Le Covid a compliqué pas mal de choses…
Au mois de mars 2020 et alors que le Covid-19 frappe de plus en plus fort, le gouvernement décide de stopper le sport en milieu scolaire. Un décision somme toute logique au vu de l’avancée de la pandémie et de l’importance «non prioritaire» du cours de sport dans le milieu scolaire. Malgré tout, Claude Schumacher, président de l’APEP (Association des professeurs d’éducation physique), regrettait alors que certaines activités sportives telles que le tennis de table ou encore le badminton ne soient pas maintenues, les contacts directs se faisant rares et le tout en maintenant des mesures de sécurité. Mais peu importe. Cette mesure drastique devait durer quelques mois, elle a duré au total plus d’un an. Pour Claude Schumacher, le sport est «la première chose qui a été abandonnée et la dernière qui a été relancée». Car même quand il y a eu un semblant de relance, avec «trois, quatre compétitions au début de l’année scolaire dernière, on a dû arrêter à nouveau» regrette Jeff Kohnen, le président de la LASEL, la Ligue des associations sportives étudiantes du Luxembourg, qui organise chaque année près de soixante-dix compétitions interlycées pour 7 500 élèves du pays. Plus d’un an sans reprise normale de l’activité sportive, et l’effet s’en ressent encore aujourd’hui. «Il y a eu une réduction des participants au niveau des clubs, surtout dans la tranche d’âge 14-18 ans» continue Jeff Kohnen. La résultante de cette période de galère, c’est surtout «le manque de compétition. Ils étaient habitués, pendant presque un an, à ne pas pouvoir s’entrainer, ou alors à juste s’entrainer sans pouvoir participer à des compétitions. Donc à partir de là, il y a peut-être un certain manque de motivation qui est venu, mais aussi une habitude. C’est forcément plus confortable de rester à la maison devant la télé que de reprendre une activité sportive. Il n’y a peut-être pas eu assez de pression de la part des parents».
… Et l’impact sur la santé des jeunes s’en ressent
«Le constat que nous faisons aussi, c’est que nous voyons que les élèves arrivant de l’école fondamentale n’ont pas une bonne condition physique, ils n’ont pas eu l’habitude de faire du sport» ajoute Jeff Kohnen. Et pour cause, reclus chez eux, ce n’est pas seulement le sport mais c’est toute une activité physique qui a été stoppée : « Même les mouvements habituels que les jeunes font, prendre un bus ou monter des escaliers pour aller en classe par exemple, ils ne le faisaient plus » appuie Claude Schumacher, avant de constater l’impact négatif d’un tel arrêt. « Le sport n’a pas seulement un impact sur la santé physique, mais aussi sur la capacité sociale et psychique de la personne. Ce sont des aspects qu’on ne remarque pas tout de suite. On n’a pas encore de chiffres qui démontrent l’effet négatif sur les contacts sociaux des personnes, mais ça joue très certainement. Il y a d’autres problèmes qui arrivent en éliminant le sport et l’éducation physique ». Et relancer une machine à l’arrêt depuis plus d’un an, ce n’est certainement pas un combat gagné d’avance. « Maintenant, de réactiver, de se dire « je reprends tout » quand on n’a pas eu d’entrainement pendant six mois ou même plus, c’est un pas à réaliser. C’est aux clubs et aux écoles de les regagner». C’est donc, entre autres, par l’école que les différentes entités veulent faire redémarrer la machine.
Les actions se multiplient
Et pour cela, elles ont mis le paquet pour cette rentrée 2021/2022. Jeff Kohnen en est persuadé, « le meilleur qu’on puisse faire, c’est au niveau de l’école, car elle offre une activité parascolaire. Les élèves peuvent participer sans avoir besoin de prendre une licence ou d’effectuer des démarches administratives compliquées ». Au sein de l’APEP, constituée d’un réseau très important de professeurs d’éducation physique au Grand-Duché, « on essaie surtout de remotiver les élèves par le dialogue. Nos membres ont été sensibilisés pour motiver les élèves, leur montrer comment fonctionne la section sportive, et leur rappelle qu’elle existe ! L’offre est vraiment diversifiée, on peut faire de l’escalade, du tennis de table, du football, de la gym… ». C’est pourquoi les deux entités ont lancé une campagne de communication exceptionnelle au mois de septembre. Intitulée Wou bleifs du?, cette campagne se compose d’une vidéo « pour informer que chaque lycée a une offre parascolaire ». Cette vidéo met en scène un jeune, couché sur son lit, qui échange des sms avec un ami qui lui demande où est-ce qu’il se trouve, alors que lui est en train de faire du sport. Le jeune homme reçoit alors un ballon de basket et c’est ensuite un enchaînement de sports qui défile sous nos yeux. Basket-ball, football, badminton, escalade, volleyball, gymnastique, step, natation, musculation… tout y passe, montrant la diversité de l’offre offerte par l’école.
Un changement en profondeur du système
Interrogé au sujet de la part du sport à l’école au Luxembourg, Claude Schumacher en est certain, «celle-ci ne suffit largement pas. Normalement, comme le préconise l’Organisation Mondiale de la Santé, nous devrions faire une heure de sport tous les jours. Tous les scientifiques disent qu’il serait mieux de faire beaucoup plus de sport, et l’école est le seul endroit où nous touchons chaque jeune. Mais on ne fait rien, c’est une demande que nous reformulons depuis des dizaines d’années au ministère et c’est toujours un non catégorique, peu importe le ministre en place ». Les professeurs d’éducation physique ne se disent alors «pas du tout écoutés. Ils n’écoutent surtout pas les recommandations de l’OMS, des médecins ou des scientifiques en neuro-science qui ont prouvé le bénéfice du sport, même sur les capacités d’apprentissage des élèves. C’est de l’ignorance de la part des ministères». Claude Schumacher et l’APEP militent donc depuis des années pour augmenter une part du sport à l’école «qui ne s’améliore toujours pas». De là à imiter un modèle allemand qui accorde plusieurs heures d’activités culturelles et physique par jour à ses élèves ? «C’est utopique de penser qu’on arriverait à une telle situation au Luxembourg, mais ce serait le bon chemin, c’est sûr» conclut le président de l’association des professeurs d’EPS.
Des français en retard
La France consacre 14% du temps scolaire à l’éducation physique et sportive, soit près du double de certains autres pays européens. Mais l’EPS n’arrive pas forcément à donner goût au sport, puisque le temps consacré quotidiennement au sport par les enfants est l’un des plus bas du Vieux Continent. D’autant plus que les écoles françaises ne disposent pas forcément d’infrastructures et d’équipements adéquats permettant de pratiquer au mieux leurs cours d’EPS.
L’Espagne, un relais vers les clubs
Dans plusieurs pays européens, les cours d’EPS sont un véritable relais vers les clubs. C’est le cas notamment de l’Espagne, où les écoles sont en effet très investies dans le sport périscolaire et entretiennent des rapports étroits avec les clubs et associations sportives de leurs villes. Dans la péninsule ibérique, la performance sportive est par conséquent au cœur des préoccupations.
Un modèle allemand pas si parfait qu’il en a l’air
Longtemps vu comme étant la référence en Europe, le modèle allemand octroie effectivement une part importante au sport et aux activités culturelles. Mais pour cela, le rythme des cours est pour le moins effréné et la concentration sur certaines matières devient difficile. De plus, ce sont les parents qui ont la charge de leur enfant dès le début de l’après-midi, car le sport n’est alors plus scolaire mais dépend des associations sportives, très puissantes outre-Rhin. Cela crée par conséquent des inégalités, tout le monde n’ayant pas forcément les moyens d’y inscrire son enfant.
La Finlande, terre promise ?
La référence se trouverait alors peut-être en Fennoscandie. Car en Finlande, par exemple, les jeunes sont sensibilisés dès le plus jeune âge aux méfaits de ne pas pratiquer d’activités sportives. D’autant plus que le sport est exploré de toutes les manière, notamment lors des sciences sociales, montrant que les matières sont liées entre elles. Le sport est alors un véritable enjeu sociétal et de santé publique.
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