Comment et pourquoi être venu à l’équitation ?
Mon père, cavalier international, a constamment eu des chevaux, c’est son métier depuis toujours. Vu que je n’étais pas très courageux à l’école, il m’a mis à cheval de très bonne heure et j’en ai fait mon métier. Après être allé aux Championnats d’Europe Juniors et jeunes cavaliers, je suis parti à l’armée au CSEM à Fontainebleau. Je me suis ensuite expatrié en Espagne pendant trois ans chez José Manuel Pérez Arroyo et Cuca. J’ai aussi travaillé aux côtés d’Andrew Nicholson pendant quatre ans (cavalier de concours complet néo-zélandais, médaillé aux Jeux olympiques de 1986 et de 2012). Je me suis enfin installé dans mes écuries de compétition, toujours en Angleterre, où j’avais une trentaine de chevaux de sport.
Pourquoi avoir choisi de vous orienter vers le concours complet d’équitation ?
Parce que mon père a toujours fait du concours complet. Il a fait Burghley, Pau en 5 étoiles plusieurs fois (les deux concours figurent parmi les six internationaux 5 étoiles au monde). Je trouvais le complet plus excitant que les autres disciplines, avec plus d’adrénaline, une ambiance plus sympa certainement aussi.
À quoi ressemble une journée de travail à l’aube d’une nouvelle saison de concours quand on rêve de participer aux prochains Jeux olympiques de Paris en 2024 ?
Je suis installé chez Nicolas Touzaint (cavalier français, champion olympique par équipe à Athènes et médaillé de bronze à Tokyo). On commence à 7 h 30, on met le foin tous ensemble et je me mets ensuite à cheval vers 8 h 30. J’en monte entre six et dix, avec les deux miens, dont un que m’a confié mon père. Quant aux concours, en pleine saison, ils ont lieu tous les dix ou quinze jours environ pour moi. Nicolas Touzaint en a souvent la semaine aussi. Avant, quand j’étais installé en Angleterre, la fréquence était plus importante. Actuellement, j’ai deux chevaux, c’est un peu moins intense.
Pour ce qui est de la routine avec les « vieux chevaux », cela passe régulièrement par du dressage. Je m’entraîne avec Amélie Billard (plusieurs fois titrée en concours complet et championne d’Europe Juniors en individuel et par équipe). On galope tous les quatre ou cinq jours sur une piste à quelques minutes à cheval des écuries. Je me concentre sur quelques exercices de gymnastique également. Quant aux jeunes chevaux, c’est un peu le même principe avec quelques nuances. On fait moins de galop et on va peut-être les sauter plus souvent, mais sur moins gros.
Pourquoi avoir choisi de porter les couleurs luxembourgeoises ?
J’ai du sang luxembourgeois dans les veines. Mon oncle a découvert que nous avions de la famille qui avait vécu au Luxembourg et nous avons donc pris la nationalité luxembourgeoise. Et en plus, ça peut m’ouvrir des portes plus facilement pour ce qui touche aux compétitions internationales et aux championnats, et peut-être même me démarquer par rapport aux autres.
Quel est ton programme de compétitions cette année, en intégrant les jeunes chevaux ?
Les compétitions c’est, avec mon cheval, essayer de me qualifier pour faire un « quatre étoiles long » qui va se dérouler à Blenheim en Angleterre en fin d’année. Je vais commencer normalement par faire le 4 étoiles à Renswoude en Hollande. Si je me rends à Blenheim en septembre, avec de bons résultats, je devrais pouvoir aller aux Championnats d’Europe l’année prochaine. Ça, c’est la première étape. Je m’occupe également des jeunes chevaux de Nicolas Touzaint, je les valorise et les monte en concours. On ne sait pas trop encore où ils vont aller. Nous sommes à la recherche d’investisseurs ou de chevaux pour essayer de me faciliter l’accès à cette qualification pour les Jeux olympiques, car plus j’aurai de chevaux, plus ce sera facile de marquer des points au classement mondial FEI.
Pourquoi avoir choisi de vous orienter vers les écuries du champion olympique Nicolas Touzaint ?
Son palmarès explique ce choix. Si tu veux devenir bon, tu t’entraînes avec les meilleurs. C’est quand même l’un des sportifs français ayant le plus de participations aux Jeux (le champion olympique a aussi été fait chevalier de la Légion d’honneur). Il n’y a que très peu de personnes dans le monde avec autant de participations aux JO. Suivre son rythme d’entraînement, que ce soit le matin quand il faut être de bonne heure aux écuries comme lui le fait, monter à cheval, l’écouter, le regarder, cela m’inspire beaucoup. Il m’aide pas mal avec mon cheval aussi. C’est quand même une chance inouïe et c’est l’une des raisons pour lesquelles je me suis basé avec lui. C’est en plus quelqu’un d’extrêmement humble et gentil.
Avez-vous constaté une évolution du sport ces dernières années ?
Le sport a énormément changé en vingt ans. Premièrement, parce que le steeple-chase et les routiers ont été arrêtés. On a davantage besoin de chevaux avec moins de sang, qui se déplacent mieux en dressage et qui sautent mieux en concours. Le sport est devenu aussi plus professionnel, ce qui est très bien. Les cavaliers sont plus pros, plus affûtés, tout comme les chevaux. Ils sont aussi plus techniques.
Je trouve que le dressage a énormément évolué. Le cross, lui, n’a pas particulièrement changé ; il y a vingt ans c’était peut-être plus gros, maintenant, c’est moins technique. Quant au concours hippique, je pense que c’est sensiblement pareil.
Comment décririez-vous le cheval de complet ?
C’est n’est pas facile comme question, car dans notre discipline, on rencontre tous types de chevaux à haut niveau. Si vous allez à Badminton (l’une des plus grandes compétitions de concours complet), vous aurez l’occasion de voir tellement de genres différents. Je dirais quand même que ce qui compte, c’est le modèle, les allures et la tête. Il faut qu’il soit courageux et qu’il ait du cœur. Avec l’expérience, je pense que quand ils sont gentils dans leur tête et qu’ils veulent travailler avec vous, c’est presque mieux que le pur talent.
Quelles sont les étapes pour les qualifications aux prochains JO de Paris ?
On peut y aller soit en équipe, soit en individuel. Par équipe, il faudrait que les trois cavaliers qui montent pour le Luxembourg se qualifient, ce qui est peut-être utopique. Il faudrait qu’on se qualifie sur une Coupe des Nations, « concours nominé », et qu’on aille tous là-bas pour faire un résultat qualificatif. Il y a une autre option où on se rendrait tous les trois aux Championnats d’Europe pour obtenir un résultat, c’est-à-dire tous nous qualifier par rapport aux autres équipes déjà assurées. Concernant la qualification individuelle, ça se joue avec les classements mondiaux, les points qu’on prend lors des compétitions internationales. Et ensuite, cela fonctionne par zone. Ils éliminent tous les pays qui ont une équipe et prennent les cavaliers individuels. Ceux qui seront pris en considération sont ceux qui auront le plus de points. Si je vais aux Championnats d’Europe et que je fais un résultat correct, je pense qu’en prenant énormément de points, je pourrai me qualifier pour les Jeux olympiques l’année suivante.
Quels conseils donneriez-vous à celles et ceux qui veulent se mettre au concours complet d’équitation ?
Travailler dur, travailler dur et travailler dur ! Être passionné, car ce n’est pas un métier facile, mais ça reste quand même un super beau sport. Je pense qu’il s’agit du sport le plus naturel autour de l’équitation. L’intimité qu’on peut avoir avec les chevaux est incroyable, surtout sur le cross. C’est un sport dangereux, le risque est élevé et de nombreux accidents ont lieu tous les ans ; les gens sont humbles, simples et nous sommes une grande équipe.
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