste t’il pour les adultes dans ce cas là, si ce n’est la pause clope, la route du vin ou les grands prix de Formule 1 ?), il suffit de regarder aujourd’hui le développement de l’e-sport et les sommes que cela engendre pour bien réaliser que non, définitivement non, ceci n’est pas l’exclusivité des mômes. En matière de staff, structures, recrutement, entraînement, nous sommes clairement sortir d’un monde dominé par des mineurs. Oui, vous pouvez demander à un enfant de le faire. Mais vous pourrez alors aussi vous prendre un procès pour esclavagisme infantile, ce qu’on ne vous souhaite pas vraiment.
Le jeu vidéo est une perte de temps
Le jeu façonne son joueur. A partir du moment où une forme d’implication est donnée par un joueur, il y a inévitablement une assimilation qui en découle. C’est là le propre de la culture et de l’art, dans le sens le plus large du terme. Ainsi, un jeu, au même titre qu’une peinture, un livre ou encore un film va indubitablement avoir une influence sur la personnalité de quelqu’un. Il y a dans toute facette d’art le concept d’apprentissage, fusse t’il culturelle, émotionnelle ou tout simplement sur soi-même. On ne peut aujourd’hui continuer de prétendre que voir un film ou lire un livre est enrichissant quand jouer à la Playstation à un jeu à l’histoire poussée et complexe rentre dans la catégorie de perte de temps. Et, au-delà de cela, il ne faut pas oublier que comme toute activité populaire, le jeu vidéo facilite le processus d’intégration. Ainsi, en s’adonnant à ce que font les autres, on trouve ainsi un moyen de s’insérer dans la société. De la même manière que discuter au bistrot de onze types courant après un ballon est fédérateur et sociable, parler des dernières sorties apporte les mêmes bénéfices.
Les jeux vidéos rendent violents
Ici, il s’agit de nuancer notre réponse. Evidemment qu’à tous ceux qui pensent que la pratique du jeu vidéo peut donner des envies de se faire une tuerie dans un lycée, nous n’avons même pas de réponse à réserver tant cette idée est particulièrement ridicule.
Maintenant, le jeu peut-il créer des montées d’adrénaline, des poussées de colère et un sentiment d’impuissance ou de frustration élevée ? Indéniablement. Mais n’est-ce pas le cas dans tant d’aspects de la vie ? Qui ici n’est jamais rentré encore sous le coup de la colère après une journée de taf merdique ? Ou ne s’est pas énervé lors de la pratique d’un sport et des coups faciles ratés ? Il en faut de la force mentale pour regarder les photos des enfants de Chantal de la compta qui nous montre dix-sept photos de ses bambins par jour. Notre vie est régie de moments, bons comme difficiles, qui influent sur nos émotions et altèrent notre humeur. En quoi cette pratique serait-elle différente ? On se le demande toujours.
Mental Médias SARL
15 Rue Emile Mark
L-4620 Differdange LUXEMBOURG
m : moien@mental.lu