Carlos Fangueiro : « Un bilan extrêmement positif »

12 minutes
Carlos Fangueiro

Le F91, avec un bilan de quatorze victoires en quinze rencontres a atteint la trêve avec le statut honorifique de champion d’automne. Un premier succès pour Carlos Fangueiro, toujours focalisé sur un deuxième titre d’affilée. L’entraîneur lusitanien est passé dans nos locaux, pour une longue interview, afin de faire le bilan de la première partie de saison. Entretien fleuve.

Quel bilan tirer de cette première partie de saison ?

Un bilan extrêmement positif, évidemment. On termine premier, même si l’on sait que ce qui compte vraiment, c’est avoir cette place à la fin de la saison. Je suis très heureux avec l’intégralité du cadre, que cela soit les joueurs, le staff ou le comité. Sur le plan du groupe, certains joueurs ont peut-être eu quelques difficultés à s’adapter au départ, mais aujourd’hui, ils sont pleinement épanouis, apportent énormément et sont titulaires. On sent aussi le conseil d’administration derrière tout le monde, les sponsors qui sont présents, c’est vraiment tout un ensemble extrêmement positif.

Dans ce splendide bilan comptable, il y a une défaite, qui fait forcément tâche, face au Swift. Comment est-ce qu’à posteriori vous expliquez cette défaite ?

C’est un accident de parcours. Avant tout, il faut absolument valoriser la performance d’Hesperange, qui a été excellent ce soir-là. Mais je connais mes joueurs. La semaine de préparation avant la rencontre, je vous assure que c’était magnifique. Pour être honnête, j’avais presque peur de voir une blessure à l’entraînement, tant il y avait de l’intensité et de l’engagement ! C’est pour cela que le jour du match, j’ai été surpris. On n’était pas organisé, en particulier défensivement, on n’avait pas l’agressivité nécessaire pour un tel choc. Nous n’étions pas présents sur les seconds ballons, ce qui est un de nos points forts. On était loin des conditions dans lesquelles j’ai l’habitude de voir mon équipe. Mais encore une fois, je tiens à rappeler l’excellent match de notre adversaire.

« je ne pouvais pas montrer ma douleur, mais je peux vous assurer que personnellement, cela m’a pris au moins une semaine pour me remettre de cette défaite… »

À propos de la défaite 0-4 contre Hesperange

On peut donc parler de surprise de vôtre côté vis-à-vis de ce non-match ?

Oui, tout à fait. Le jour J a été une surprise. J’ai l’habitude de voir mon équipe toujours répondre présent, être organisée, agressive sur le terrain, et là, c’était tout le contraire. Mais c’est aussi ce qui me fait dire avec certitude que c’était un accident de parcours. Le plus important, après cette défaite, c’était de rebondir et se focaliser sur le positif. Mais c’était dur ! En tant que leader de groupe, je ne pouvais pas montrer ma douleur, mais je peux vous assurer que personnellement, cela m’a pris au moins une semaine pour me remettre de cette défaite. C’était un adversaire direct dans notre lutte pour le titre, mais on a réussi à vite rebondir…

Précisément, qu’est-ce que vous passez comme message à votre groupe après cette défaite ?

On a d’abord assumé que c’était un accident de parcours, tout simplement. Et on a bien rappelé que cette défaite ne remettait pas en cause tout le début de saison. Si on reprend les compétitions européennes, la qualité de jeu, les onze victoires consécutives en championnat, des belles performances… Il fallait vraiment axer sur la positivité et continuer à réfléchir dans une ambiance agréable. Ce qui était très important pour moi, c’était de préparer des exercices à l’entraînement qui donnent le maximum de plaisir. Il fallait retrouver les rires, pour ne pas rester dans la tristesse.

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Derrière, vous allez chercher une victoire sur le buzzer contre Mondercange dans un match un peu fou. À quel point ce but a-t-il été précieux selon vous, pour reprendre tout de suite une dynamique de victoires ?

Extrêmement précieux. Le groupe était forcément encore touché par la défaite contre Hesperange, et même si j’estime qu’on avait fait du bon boulot, forcément, cela trottait encore dans la tête. Et se déplacer à Mondercange, une équipe qui à ce moment là était en haut du classement, sur un terrain difficile à jouer, ça n’était pas simple… Mais cette victoire a prouvé que mentalement, le groupe répondait toujours présent. Et c’est ce genre de succès à l’arraché qui renforce encore l’état d’esprit, la cohésion collective. Gagner dans le sacrifice et la douleur, c’est toujours précieux.

« Cela fait un an que le groupe ne s’est pas relâché, tant sur le plan mental que physique (…). On a besoin de ce break »

Est-ce que la trêve arrive à point nommé ? Les organismes étaient-ils à bout, tout en prenant en compte les matchs européens ?

Absolument. Cet été, à titre personnel, je n’ai pas eu de vacances. On avait perdu cinq titulaires, et les remplacer était très compliqué. Je devais trouver les bons profils pour continuer dans cette dynamique de succès. Mais avec le peu de temps disponible, certains joueurs sont arrivés deux jours avant le début de la campagne de Ligue des Champions, et d’autres deux jours avant les matchs d’Europa League… Déjà là dessus, cela crée une énorme forme de pression. Et pour les membres de l’effectif qui étaient déjà présents l’an dernier, ils ont eu une semaine et demie de vacances… C’est tellement peu. Cela fait un an que le groupe ne s’est pas relâché, tant sur le plan mental que physique. C’est pour cela que par exemple, ces dernières quatre-cinq semaines, on est passé de cinq à quatre séances, car je sentais que la fatigue émotionnelle des joueurs prenait le dessus. On a besoin de ce break, après avoir très bien géré tout cet enchaînement.

On voit, un peu comme l’an dernier en deuxième partie de saison, des groupes de plus en plus bas face à vous… Y a t-il une solution face à cela ? Cela implique t-il une approche différente ?

Sincèrement, c’est très difficile. Déjà, de base, on sait que jouer le F91 est extrêmement motivant pour nos adversaires. Après, contre des équipes comme Rosport qui ont joué tellement bas, avec une ligne de cinq défenseurs, suivi d’une autre de quatre quasiment collée… C’est extrêmement difficile de trouver des espaces. Cette année, on a la chance d’affronter des adversaires qui ont joué le Swift la rencontre d’avant. Cela nous permet d’analyser les matchs. Contre Rosport, on a demandé aux joueurs de faire preuve d’énormément de patience, de beaucoup faire circuler le ballon avec peu de touches de balles, et des passes fortes, pour essayer de déstabiliser le bloc adverse. On était dynamique, mais cela demeurait compliqué. Sur les dix dernières minutes, un ajustement tactique effectué nous a permis de déstabiliser l’adversaire, et c’est passé. Mais cela n’est pas simple.

Comme vous avez dit, vos adversaires cette saison ont la particularité d’avoir affronté le Swift la journée précédente. À quel point ce hasard du calendrier joue t-il en votre faveur ?

Je ne m’en cache pas, c’est un vrai avantage. Hesperange est une équipe qui joue le titre, et pouvoir analyser notre prochain adversaire face à un effectif similaire au notre est une aide. Cela nous permet d’essayer de trouver une stratégie pour faire mal.

Avec ce mano à mano contre le Swift, pensez-vous que, peut-être, leurs excellents résultats expliquent aussi votre bilan ?  Si personne ne suivait le rythme, la motivation aurait-elle été possible à conserver ?

Je comprends parfaitement qu’il y ait ce raisonnement, mais je ne suis pas d’accord. Je connais ma méthode, je connais mes joueurs, et je connais mes exigences. Aujourd’hui, dans ce championnat, il y a deux équipes qui luttent pour le titre, et un autre bloc plus en retard. Il y a un écart sur le bilan comptable conséquent. Les années passées, à la trêve, il y avait encore cinq ou six équipes qui pouvaient se frotter à la course au titre. Mais ce que je remarque avec mon équipe, c’est que quel que soit l’adversaire, nous offrons la même partition. Mes joueurs, de par l’exigence du staff, doivent maintenir le même niveau d’intensité. On n’a pas le droit d’être trop en sur confiance, on n’a pas le droit de lever le pied. Ce que je vois, c’est que contre les petites équipes, on ne perd que très peu de points. Cela a toujours été le cas, et on n’a pas eu besoin de la très belle saison d’Hesperange pour que cela soit le cas. Un titre, cela se gagne sur ces « petits » matchs, sur la capacité à faire le boulot dans les rencontres où l’on est favori.

Ce championnat à deux vitesses précisément, le voyez-vous comme inquiétant sur le niveau de la BGL Ligue ?

Je ne suis pas inquiet vis-à-vis de cela, mais honnêtement, je suis étonné. Avant le début de saison, on avait vu des équipes qui ont fait de très gros investissements, comme le Racing, le Progrès ou Differdange. Et le FCD03 par exemple a dit, par le biais de son président, vouloir faire mieux que la saison passée. Sachant qu’il avait fini deuxième l’an passé, le message était au final assez clair. Et il y a eu un investissement fait dans ce sens. Donc oui, je suis étonné par ce très grand écart. J’espère sincèrement que celui-ci va continuer sur la deuxième partie de saison (rires) ! Mais je m’attendais à beaucoup plus de compétitivité entre les clubs, sincèrement. Ce que l’on constate – et je reviens sur l’importance de tous les matchs – c’est que toutes ces équipes ont perdu énormément de points dans des rencontres accessibles. C’est là que se fait la différence, en particulier dans un championnat où tout le monde a une chance contre tout le monde.

Peut-on envisager de voir Dudelange actif sur le marché des transferts, que cela soit dans le sens des départs ou des arrivées ?

Avant tout, je suis extrêmement content et fier de mon cadre. Et je parle là des plus vieux aux jeunes de 17 ans. Maintenant, on sait qu’on a perdu un défenseur central en début de saison (ndlr : Manuel Da Costa). À partir de là, on serait très intéressé à l’idée de recruter à ce poste. En l’état, si Jules Diouf, Vincent Decker ou Aldin Skenderovic se blessent, c’est compliqué. Après, le dernier match à Wiltz, nous avons dû jouer avec Edis Agovic en défense centrale, et il a fait un match formidable. Cela m’a permis de ne pas changer de système, ce qui est forcément plus simple. Mais en l’état, oui, un défenseur supplémentaire serait très intéressant. Nous avons une piste, et on espère que celle-ci va se concrétiser.

On sait que la trêve est particulière au Luxembourg, avec une longue pause. Est-ce que selon vous, ça n’est pas précisément trop long ?

C’est beaucoup trop long. Mais après, il faut être honnête, la météo ne le permet pas. Regardez, on vient de terminer la première partie de championnat, mais si on avait dû jouer une semaine de plus, avec le temps que l’on a aujourd’hui, cela aurait été extrêmement compliqué. Tous les terrains, y compris les synthétiques, c’est comme du béton… Donc c’est difficile. Si on pouvait avoir une manière de gérer en continuant tant que la météo nous le permet, cela serait très bien, mais ça me semble extrêmement compliqué à mettre en place… 

Quel est le programme pour la reprise ?

On reprend avec le groupe le 09 janvier, avant de partir en stage au Portugal, à Algarve, du 23 au 29. 

Allez-vous encore vous confronter à des gros adversaires lors de matchs amicaux ?

La saison passée, on s’est retrouvé sur place avec de très grands clubs. On les a contacté pour faire des matchs, et ils ont accepté. On devrait normalement repartir sur ce format cette saison.

C’est une plus-value, selon vous, de se confronter à des grosses écuries ?

Oui, c’est motivant. Jouer le CSKA Moscou, qui a six internationaux russes au sein de l’équipe, c’est quand même quelque chose. En plus, on a gagné 1-0, donc ça donne un vrai boost de confiance, quand bien même le résultat n’est pas le plus important dans un amical.

On dit souvent qu’on commence un nouveau championnat après la trêve, avec des changements de dynamique, mais aussi des terrains des fois plus que limites… Est-ce que vous êtes dans cet état d’esprit « c’est un nouveau championnat qui commence »?

Oui, tout de même. J’ai vécu cela avec Pétange. On a terminé champion d’automne, et à la reprise, j’avais quatre titulaires, qui plus est première licence, qui étaient blessés. Il faut alors trouver des solutions, ce qui est très compliqué, et, alors que j’aime avoir des équipes joueuses, on peut parfois se retrouver sur des terrains qui ressemblent plus à des champs de patates… Donc il faut s’adapter. Avec Dudelange, l’an passé par exemple, on a anticipé deux scénarios. Un premier dans lequel la qualité de la pelouse nous permettait de développer notre football. Et un second, adapté en cas de terrain en mauvaise qualité. Cela sera sûrement encore la même chose cette saison.

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