Il s’agit d’un phénomène qui tend à s’amplifier au fil des mois, des années. A travers tout le pays, de plus en plus d’équipes de football se montent au sein des entreprises, autour de salariés mûs par la volonté de se retrouver, de faire quelque chose ensemble, de se défouler, de se mesurer à d’autres semblables. Lorsque Massime Hassid a ouvert son temple du football en salle, Sport4Lux, à Munsbach en octobre 2021, il a vite compris le potentiel de ce marché et de cet élan : « On se devait d’attirer du monde et les boîtes sont beaucoup plus faciles à capter, c’est plus direct, qu’une masse informe et non-définie de potentiels clients. Par exemple chez Deloitte, comme dans d’autres grosses entreprises du pays, il y a un responsable foot, il te suffit de l’appeler et d’échanger directement avec lui. » La structure vient justement d’organiser le tournoi interne de chez Deloitte. « Il avaient douze équipes ! Cela représente quand même 100 personnes », s’enthousiasme Maxime Hassid.
« On rencontre des personnes de l’entreprise que l’on n’aurait jamais rencontrées autrement »
Rapidement, l’idée d’organiser un véritable championnat corpo fait son chemin. « On a lancé notre premier championnat avec 24 équipes cette saison. La plus difficile est que l’on ne connaissait pas le niveau des gens au départ. On a fait deux grands groupes au début, les quatre premiers des deux groupes se sont retrouvés en division un, les quatre d’après en division 2, et les deux d’après ainsi que quelques nouveaux en division 3. Cela a permis de classer correctement les gens. Les qautre premiers des deux premières divisions se sont retrouvés en demi-finales, et là on a fait un événement final où on a réuni les 8 équipes, les 4 meilleurs des deux premières divisions, qui ont joué chacun leurs demi et leur finale de leur côté. » Fort d’une première édition réussie, le patron de Sport4Lux est déjà focalisé sur la saison prochaine : « On espère avoir 32 équipes pour faire quatre poules de huit équipes. » Côté budget, les entreprises qui souhaitent inscrire une équipe devront débourser 2500 euros hors taxes pour 15 rencontres (une rencontre comporte deux matchs de 25 minutes, afin de « garder du challenge et de la motivation si l’écart de buts est important dès le début du premier match »). Mais l’organisateur s’occupe ensuite de tout, calendrier, accueil, et même arbitrage.
Certaines entreprises en font un vrai argument pour fidéliser leurs salariés et soigner leur image
Il n’y a pas que chez Sport4Lux que l’engouement du foot corpo à 5 prend de l’ampleur. Au Luxembourg, elles sont 80 équipes à 5 à se répartir sur trois championnats (Sport4Lux, le Loft, Socialgoal). Sans compter le championnat et la coupe à 11 organisées par la FLF. Maxime Detourbe, 34 ans, est salarié depuis 11 ans chez BNP-Paribas, dont 10 dans l’équipe de foot corpo de l’entreprise. « Je suis également président du basket corpo », précise le jeune homme, très investi. Une trentaine d’associations différentes vivent au sein de la société. « Avec l’équipe de foot à 11, on joue en première division depuis un moment et on a gagné trois coupes sur les cinq dernières. » Lorsqu’on lui demande ce que le sport corpo peut apporter à un salarié, Maxime Detourbe a quelques arguments en stock : « Des gens de ma génération qui bossent n’ont souvent plus envie de faire trois entraînements par semaine et un match en plus le week-end en club. Le foot corpo est une bonne alernative, cela permet d’épargner davantage la vie de famille et le temps libre, en jouant un soir dans la semaine. Et puis il y a un côté fédérateur, on rencontre des personnes de l’entreprise que l’on n’aurait jamais rencontrées autrement. Cela peut même ouvrir des portes en interne. » L’entreprise y gagne également : « Avoir une vraie structure de sport corpo est un vrai plus pour attirer et garder des salariés, notamment sur la tranche d’âge 30-45 ans. Cela a déjà joué dans ma réflexion quand j’ai pu avoir des touches ailleurs. Même si on nous propose un peu plus de salaire ailleurs, d’être aussi bien au sein de mon entreprise, avec ce facteur sport, m’a clairement fait rester. » Jouer cette carte du sport, de plus en plus d’organismes le font. Ainsi, le 1er juillet dernier, le syndicat l’ALEBA a décidé d’organiser un tournoi de foot à 11 à Bertrange, réunissant 23 équipes, afin de rajeunir son image. Plus généralement, les entreprises qui ont des équipes inscrites dans des championnats corpo sont ravies lorsque celles-ci performent, n’hésitant pas à mettre en avant leurs champions dans leur communication interne voire externe.
Revenons à Sport4Lux, où on n’oublie pas les filles : « On a lancé également les corporate féminines, ça nous tenait à coeur depuis le début. Et ce n’est vraiment pas facile. Il y a peu d’équipes, peu de joueuses. Les groupes sont tout petits donc il peut y avoir des annulations de dernières minutes. Mais on l’a fait ! Avec six équipes. Il y en aura au moins huit l’année prochaine. On espère à notre niveau aider au développement du foot féminin », explique Maxime Hassid. Pour lui, le succès du football corpo va continuer de grandir : « Il y a un effet post-Covid, une envie de se retrouver, de faire du sport. C’est un marché qui va continuer de se développer. Les initiatives comme les nôtres poussent au développement de cette pratique. Il y a pas mal de boîtes que je suis allé voir qui ont créé une équipe parce que je les avais sollicitées. » Les grosses entreprises ont évidemment un avantage sur les plus petites structures : « le réservoir est moins important pour elles, c’est plus dur. Dès qu’un mec est en déplacement pro ou absent, c’est plus difficile de le remplacer », explique le patron de Sport4Lux.
Malgré ces freins pour certains, le nombre d’équipes inscrites dans divers championnats ne cesse d’augmenter. Et la dynamique n’est pas partie pour faiblir. De plus en plus d’entreprises semblent ainsi mettre la célèbre formule latine au coeur de leur politique : Mens sana in corpore sano (un esprit saint dans un corps saint).
François Pradayrol
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