Après deux nuits passées tellement proches d’être magiques pour le football luxembourgeois, voici venue l’heure du lendemain matin. De la gueule de bois qui succède à une ivresse qui au final, n’a pas apporté grand chose. Alors, tandis que nous nous ruons vers le doliprane pour soigner les maux de fins de nuits cauchemardesques, quel bilan tirer de ces trois matchs qui ont vu les clubs luxembourgeois passer si proches, avant de disparaître dans l’oubli, le temps d’une longue année ?
Les sentiments sont multiples. Avant tout, il y a la fierté. La fierté d’avoir vu le Progrès et Differdange, aux budgets tellement inférieurs à ceux de leurs adversaires, faire douter jusque dans les derniers instants Maribor et Midtjylland, qui ne s’imaginaient sûrement pas devoir batailler si férocement contre ces petits clubs venus d’un pays pratiquement inexistant sur l’échelon du football continental. Absolument héroïques, les hommes de Jeff Strasser et Pedro Resende ont absolument tout laissé sur le terrain, terminant exténués, et on l’imagine malheureusement, fini brisés d’être passés si proche pour au final rentrer bredouilles…
Pour Dudelange, le niveau de son vis-à-vis ne lui permet pas de boxer dans la même catégorie, tant Gzira United paraissait d’une faiblesse abyssale. On ne peut encore aujourd’hui comprendre comment le F91 a pu échouer face à une opposition si bancale. Ou plutôt si : en vendangeant un nombre incalculable d’opportunités, le club de la Forge du sud a laissé en vie un adversaire qui aurait du être K.O bien plus tôt, sans même imaginer pouvoir s’en sortir dans le money-time. Protégé par son statut de tête de série au premier tour, Dudelange aurait du continuer l’aventure lors de ce second round, et ne peut s’en vouloir qu’à lui-même de n’avoir pas concrétiser une supériorité tant sur le papier que sur le terrain.
Mais quand bien même l’adversaire était différent, le scénario final, cruel, n’en reste pas moins le même. La folie, le dépassement de soi, la sensation que l’histoire est en train de se faire, avant de se faire rattraper, dans les dernières minutes d’une seconde mi-temps ou, pire encore, en fin de prolongations. Alors, comment expliquer ces déroulements si identiques dans leur évolution ?
Le manque de chance ? On pourrait se laisser aller à ce niveau de facilité, mais cela nous parait bien commode. Alors quoi ? Le manque d’expérience ? Il y a sûrement de cela, tant ces fins de matchs doivent être durs à gérer sur le plan émotionnel, entre le désir inconscient de vouloir plier la rencontre, et la peur de voir d’une seconde à l’autre tout l’édifice rompre. Il faut en avoir joué des matchs aussi couperets, pour réussir à contrôler tout ce ce qui passe dans la tête. Des difficultés physiques ? À voir les joueurs du Progrès ou Differdange, proches de la rupture physique face à des adversaires qui continuaient de gambader de plus belle, on peut se dire, qu’aussi, cela fait partie de cette équation si complexe à résoudre.
Mais pourtant, revivre ce scénario, trois matchs d’affilée durant, donne un profond sentiment d’abattement. Voire même de désarroi quand on repense au FCD03 qui, l’an dernier contre Ljubjana, était éliminé dans un scénario dramatiquement identique à celui de cette saison contre Maribor, quelques buts en moins. La sensation qu’un plafond de verre demeure, impossible à casser en mille morceaux, reste donc bien palpable et est la raison de cette profonde mélancolie qui nous habite tous aujourd’hui.
Et, si nous pouvons nous permettre, le désarroi se trouve aussi dans, inlassablement, la présence médiatique. Car c’est avec un sentiment de colère que l’on assiste, année après année, à une absence d’intérêt des médias mainstream pour ce qui constitue comme le temps fort de l’année pour le football luxembourgeois. Aucune retransmission télé, aucune première page, aucun engouement de la presse et du public plus large… La capacité à créer l’exploit et grandir est en corrélation totale avec le sentiment de faire partie de quelque chose plus grand, et de la responsabilité de ne pas décevoir seulement les fans habituels, mais bien plus tout un pays qui tire de la fierté de ces résultats. À l’échelle du Luxembourg, affronter des équipes comme Maribor ou Midtjylland, avec dans un coin de l’oeil une possible affiche contre Fenerbahce est notre version d’un quart de finale de Ligue des Champions. Et soit, ce n’est pas si élevé comme référence. Mais voilà la barre où nous nous situons. Acceptons-là, et au lieu de la tourner en dérision, soyons en fiers et donnons lui l’attention qu’elle mérite pour grandir et atteindre des échelons plus élevés.
Reste, évidemment dans ce marasme le Swift. Qualifié au troisième tour, Hesperange est la dernière chance de voir un club luxembourgeois en poule d’une compétition continentale courant septembre. Opposés à Struga jeudi prochain, les hommes de Carlos Fangueiro peuvent encore faire rayonner le pays à l’échelle internationale. Il est donc temps de faire front, promulguer l’union sacrée, et les soutenir à l’échelle de ce qu’il mérite, faisant vi des rivalités, pour s’offrir une chance d’élever un peu plus ce football luxembourgeois qui, en interne, le désire tant. C’est bien là le seul moyen de sortir de ces fameuses phrases qu’on entend chaque année : « c’est dommage, car ils ont bien joué… »
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