Dan Huet : « Wiltz sera toujours mon club de coeur»

Mi-octobre, Dan Huet quittait son poste d’entraîneur du FC Wiltz, son club de toujours, après cinq très belles années. Un départ qui a pu surprendre et que le jeune entraîneur explique aujourd’hui dans nos colonnes, tout en parlant de l’actualité du moment, et ses objectifs pour le futur. Entretien fleuve.

Comment allez-vous depuis votre départ du FC Wiltz ?

Ça va très bien. Je trouve du temps pour beaucoup de choses que je n’ai pas pu faire pour le passé, comme profiter de ma famille, de passe-temps, ou tout simplement de temps libre, qui était très rare vis-à-vis des obligations d’un entraîneur de BGL Ligue. Ca me réjouit et me permet de retrouver de l’énergie, ce qui est vraiment l’essentiel.

Avez-vous continué de suivre les résultats du club, voire de la BGL Ligue en général, ou en avez-vous profité pour décrocher ?

Les deux, trois premières semaines, on peut parler de décompression totale. Je n’ai pas même regardé de rencontres, ou suivi ce qui se passait à gauche ou à droite. J’ai vraiment lâché. Après, j’ai quand même recommencé à suivre les matchs, soit devant la TV, soit tout simplement au stade. Cela me permettait aussi de retrouver beaucoup de connaissances, d’anciens compagnons qui m’ont suivi et avec lesquels on a travaillé pendant des années. C’est toujours très agréable de les voir, les croiser, de parler de ce qui a été, voire de ce qui va venir. C’est important de maintenir ces contacts, tout comme il est important, lorsque je retourne à Wiltz d’être dans une spirale positive et une atmosphère saine.

Si on peut revenir sur votre départ… c’est vous qui avez pris cette décision, pourquoi ?

À vrai dire, le bon moment aurait été à la fin de cette saison-ci. J’avais confié à notre président en début de saison, après la préparation estivale qu’on avait déjà réussi à changer beaucoup de choses et atteindre beaucoup des objectifs que nous nous étions fixés. Dans ma tête, il fallait après cette saison une nouvelle personne pour guider tout le monde, et entamer un nouveau cycle. Cinq années et demi, c’est déjà énorme pour un entraîneur dans le football d’aujourd’hui. Mais certains faits ont accéléré les choses lors de la saison. Je ne dirais pas que c’était les résultats, car on n’était pas encore trop mal placé, et on savait que la deuxième année allait être plus compliqué que la première. Mais il y avait pas mal de tensions dans le groupe. Beaucoup de joueurs pensaient performer plus haut que la réalité, ce qui a perturbé l’équilibre et l’harmonie du groupe. Aussi, les renforts n’étaient pas réellement des renforts et n’ont pas réellement apporté ce dont on avait besoin. Enfin, après un certain nombre d’années, sur le plan relationnel, on se connait trop, et peut-être que la parole de l’entraîneur perd en importance. Et donc, après une période où je sentais déjà une certaine fatigue globale, une défaite lourde (ndlr : 5-1 sur le terrain de Rosport), m’a fait me dire que c’était le bon moment pour débuter un nouveau cycle, sans moi.

Vous pensez avoir réussi à amener ce groupe aussi loin que possible ?

En tant qu’entraîneur, on n’est jamais réellement satisfait. Si 99% des objectifs sont réussis, on va faire une focalisation sur le 1% manquant. Si on m’avait fait un peu plus confiance cette année, que cela soit au niveau des joueurs mais aussi ailleurs, je pense qu’on aurait pu faire encore une bien belle année. Peut-être pas meilleure que l’an passé, mais très solide. Cela aurait permis de partir par la grande porte, ce qui n’a au final pas été vraiment le cas… Mais je n’ai pas de regrets, il était l’heure pour moi d’arrêter l’aventure. Le club et moi avions besoin de ce changement.

On sent que malgré presque six années de réussite, vous ne vous êtes pas accrochés à votre poste…

Oui, en effet. Beaucoup de gens pensaient que j’étais dans mon petit fauteuil, presqu’intouchable. Mais je sais bien que dans le monde du football, rester une décennie dans un club, c’est de l’ordre de l’exception. Et je ne suis pas sûr que rester si longtemps soit une bonne idée, d’ailleurs. Il faut quand même rappeler que j’ai été à Wiltz toute ma vie. De mon enfance au monde seniors, j’ai toujours été lié à ce club. J’avais donc un réel attachement qui me permettait aussi d’avoir la lucidité de savoir quand le moment était venu, et de mettre en priorité le club avant tout. On a fait cinq superbes années, et il aurait été réellement dommage de gâcher tout ça en restant trop longtemps. Quitter le club dans une situation où il était en difficulté, non… Il ne fallait pas détruire ces cinq très belles saisons, cela aurait donné un très mauvais goût à ce changement. Wiltz sera toujours mon club de coeur, et il fallait tout faire pour que la séparation se fasse dans les meilleurs termes possibles.

Beaucoup d’entraîneurs parlent d’un métier épuisant, éreintant, stressant au possible mais que paradoxalement, on est impatient de retrouver lorsqu’on est à l’arrêt. Est-ce un sentiment que vous partagez ?

Passé les premières semaines, oui, il y a une part de vérité là-dedans. Cela faisait quinze ans que j’étais entraîneur, avec seulement quelques semaines de repos en été. Je n’avais jamais réellement eu de temps libre, et vécu comme en ce moment, avec trois mois sans football. Pas d’appels, pas de préparations, rien. C’est forcément très nouveau. Ma femme sait bien qu’un jour, je vais retourner sur un banc. Elle en est parfaitement consciente. Pour moi, c’est encore un peu trop tôt, mais personne ne sait ce qui peut arriver dans le futur. Cela dépendra du défi, du projet, de la solidité de l’offre. Je ne veux pas revenir pour revenir. Je vais prendre le temps nécessaire, pour chercher, attendre, et avoir un défi sur lequel je peux me dire « Ca, c’est cohérent, et je m’identifie la-dedans totalement ».

Est-ce qu’au moment où on sort de BGL Ligue, on « disparait » ? Ou peut-on parler de réelles amitiés qui perdurent ?

Il y a deux paires de chaussures différentes. Des amitiés dans le monde du football, c’est très rare. J’en ai toujours été conscient, donc il n’y a pas eu de mauvaise surprise. Évidemment, certains contacts n’existent plus vraiment, mais on ne peut pas parler d’amitiés. Je suis encore en contact avec beaucoup de joueurs de mon ancien club. On a respecté le travail l’un de l’autre. Mais oui, en effet, le football est un monde de requins. Chacun lorgne la place de l’autre, il faut savoir composer avec. Mais je ne recherche pas l’amitié : je recherche le respect, et aussi le mérite. Cela, personne ne peut te le prendre. Ce qu'on a fait avec le FC Witz, cela restera dans la mémoire de beaucoup de supporters, et c’est clairement ce qui compte le plus.

Comment jugez-vous l’évolution du football luxembourgeois depuis vos débuts sur le banc ?

La progression est évidente. D’année en année, le niveau s’améliore. La BGL Ligue devient plus forte et plus équilibrée chaque saison. On retrouve aussi beaucoup plus de professionnalisme dans tous les clubs. Cela n’est pas toujours visible à première vue ou pour le supporter lambda, mais quand on est à l’intérieur de tout cela, on voit réellement qu’un travail est fait, et pas que sur le terrain. Et tout ce boulot fait beaucoup de bien au football luxembourgeois, pour élever le niveau du tout.

Un championnat à seize équipes vous parait-il adéquat ?

Je serai toujours du côté des petits clubs, de par mon historique. J'ai débuté au sein d'une équipe modeste, qui n’aurait peut-être pas pu monter en BGL Ligue s’il n’y avait pas seize places. On a montré que si on nous en laissait l’opportunité, nous étions capables de faire de grandes choses. C’est vrai que cette année, on a deux équipes, Hamm et Rodange qui sont en grande souffrance. Cela va vite à se dire en analysant le classement « quatorze équipes, ça serait mieux ». Mais il faut aussi penser au nombre de matchs : à 14, on se retrouve à 26 matchs, ce qui est peu… Faut-il rajouter des play-offs alors ? Cela change beaucoup de choses. Enfin, si on analyse les dernières années, les équipes du bas de classement sont capables de gêner voire plus les favoris du championnat, et poser de réels soucis. C’est quelque chose qui à mes yeux est important. Tout le monde peut bousculer tout le monde.

Que peut-on vous souhaiter de meilleur pour la suite ?

Ces temps-ci, avant tout, la santé… C’est une période compliquée, et éviter la maladie devrait être la priorité pour tout le monde. Sans la santé, rien ne va… J’espère aussi que le football luxembourgeois va continuer d’avancer sur cette même cadence, et on devrait se retrouver sur un terrain dans le futur. Je ne peux pas vous dire encore où, ni à quel poste, mais cela arrivera un jour.

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