Commençons par revenir aux origines du projet, nous sommes en août 2014 et c’est en pleine Gamescom que le génial Hideo Kojima frappe un grand coup en proposant un teaser jouable répondant au nom de P.T (Playable Teaser). Enfermé dans un appartement et confronté à des événements surnaturels bien flippants, nous faisons notre possible en inspectant les différentes pièces pour déclencher des séquences grâce à nos interactions avec le décor. Une fois libéré – non sans mal – de cette expérience aussi unique que flippante, le titre Silent Hills apparaît devant nous et avec lui la promesse du retour en fanfare de cette ancienne gloire du survival horror grâce à la prometteuse collaboration entre Kojima, Guillermo Del Toro et Norman Reedus.
Avril 2015 et alors que le succès est au rendez-vous pour ce coup de génie marketing, le projet est annulé dans l’incompréhension la plus totale par Konami propriétaire des droits de cette licence au point mort depuis ! Rapidement ce qui n’était qu’un teaser pour annoncer la mise en chantier d’un plus gros projet va devenir par la force des choses une source d’inspiration pour de nombreuses équipes de développement qui vont essayer de répondre à cette question… qu’aurait donné le fameux projet P.T si celui-ci avait été terminé ?
C’est de cette frustration que va naître Visage, jeu développé par la petite équipe québécoise de SadSquare Studio qui commencera à travailler sur ce projet dès 2016. Après une campagne Kickstarter réussie, le jeu sera disponible en accès anticipé puis arrivera au fur et à mesure sur PC et consoles de salon avec une réputation des plus flatteuse qui, soyons clair, est largement méritée.
Tout commence par une séquence d’introduction particulièrement éprouvante, nous n’allons pas en dévoiler davantage pour vous laisser l’horrible surprise mais celle-ci permet rapidement de mettre les choses au clair, Visage est une œuvre radicale qui va mettre nos nerfs à rude épreuve et il s’adresse à un public – très – averti qui veut de sensations fortes. Une fois manette en main, on peut commencer à visiter cette étrange demeure qui semble vraiment nous détester. Ça craque de partout, il pleut et de nombreux bruits viennent nous rappeler qu’on aurait peut être mieux fait de ne pas jouer dans le noir avec ce maudit casque visser sur la tête pour “profiter” de l’ambiance.
Quelle idée. Rien que la visite de cette baraque qui ferait passer celle d’Amityville pour une maison d’hôte nous a foutu une pression de tous les diables grâce à l’incroyable travail effectué sur le sound design et à la gestion plutôt habile des événements surnaturels. Apparaissant aléatoirement, ces manifestations (portes qui claquent, radio qui s’allume, lampes qui s’éteignent…) sont là pour nous perturber nous joueurs, mais aussi – surtout – notre personnage qui doit gérer son stress via une jauge de santé mentale pour éviter de devenir complètement fou. Pour lui éviter de péter un câble, nous vous conseillons d’éviter les endroits trop sombres mais surtout, essayez de toujours avoir des cachets tranquillisants sur vous. Ils sont indispensables et cachés un peu partout dans cette dangereuse baraque.
L’aspect réaliste des décors joue aussi bien entendu sur notre perception de ce qui se passe à l’écran, nous déambulons dans une maison banale et c’est cette quotidienneté qui ajoute au malaise que l’on ressent dans chacune des pièces visitées. En gros, ça pourrait nous donner l’impression que ça se passe chez nous et ça n’aide pas à se sentir bien quand on est plonger dans le noir. Le jeu tournant sous Unreal Engine c’est techniquement assez réussi avec des effets de lumière bien utilisés. Oui c’est tendu, oui c’est le stress permanent mais pourtant accrochez vous, ça ne fait que commencer.
Et oui, vous n’êtes pas au bout de vos peines les ami(e)s car le jeu découpé en 4 chapitres va vous emmener toujours plus loin dans l’horreur. Histoire de vous mettre dans le bain – bien sale bien entendu – et pour garder la surprise sur les 3 autres parties du titre, nous allons uniquement évoquer le scénario ainsi que les mécanismes liés au personnage de Rakan qui se passe en grande partie dans un hôpital psychiatrique.Pour déclencher les chapitres, il faut simplement récupérer des éléments dans les décors de la maison, pour Rakan il s’agit d’une béquille qui va déverrouiller une porte dans le couloirs de l’entrée.
Après une première phase toujours dans la maison, nous serons projeté dans un hôpital qui, rassurez-vous, sera tout aussi accueillant. C’est à partir de là que le jeu va montrer son vrai visage (faut l’assumer celle-là) et si le parti pris de nous proposer un jeu à la limite du walking simulator horrifique ne plaira pas forcément à tout le monde, force est de constater que sa mise en place est foutrement efficace. Lâcher dans ce lieu morbide en proie à une présence maléfique, notre avatar n’a strictement rien pour se défendre et il faudra faire parfois profile bas pour ne pas se faire étriper au détour d’un couloir mal éclairé.
Bien sûr nous aurons droit de temps en temps à une petite lampe de poche pour accéder à quelques endroits encore plus mal famés, mais globalement il faudra surtout bien faire attention à ce qui nous entoure pour rester en vie. Pour progresser il faudra résoudre des énigmes qui reposent avant tout sur notre sens de l’observation (clés à trouver, éléments à débloquer etc…) et sur la gestion d’un inventaire malheureusement assez capricieux. Nous pouvons gérer les 2 mains de notre personnage pour interagir avec notre environnement, marcher, se baisser et surtout courir pour sauver notre peau. La force de Visage n’est donc pas dans sa prise en main largement perfectible, mais clairement dans son ambiance et dans la mise en scène de la peur réalisée par la petite équipe de SadSquare qui se donne à fond pour nous foutre la pression.
Dans l’hôpital psychiatrique, les développeurs s’en donnent à coeur joie en utilisant les codes du genre et multiplient les moments de tensions à l’aide de scripts parfaitement intégrés à la narration. Hurlements qui se déclenchent en approchant d’une porte, ampoule qui éclate pour nous plonger dans l’obscurité ou créature planquée qui va nous poursuivre sans relâche, rien ne nous est épargné. Si les ficelles sont parfois un peu grosses et les mécanismes peuvent paraître un poil répétitifs sur la longueur, il est quand même réjouissant de se laisser emporter dans ce train fantôme macabre qui ne nous laisse que peu de répit. on se laisse en plus assez bien embarqué par l’histoire comme si l’on assistait à un film omnibus avec plusieurs sketchs articulés sur un arc principal.
On sent l’envie de bien faire ainsi que l’influence autant du cinéma que du jeu vidéo et si ça peut vous rassurer, le bilan est largement positif sur l’ensemble des chapitres qui vous vont vous occuper entre 8 et 10h de jeu. Flippant et bien conçu, Visage est le compagnon idéal pour vous accompagner durant ce mois d’octobre à l’approche d’Halloween. Maîtrisé malgré quelques errances dans son gameplay et dans sa gestion d'inventaire, le titre de SadSquare saura convaincre celles et ceux qui aiment se faire peur en jouant dans le noir. Une belle réussite pour un public averti.
Visage
Survival Horror
Disponible sur PS/Ps4/ps5 et Xbox
34,99€ – testé sur Xbox Series X via le GamePass
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