Alors que la fin de sa première saison complète en WRC approche,, et malgré un emploi du temps très chargé, Grégoire Munster a pris le temps de revenir avec nous sur l’ensemble de sa saison et les rallyes à venir. Déterminants pour la suite de sa carrière ?
VROOM! : Grégoire, votre vie a certainement radicalement changé depuis l’année dernière, vous qui disputez votre premier programme complet en WRC. Racontez-nous !
Grégoire MUNSTER : C’est une vie à 100 à l’heure. Après le Chili, je suis, je crois à 56 vols. C’est sûr que d’un coup, on a moins de temps pour soi et pour les proches. On a la chance de beaucoup voyager, malheureusement, très peu de temps pour visiter. Par rapport à la saison dernière, je participe à beaucoup plus d’événements média. Celle-ci peuvent durer une journée complète ou même deux avant la course. Pour tout ce qui est préparation physique et mentale, c’est un peu plus délicat à planifier et à organiser, mais ça fonctionne quand même.
Sur cette saison de WRC en Rally1, qu’est-ce qui vous a le plus marqué ?
Il y a plusieurs choses. La première, évidemment, le haut niveau. Quand on est en Rally2, il y a beaucoup de pilotes qui vont faire une spéciale à 100% puis la suivante à 95%. Avec une seule bonne spéciale, on se retrouve assez haut dans le classement. Ici, on affronte des équipages qui sont à 100% du premier au dernier kilomètre. C’est leur boulot. C’est pour cette raison-là qu’ils sont présents. Et donc toi, même quand tu es super content de ta spéciale, que tu es certain d’avoir très bien performé, quand tu regardes sur le tableau des temps, tu vois 5 personnes devant toi qui se tiennent tous en 2 secondes. C’est là qu’on voit que le niveau est extraordinairement élevé. Ce qui est aussi marquant, c’est l’engouement des fans. Par exemple, avec les événements médiatiques inhérents aux Rally1, on participe à des Meet the crew qui sont des petites conférences de presse avec le public. C’est à plein de petits détails comme ceux-là qu’on peut apprécier l’engouement qu’il y a derrière notre sport.
De manière générale, qu’est-ce qui rend si difficile pour un jeune pilote de s’imposer directement en WRC ?
Beaucoup de personnes disent que franchir le step de la Rally2 à la Rally1 est difficile. Mais en réalité, on a bien vu que l’Hybride ne fait pas une énorme différence, on parle de une ou deux secondes par spéciale. Les Rally1 sont surtout avantagées sur de l’asphalte technique comme le Rallye de Catalogne ou le Rallye des Canaries où on ira l’année prochaine. La grande différence entre les deux types de voitures, c’est l’aérodynamisme. Le cerner prend un peu plus de temps. Mais une fois que c’est fait, ça nous permet d’aller plus vite et d’avoir une voiture qui est plus stable. Finalement, le déficit de performance d’un jeune pilote en WRC par rapport aux cadors vient davantage du manque d’expérience des rallyes du Championnat du Monde et de ses spéciales que du manque d’expérience de la Rally1. Pour preuve, regardez l’excellente performance de Martins Sesks en Lettonie. C’était sa onzième participation à ce rallye et il a su réaliser des chronos incroyables pour se battre avec des Sébastien Ogier pour un podium. Pourtant il n’a pas l’expérience de la Rally1, mais par contre, il avait une meilleur expérience du parcours que n’importe qui d’autre.
D’ailleurs, votre meilleur résultat, c’est au Rallye de Sardaigne, avec une cinquième place. C’est un rallye que vous connaissiez déjà…
C’est vrai que c’était notre deuxième participation, c’est aussi vrai que c’était notre meilleur résultat de la saison, mais on a réalisé de meilleures performances en spéciales sur d’autres rallyes. Sans mon erreur en Grèce, on fait 4. Avec des si, on refait le monde… Mais de nouveau, ce n’est pas un hasard si en Grèce mon rythme était meilleur que sur d’autres rallyes. Je l’avais déjà fait à deux reprises. On arrive maintenant sur des rallyes comme le Chili ou le Central Europe que j’ai déjà fait l’année passée et le Japon que j’ai déjà fait à deux reprises. Ce sont des rallyes où j’ai déjà de l’expérience.
Ces rallyes, vous les aviez déjà faits sur une Rally1, il y aura donc vraiment matière à évaluer l’étendue de vos progrès sur cette saison…
C’est vraiment là qu’on va voir la différence entre l’année passée et après une saison complète en Rally1. Je ne vise pas de résultat particulier. Je vais surtout essayer de prendre plaisir sur les 3 dernières courses. Essayer de nouveau de faire des temps intéressants en spéciale et puis on va voir où ça nous mènera. J’ai surtout envie de voir la progression par rapport à l’année dernière.
Avez-vous également pu apprendre au contact de votre coéquipier Adrien Fourmaux ?
Oui tout à fait. On s’entend super bien avec Adrien et avec son copilote aussi, donc ça fait une super symbiose d’équipe. On est aussi deux équipages fort jeunes qui ont envie d’aller de l’avant et donc ça motive aussi beaucoup l’équipe. On a des feelings en terme de réglages de voiture qui sont assez similaires. Donc les développements et les réflexions d’ingénieur vont dans le même sens. De plus, par rapport à moi, il a beaucoup d’expérience donc je n’hésite pas à lui poser des questions. Il connaît certaines situations sur certains événements qu’il a déjà faits dans le passés. C’est sûr que c’est une bonne chose pour nous qu’il soit dans l’équipe. Et il montre justement que même s’il avait peut-être du mal à concrétiser il y a deux ans, avec du temps et du travail, ça fonctionne pour lui aujourd’hui.
Quelle note est-ce que vous vous donnez pour cette saison de découverte ?
C’est difficile à dire. Je dirais 6 sur 10. Je suis un compétiteur et je ne suis pas tout à fait satisfait avec mes résultats, en tout cas mes résultats de course. Après au niveau des performances en spéciales, on a quand même montré de belles choses sur différents terrains. On a fait un 3e temps au Monte-Carlo, un 3e temps au Kenya, un 2e temps en Pologne, un 3e temps en Grèce. On a quand même réussi à montrer de la performance sur tout type de terrains. Malheureusement, les résultats en fin de course sont un peu plus compliqués. Ça, j’imagine que ça joue un peu avec l’expérience du sport et du haut niveau de manière générale.
Est-ce que vous avez déjà la certitude d’enchaîner la saison prochaine avec un programme complet ?
Non pas du tout. C’est ça qui est compliqué avec le rallye. Il n’y a pas assez de constructeurs, donc il y a peu d’opportunités et de volants. Les contrats sont souvent de courte durée, donc d’une année, même parfois moins avec les programmes partiels. Et donc chaque année, il faut négocier pour essayer de dégoter quelque chose. C’est finalement quelque chose qui n’est pas totalement entre nos mains. D’office, il y a la performance qui joue dans la balance, mais il ne faut pas oublier que c’est un sport qui reste assez politique et financier comme la Formule 1. Il y a des choses qu’on ne peut pas contrôler. Nous, on essaie de faire du mieux possible sur les spéciales. Et on verra ce que ça donne par la suite.
Andy Foyen
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