Depuis trois jours, chaque message vocal reçu d’Olivier Thill, avec qui nous étions en contact depuis le début de la guerre en Ukraine, était lu et écouté le plus rapidement possible. C’est tout une rédaction qui a suivi les péripéties des deux frères, mais aussi de ses coéquipiers, bloqués dans un pays dorénavant ravagé la guerre. Après l’équivalent de 24 heures de route, des changements de plans, des arrêts forcés, des revirements, un dernier message vocal d’Olivier Thill nous confirme l’excellente nouvelle : les deux frères, mais aussi bon nombre de leurs coéquipiers sont enfin sortis d’Ukraine. Retour sur trois jours complètement fou.
Un périple fou
Jeudi soir : Alors que le plan initial était de rejoindre Lviv, en Pologne, comme la grande majorité des réfugiés Ukrainiens, Olivier et Vincent Thill ont dû changer de plan, le bus commandé par le club n’arrivant pas. Les joueurs ont donc pris la décision de se débrouiller par leur propre moyen, en conduisant eux-mêmes, en voiture. Un trajet long, inquiétant et semé d’embûches. Entretemps, l’idée avait été émise de rejoindre Kiev en train, mais les billets n’étaient plus disponibles. Un coup de chance puisque le soir même, le siège de la capitale ukrainienne commençait, avec des combats et bombardements constants.
Bravant le couvre-feu, les joueurs ont donc quitté leur QG jeudi soir, dans l’espoir de se rapprocher au plus vite d’une frontière. Sur des routes particulièrement bouchonnés, leurs voitures avancent, lentement mais sûrement. Olivier Thill continue de nous parler jusqu’aux heures les plus tardives, nous annonçant un revirement : après avoir appris qu’Enes Mahmutovic était bloqué à la frontière polonaise, le groupe décide d’aller jusque la frontière Hongroise, et conduit toute la nuit durant. Les situations ubuesques s’enchaînent, avec notamment un pont qui n’est plus accessible, et qui oblige le contingent à trouver une nouvelle route pour atteindre le but. Avec déjà treize heures de voiture derrière eux, la patience doit évidemment dominer devant la peur et l’énervement…
Vendredi : Se rapprochant de plus en plus de la Hongrie, avec déjà quinze heures de route, les joueurs redonnent les voitures à leur directeur sportif, qui les héberge et leur permet de récupérer, avant de repartir le lendemain matin avec un minivan. Le vendredi soir, les joueurs se reposent donc, obligés de s’arrêter à cause d’un nouveau couvre feu entamé à 10h le soir. L’objectif alors est de se reposer, avant de partir au plus tôt le matin, et traverser la frontière. Les contacts demeurent constants avec le ministère des sports et la fédération afin de faciliter l’entrée dans un nouveau pays, et avoir un vol prévu pour retourner au Luxembourg.
Samedi : Un des coéquipiers présent avec eux pour le trajet étant croate, il réussit à contacter le Premier Ministre qui affrète un bus pour les joueurs, aux portes de la Hongrie. Ne reste plus qu’à traverser pour laisser ce terrible cauchemar derrière eux. L’espoir, le soulagement semble de mise chez les footballeurs luxembourgeois, mais l’attente de la confirmation officielle du changement de pays se fait attendre, et maintient la peur d’un problème dans les derniers instants. Dieu merci, le jeune joueur nous contacte sur les coups de 18h30, d’un dernier vocal, celui de la délivraient, du bonheur, et nous l’annonce officiellement : Olivier et Vincent Thill, après deux jours de cavales, ont enfin quitté l’Ukraine. La plus grande victoire de leur carrière.
Tendai Michot
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