Presque un an après le début de la pandémie de Covid-19, il est toujours compliqué de voir le bout du tunnel. Et ce qui est vrai pour de grandes fédérations sportives comme le football, l’est encore plus pour des sports dont l’exposition médiatique est beaucoup moindre, comme les darts. Pourtant, ils sont de plus en plus nombreux au pays à avoir fait de cette activité, auparavant considérée comme un hobby, un sport à part entière. Avec presque 300 licenciés, les darts (« fléchettes » dans la langue de Molière) connaissent depuis quelques années un nouvel engouement, malheureusement freiné par la crise sanitaire et ses conséquences.
C’est donc au beau milieu d’une période délicate à gérer pour la FLD (créée en 1984) que deux de ses principaux acteurs ont accepté notre invitation. Rendez-vous est pris à Schouweiler, au Stade Roger Winandy, ancien footballeur de renom et père de Christophe, directeur de la presse auprès de la fédération de darts. L’accueil est chaleureux malgré les températures glaçantes qui règnent en ce mois de février au Grand-Duché. Les deux cibles installées au fond de la buvette du club nous rappellent que le ballon rond n’est pas le seul sport pratiqué en ces lieux.
Avec un championnat définitivement arrêté, et dont la reprise est hypothétique, une lueur d’espoir pourrait revenir si les cafés du pays avaient l’autorisation de rouvrir, mais nous en sommes loin, comme l’explique Tom Becker : « En ce moment, tout est arrêté en raison de la pandémie. La plupart des clubs jouent dans des cafés, et comme tout est fermé, on ne peut plus s’entraîner ni faire de compétitions. » Un sondage a été effectué par la FLD auprès des 18 clubs du pays pour connaître leur avis sur la suite à donner aux compétitions de la saison 2020/21 : « Les premières réponses sont tombées, sept ou huit clubs ont répondu, et on voit une tendance qui s’orienterait vers l’annulation du championnat, complète Christophe Winandy. Une tendance confirmée quelques jours après notre reportage, avec l’annonce par la FLD de l’annulation totale de la saison 20/21, après que 13 clubs sur les 18 du pays se soient prononcés en faveur de l’arrêt des compétitions.
Situation « très délicate »
Autre événement annuel organisé par la FLD, l’Open du Luxembourg, qui a lieu normalement le dernier week-end de juillet. Déjà annulé en 2020, le principal rassemblement organisé au pays en matière de darts va également faire défaut en 2021, un crève-cœur évidemment pour la fédération : « On a déjà pris la décision d’annuler, car on ne sait pas ce qu’il va se passer en juillet. La salle prévue pour ce tournoi, c’est la Halle Victor Hugo à Luxembourg, et pour l’instant, il y a là-bas un centre de vaccination. Il y a deux ans, on avait réussi à faire venir 500 joueurs de toute l’Europe, et actuellement on n’a aucune garantie », regrette Christophe Winandy.
Cette double annulation du Luxembourg Open va également porter un coup au portefeuille de la FLD. Privée de sa principale source de revenus, la fédération va être probablement contrainte de se serrer la ceinture : « Au niveau sponsor, c’est très difficile, car nous sommes une petite fédération. On organise aussi normalement la Coupe du Luxembourg, avec laquelle on fait une petite recette grâce à la vente de sandwiches et de boissons, et également sur les inscriptions des clubs et les licences. Car pour envoyer l’équipe nationale comme on l’a fait à Cluj en 2019, lors de la World Cup, chaque joueur a dû payer de sa poche… On était sur un bon chemin, mais le confinement nous a stoppés… », regrette le responsable presse de la fédération. Un coup de frein donc pour la FLD, qui était pourtant parvenue au fil des années à tisser des liens durables avec des partenaires importants : « On voulait faire quelque chose de beau, de grand, en 2020 c’était pas le cas et en 2021 ce ne sera pas le cas non plus… », résume Christophe Winandy.
À défaut de pouvoir en ce moment pratiquer leur sport comme ils l’entendent, Tom et Christophe demeurent tout de même intarissables à son sujet. Poids des fléchettes, joueurs en vogue, techniques de lancer, tous les aspects du jeu sont décortiqués par ces deux passionnés. Mais au final, quelles sont les qualités qui sont nécessaires pour devenir un bon joueur de darts ? « C’est un sport qui est basé à 80% sur l’entraînement et 20% sur le mental, c’est ce que disent les bons joueurs, explique Tom Becker. Si on joue contre un adversaire, il y a de la pression, et beaucoup de joueurs n’arrivent pas à gérer cela. On voit depuis ces dernières années que les meilleurs joueurs font appel à des préparateurs mentaux. C’est vraiment très important quand on joue sous pression. »
Mais au Luxembourg, qui est actuellement considéré comme le numéro un des darts ? « Il y a Tom Berger qui a obtenu de super résultats, même en doublette également. Notamment en Pologne, où il a gagné le tournoi avec Tom Burquel en double. Tom Burquel a également participé deux fois d’affilée aux quarts de finale de l’Open de France, un tournoi où 500 à 600 joueurs participent. Jim Mayer est le champion luxembourgeois en titre depuis deux ans, comme on n’a pas rejoué le titre (rires). » Des événements importants pour les fans de fléchettes, et même si le sport trouve ses racines du côté de la Grande-Bretagne, c’est maintenant plus près de chez nous, aux Pays-Bas, que les rassemblements de joueurs de darts ont la cote : « Ces deux pays sont dominants, mais les Gallois sont champions du monde en équipe. »
La tentation du « online »
Comme de nombreux autres sports, à l’instar du football ou de la Formule 1, les versions online de la pratique des darts connaissent un essor non négligeable du fait des restrictions sanitaires, comme l’explique Christophe Winandy : « Ce qui est génial, c’est qu’il y a un groupe qui s’est créé il y a un mois sur Facebook et qui s’appelle ‘Online Darts Luxembourg’, et ça permet de jouer et de s’entraîner. C’est un joueur qui ne fait pas partie d’un club ni de la fédération qui a lancé cela, et ils organisent les vendredis soir et les samedis après-midi des tournois online, avec une caméra placée sur la cible. Mais je suppose qu’il y a beaucoup de gens au Luxembourg qui ont une cible qui traîne quelque part à la cave et qui vont trouver l’envie de jouer. » Un phénomène virtuel qui pourrait sans doute perdurer dans la réalité lorsque les cafés et bars du pays auront l’autorisation de procéder à la réouverture.
Du moins, les cafés qui auront encaissé les énormes conséquences sur le plan financier de plusieurs mois de fermeture… : « C’est très difficile. On ne sait pas si tous les cafés ou les clubs vont rouvrir après le confinement. Peut-être que l’un ou l’autre vont fermer définitivement », craint Christophe Winandy. La FLD attend donc avec impatience la réouverture du secteur horeca, duquel elle dépend fortement, afin de pouvoir retrouver un fonctionnement normal.
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