Son nom ne faisait pas partie de la liste de Luc Holtz pour affronter l’Islande et la Slovaquie. Pourtant, Henrique Devens a fait parler de lui à 1700 kilomètres du Luxembourg. À Kaunas, en Lituanie, plus précisément. Avec le FK TransINVEST, le Brésilien est sur un petit nuage. Le club, champion de deuxième division, a remporté au début du mois d’octobre la Coupe de Lituanie face à au FA Šiauliai, troisième d’A. Lyga, la première division lituanienne. Le carton rouge écopé dans les toutes dernières secondes pour avoir tenté de perdre du temps n’y change rien, Henrique Devens remporte le titre d’homme du match et vit la plus belle période de sa carrière. « C’est la première fois que quelque chose comme ça arrive en Lituanie. On a écrit l’histoire, c’est une sensation incroyable. On a éliminé de très bonnes équipes, mais nous sommes en têtes de notre championnat et nous avons une équipe solide. Le fait d’être en deuxième division n’était qu’un détail. » L’attaquant a largement contribué à la belle saison de son équipe : 20 buts et 8 passes décisives en championnat, 2 buts en coupe. Les couleurs jaunes et bleues de son Brésil natal lui vont comme un gant.
Après Gustavo Hemkemeier, voilà un nouveau joueur luxembourgeois venu du Brésil. Le nom inscrit sur son maillot, Devens, est grand-ducal – son arrière grand-mère a émigré du Grand-Duché au Brésil – mais Henrique Sarmengue Devense née à Aracruz et grandit dans l’État de l’Espírito Santo. « Je ne connais pas exactement l’histoire, mais je sais qu’elle est venue s’installer ici, au Brésil. » Le petit Henrique joue dans les clubs de sa région, comme l’EC Caxias et l’Espírito Santo FC, mais ne passe jamais dans les filets des clubs professionnels. « Le Brésil est très grand. Quand tu es jeune, tu dois quitter la maison, c’est difficile. Ma famille m’a toujours conseillé de rester. Vers l’âge de 15 ou 16 ans, je suis allé à Rio, à Caxias et Bahia, mais je ne suis pas resté. Finalement, je suis parti aux États-Unis pour étudier et jouer en même temps. » Le jeune brésilien change ainsi d’Amérique, direction le Nord. Il y découvre le foot universitaire et porte le maillot de trois équipes différentes : Tri-Cities, Tusculum et The Villages. Le rêve d’une carrière professionnelle toujours bien présent dans sa tête. « J’ai toujours eu à l’esprit de devenir professionnel. Toujours. Je suis allé là-bas pour prouver à ma famille que je pouvais avoir un diplôme et lancer ma carrière. Je savais qu’il y aurait des opportunités et que des belles choses peuvent arriver là-bas. Les stades sont pleins, c’était une super expérience et j’ai énormément appris. »
« Il n’y a rien de pire pour un footballeur que de s’entraîner seul sans jouer »
HENRIQUE DEVENS
Son diplôme de marketing en poche en 2020, Henrique Devens espère rapidement rebondir et trouver un projet intéressant dans le monde pro. « J’ai joué dans une ligue au Brésil quelque temps. J’ai failli signé en US League One, une ligue professionnelle aux États-Unis, mais je n’ai pas pu jouer en raison d’un problème de documents. De mai à novembre, l’attaquant se retrouve ainsi sans club et s’entraîne seul, avec un coach personnel. « Il n’y a rien de pire pour un footballeur que de s’entraîner seul, sans jouer et faire partie d’un groupe. Vers le mois de novembre, je suis allé à Minas Gerais, mais les conditions étaient très mauvaises. Pour être honnête, j’ai eu quelques doutes, mais j’ai gardé l’espoir de devenir professionnel et j’ai continué à m’entraîner. Cette période m’a rendu plus fort mentalement, j’ai développé une certaine mentalité, un mindset. » Comme tout vient à point à qui sait attendre, Henrique Devens va être récompensé de tous ses efforts. Cette fois, le voyage du football l’emmène bien plus loin que les États-Unis. La destination ? La Lituanie. C’est l’Europe, c’est du foot professionnel. Le Brésilien n’hésite pas un seul instant et fonce. « Évidemment, je ne connaissais pas du tout le pays. J’ai décidé de saisir cette opportunité pour faire des statistiques et franchir une étape. » À son arrivée à Babrungas, en deuxième division, Henrique Devens se fait rapidement un nom en Lituanie : 14 buts en 7 matchs et un ticket pour l’étage supérieur, en prêt, au DFK Dainava Alytus, en juillet 2021. Buteur dès son arrivée lors de son premier match, l’attaquant totalise 3 buts en 15 apparitions, mais son équipe est reléguée en deuxième division au mois de novembre, la ligue se disputant de mars à novembre. Un an plus tard, le Brésilien rebondit en Bulgarie, à Krumovgrad, en deuxième division, sous l’impulsion d’un certain Ahmed Nouma, agent représentant plusieurs Luxembourgeois. Un nouveau lien avec le Grand-Duché pour Henrique Devens. « Je ne connaissais pas l’équipe, mais Ahmed m’a aidé à être transféré là-bas. Le club voulait monter, c’était une bonne équipe. Au début, les choses allaient bien et je jouais, mais l’entraîneur s’est fait virer et je n’ai plus trop eu ma chance. Ils ont fini par monter, mais j’ai décidé de rompre mon contrat en mars pour rentrer en Lituanie. »
De retour en Lituanie, Henrique Devens a réussi son pari avec le FK TransINVEST. Briller collectivement, avec un doublé coupe-championnat qui se profile – le club compte 13 points d’avance sur le FK Nevėžis à 4 journées de la fin – et soigner ses statistiques. « L’équipe a de très bonnes conditions, c’était un beau projet de venir ici. On va jouer à un plus haut niveau, il y aura aussi le deuxième tour de qualification à la Conference League l’année prochaine si je reste. » Mobile et polyvalent, le numéro 10 sait tout faire. « Mon style de jeu ? Je marque des buts, c’est ce que je préfère faire (rires). Mon modèle, c’est Cristiano Ronaldo, pour l’athlète qu’il est et sa mentalité. Plus jeune, j’adorais vraiment regarder Romário. Il était magique. Moi, j’aime bouger, changer de position, de direction. Je ne suis pas du genre à rester devant comme un point de référence, j’aime faire la connexion entre les lignes, me balader sur tout le front de l’attaque et attaquer les espaces, même si je me sens le plus à l’aise devant. Mes statistiques montrent que je suis un bon finisseur. » En 2021, l’attaquant a franchi le cap en obtenant son passeport luxembourgeois et rêve, depuis, d’un possible avenir en sélection. « J’ai passé quelques jours au Luxembourg, j’ai adoré. C’est un beau pays, la vie y est bonne. J’espère pouvoir y revenir l’année prochaine. La sélection serait une belle étape dans ma carrière. Le passeport me permet aussi de ne pas compter comme un joueur extra-communautaire dans un club en Europe. Je n’ai pas encore eu de contact avec la fédération. Je suis leurs résultats, leurs réseaux sociaux, j’essaie de regarder leurs matchs. La BGL Ligue ? Je ne suis pas trop, mais je connais quelques équipes, comme Hesperange, qui a joué la Coupe d’Europe. Je pense que tous les joueurs veulent jouer au plus haut niveau, ça signifierait beaucoup pour moi. Jouer contre des pays comme le Portugal, c’est un autre niveau et j’espère avoir cette opportunité. J’ai juste envie de jouer au plus haut niveau et prouver mon niveau. » Le plus haut niveau, Henrique Devens le retrouvera en première division lituanienne la saison prochaine, qu’il connaît déjà, mais pourrait surtout découvrir la phase qualificative à la Conference League dans moins d’un an… à moins qu’il ne trouve son bonheur dans un nouveau projet à l’étranger, à un échelon supérieur, lui dont le contrat expire en décembre 2023. « Je laisse mon agent s’en occuper, je reste focalisé sur ma fin de saison, mais je veux développer mon football et évoluer au plus haut niveau. Ce n’est qu’une question de temps. » Et si, après les retours de Gerson Rodrigues et Olivier Thill en sélection, c’était lui, la prochaine surprise de Luc Holtz ?
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