Quelle est la première chose que l’on te dit quand tu dis que tu fais du tir ?
La personne en face me dit toujours qu’elle ne connaît pas cette discipline, elle me demande si c’est olympique, où on peut la pratiquer au Luxembourg, combien ça coûte. C’est assez méconnu.
Cela donne-t-il plus de chance d’avoir une peluche à la Schueberfouer ?
Je n’ai pas essayé, mais je ne pense pas (rires). Là on doit cibler le tir, ce n’est pas comme viser au pistolet et à la carabine.
Comment as-tu commencé le tir ?
C’est grâce à mon copain. Il faisait de l’autocross, mais il a arrêté il y a deux ans. Il cherchait une nouvelle discipline, un ami lui a suggéré d’essayer le tir. Il m’a proposé de venir et j’ai tout de suite adoré !
C’est un sport mixte, mais dans l’imaginaire collectif, ça semble davantage masculin. C’était naturel pour toi de te diriger dans cette voie ?
Pour moi, il n’y a pas de grande différence. Il faut avoir un peu de force, mais des filles petites ou minces en font, donc les hommes n’ont pas d’avantage par rapport aux femmes. L’apprentissage, l’entraînement, la répétition, c’est ce qui permet de progresser et d’être performant.
Qu’est-ce qui t’a plu ?
Le bruit, la fumée, les odeurs quand on ouvre le canon. Les réflexes viennent avec le temps. Quand on casse quelques plateaux, on en veut toujours plus. C’est notre challenge. Voir les gens sur les stands aussi, c’est plaisant.
As-tu pratiqué d’autres sports ?
J’ai fait une année d’escalade, mais c’est compliqué de progresser, car il faut y aller trois fois par semaine pour avoir de la force et de la technique. J’ai aussi un cheval. Quand il était plus jeune, j’allais en forêt avec lui. Sinon, j’ai aussi fait un peu de fitness.
« Même si une compétition se passe mal, c’est une bonne expérience pour devenir meilleure »
LENA BIDOLI
Comment se sont noués les premiers contacts avec la sélection ?
J’ai tiré à Differdange et quelqu’un a dit à l’entraîneur de venir voir comment je tirais. Je suis passée sur des petits concours un peu partout, en France, en Allemagne, mais aussi au Luxembourg. La fédération a vu que ça ne se passait pas trop mal, donc ils m’ont donné la chance d’être dans le cadre national et de m’entraîner avec eux.
Tu sens que tu progresses davantage avec la sélection ?
Oui, on fait des entraînements différents, ça m’a beaucoup aidée, ce sont des expériences différentes. Le sport permet de les vivre. Même si une compétition se passe mal, c’est une bonne expérience pour devenir meilleure. Il faut toujours en tirer le positif.
Lyndon Sosa est le plus grand nom de la discipline au Luxembourg. Qu’est-ce que ça fait de le côtoyer ?
J’ai de la chance, parce que comme je suis la seule femme, la fédération a pu faire une équipe mixte pour la première fois. Comme ça s’est plutôt bien passé, j’ai pu tirer au Grand Prix en France. J’ai fait une bonne finale et ça m’a permis de me qualifier pour les Jeux européens des petits États.
Quels souvenirs gardes-tu des Jeux européens des petits États, à Malte, où tu as remporté l’or au concours de trap ?
J’ai beaucoup appris. Tirer avec les meilleurs athlètes européens, c’est autre chose que de tirer ici. On n’avait pas de toit sur les fosses, alors que je suis habituée à en avoir. La pluie, le soleil, c’était différent. Il faut aussi que j’apprenne à rester calme, même si je ne fais pas une très bonne planche, je dois apprendre à garder confiance en moi, mais ça vient avec l’expérience.
C’est ta meilleure performance ?
C’est ma meilleure expérience. C’était une bonne finale. Être sur le podium à la première place, avec juste à côté de moi une médaillée olympique, c’est gratifiant. J’ai réalisé ma meilleure performance en France. Je suis entrée à la septième place en finale et je suis arrivée troisième. Il y avait de gros noms, des Chinois, une Australienne déjà médaillée d’or à la Coupe du monde. La finale à Malte, 42 de 50 plateaux avec un coup, ce n’était pas trop mal (rires).
Tu pensais atteindre un tel niveau ?
Non, vraiment pas (rires). Au début, je faisais du tir pour le plaisir. Je veux toujours faire plus, faire mieux. C’est la deuxième saison que je tire, que je fais des concours. J’ai déjà beaucoup plus tiré, donc je suis contente et fière de faire ce type de compétition.
« J’ai encore beaucoup de travail pour gagner en constance »
LENA BIDOLI
À quel moment as-tu pris conscience de ton potentiel ?
À Chypre, ma première Coupe du monde. Après les deux premières planches, j’ai vu que j’étais bien partie. Mon erreur a été de regarder sur le tableau. Après ça, je me suis mis trop de pression et j’ai moins bien tiré parce que je me suis trop répété que je pouvais le faire. En revanche, je me suis dit après la compétition : « Si tu travailles, tu peux tirer avec les meilleurs. » J’ai encore beaucoup de travail pour gagner en constance, et pour en avoir, il faut beaucoup d’expérience.
Dans les sports dits mineurs, de nombreux athlètes mènent une vie normale en parallèle. Tu vends des voitures, c’est compliqué d’allier vie professionnelle et carrière sportive ?
Je vends des voitures, donc je suis obligée d’être sur place et c’est un peu difficile. Je vais tirer dès que je suis libre, mais j’ai une heure de route pour y aller. Ce n’est pas évident, mais on s’arrange. C’est aussi un sport très cher, donc tout mon argent passe dans le tir. Pour l’instant, je n’ai pas de sponsor.
Tu t’apprêtes à disputer les Championnats d’Europe à Osijek. À quoi t’attends-tu ?
Je ne me mets pas de pression. Je ne fais plus l’erreur de regarder le tableau avant la fin, ça montre que j’ai déjà appris (rires). On veut toujours gagner, évidemment, mais on sait qu’on a la crème de la crème de l’Europe en face. C’est bien, ça permet de voir où on se situe.
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