12 ans après, l’Espagne règne à nouveau sur l’Europe du football, après leur victoire 2-1 face à l’Angleterre hier soir. Un succès mérité, qui permet aussi de se dire que le football protagoniste et fondé sur un véritable collectif permet encore de gagner des tournois majeurs.
Le sacre d’un collectif. À travers cet Euro 2024, les Espagnols auront maitrisé leur compétition de bout en bout, grâce à une force collective qui en a fait l’équipe la plus agréable à suivre du tournoi. Mais depuis plusieurs compétitions, l’équipe la plus plaisante à voir évoluer n’était pas forcément celle qui finissait par soulever le trophée. Des considérations bien futiles pour certains, pour qui seul le résultat final semble primer. Mais pour bons nombres d’amateurs de ballon rond, pour lesquels il est parfois de plus en plus difficile de prendre du plaisir devant leur écran, les techniciens et autres esthètes ayant petit à petit laissé place à une créativité plus restreinte et un football plus athlétique et « robotisé », cela à son importance, et permet de renforcer un paradigme, parfois oublié ou même méprisé : le football est avant tout un jeu censé procurer du plaisir aux gens qui le suivent.
L’Espagne renoue donc avec son glorieux passé, 12 ans après son dernier titre remporté contre l’Italie (4-0) avec la génération dorée que l’on connait. Mais contrairement à ces derniers titres, peu de noms ronflants composaient l’effectif ibérique, la plupart des joueurs évoluant en Espagne dans des clubs ne faisant pas partie des deux mastodontes du football national.
Cette victoire est donc avant tout celle d’un collectif, mis en place par Luis De la Fuente, critiqué par nombres d’observateurs au pays avant la compétition, pour ces choix d’avoir laissé certains cadres sur le carreau, et d’avoir donné le leadership à d’autres ne faisant pas forcément l’unanimité. Le football proposé par la Roja durant cette compétition aura été un mélange parfait de ce qui fait la singularité de son ADN, à savoir le jeu de possession, et de modernité à travers des phases de jeu beaucoup plus verticales, caractérisées par deux ailiers déboussolants que sont Nico Williams et Lamine Yamal. Le tout combiné à un Dani Olmo qui aura su endosser le costume de parfait remplaçant au moment de suppléer Pedri, blessé, et vous obtenez un cocktail explosif et sans faute de goût.
Il est forcément symbolique que le sacre soit offert sur un mouvement collectif splendide et si caractéristique de ce qu’est l’Espagne aujourd’hui : une équipe élégante et belle à voir évoluer.
Un parfait mix qui aura permis de terminer l’Euro avec sept victoires en autant de rencontres, une première dans l’histoire de la compétition.
Quand vient le moment de faire la liste des victimes, le constat est édifiant :
Croatie (1/2 finaliste du dernier mondial), Italie (tenante du titre), Albanie, Géorgie, Allemagne (pays hôte), France (finaliste du dernier mondial) et enfin Angleterre (finaliste du dernier Euro). Autant de nations prestigieuses, avec les trois principaux favoris du tournoi au début de la compétition, passées par la lessiveuse espagnole, qui n’auront pu que constater les dégâts une fois la rencontre terminée.
Ce succès doit permettre aux grandes nations de ce sport de prendre conscience d’une chose : il est toujours plus facile de justifier un échec, parfois relatif, quand ce dernier survient après avoir donné l’impression de prendre son destin en main. Ce n’est pas un hasard si les équipes les plus agréables à suivre durant ce mois de compétition, hormis l’Espagne, ont été des équipes du chapeau 2, voire du chapeau 3 européen. Ces dernières n’avaient pas grand-chose à perdre, et se sont donc jetées à corps perdu dans cet Euro, avec pour ambition de prendre du plaisir avant tout. Les équipes qui prennent du plaisir à évoluer ensemble en donnent souvent en retour aux spectateurs. La Turquie, la Géorgie ou encore la Suisse sont tant d’exemples qui confirment cette hypothèse, et qui pourront sûrement beaucoup plus construire pour l’avenir de leur sélection respective suite à ce tournoi, que des nations comme la France, le Portugal ou encore l’Angleterre, ayant pourtant réalisé un meilleur parcours d’un point de vue « comptable ».
L’Espagne sort donc couronnée d’un Euro morose, où la plupart des favoris n’auront pas su prendre leur destin en main, préférant ne pas perdre, plutôt que de gagner. La Roja, moins bien dotée que d’autres, aura su saisir sa chance et n’aura surtout jamais dévié de ce qu’étaient ses croyances lors de ce tournoi, malgré le parcours semé d’embuches. C’est ce qui fait l’apanage des grandes équipes, celles que l’on retient au-delà du résultat.
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