Pour le troisième épisode de notre série sur les sponsors mythiques du sport automobile, nous revenons sur une boisson alcoolisée : Jägermeister.
Une tête de cerf surmontée d’une croix faisant référence à saint Hubert et saint Eustache, saints patrons des chasseurs, une bouteille verte reconnaissable d’entre toutes et une recette secrète : le Jägermeister (maître chasseur en allemand) demeure l’une des boissons alcoolisées les plus populaires dans notre région. Cette liqueur un peu spéciale a vu le jour en 1934, un an après l’invention de la recette originelle par Curt Mast. Composée de 56 plantes (dont certaines secrètes, donc), elle est présentée comme un remède efficace contre la toux et les problèmes digestifs. Dans un premier temps associée aux personnes âgées, la marque allemande entame des campagnes marketing plutôt agressives pour tenter de modifier son image, et cela passe notamment par… le sport.
Débuts en 1972
C’est donc à partir de l’année 1972 que l’on voit apparaître pour la première fois le cerf sur des équipements sportifs. Dans le football, en sponsorisant l’Eintracht Braunschweig (devenant ainsi la première marque de l’histoire du sport allemand à apparaître sur un maillot), mais aussi et surtout dans le sport automobile. Le 21 janvier 1972, on retrouve donc le « stag » (le cerf) au départ de la « Monte » sur une Porsche 914/6 vert foncé. Celle-ci ne verra pas la fin de la course, mais le P.-D.G. de Jägermeister est préoccupé par autre chose : la couleur de la voiture, qui ne permettrait pas, selon lui, de promouvoir correctement sa marque. C’est ainsi que dès la course suivante, la voiture fut repeinte dans une livrée orange, couleur de la bande horizontale présente sur chaque bouteille. En avril de cette même année 1972, Graham Hill, double champion du monde de Formule 1, revenait en Formule 2 au volant d’une Brabham Ford BT 36 (puis 38) de couleur… orange, ornée du sigle Jägermeister à l’avant.
Le sponsoring n’ayant pas autant d’impact qu’aujourd’hui (très peu de retransmissions télévisées, notamment), les marques investissaient beaucoup moins et il arrivait que Jägermeister et sa désormais mythique couleur orange se retrouvent sur certaines voitures seulement le temps de quelques courses.
À partir des années 1980, la notoriété des courses automobiles s’est dirigée vers le groupe C, une ancienne catégorie de sport-prototypes, introduite par la FIA dans la même période que les groupes A et B. Celle-ci était destinée à remplacer les voitures du Groupe 5 comme la Porsche 935, et celles du Groupe 6, comme la Porsche 936. Naturellement, Jägermeister ne loupe pas le coche et s’engage un temps avec la Ford C100 qui sera pourtant très peu compétitive. Quelques années plus tard, une écurie nommée Brun est arrivée, créée par un ancien pilote et homme d’affaires franco-suisse ambitieux : Walter Brun. Un énorme coup pour Jägermeister qui décide de miser sur cette équipe. Les Porsche de Brun remportent le Championnat du monde des voitures de sport en 1986 face à des constructeurs tels que Nissan, Mercedes ou encore Jaguar, et l’alliance avec la distillerie fonctionne alors à merveille jusqu’à la fin de la décennie.
Un dernier tour en DTM
Au début des années 90, peu après la chute du mur de Berlin, Jägermeister fait son entrée dans le monde du DTM (Deutsche Tourenwagen Masters), là où les voitures commencent à surpasser celles du groupe C. Audi, Alfa Romeo, BMW, Mercedes-Benz ou encore Opel y participent, et la firme de Eckhard Schimpf ne veut pas rater le coche. Après un premier accord avec Opel puis BMW, c’est finalement avec Alfa Romeo que Jägermeister fait sensation. Avec à son volant Michael Bartels, chouchou des fans, le « stag » rayonne, même s’il a parfois dû remplacer son nom Jägermeister par « Jäger-Tonic », notamment en Finlande, où la publicité pour l’alcool était formellement interdite. Quand le DTM est devenu international, changeant ainsi de nom pour ITC (International Tourism Championship) à la fin des années 1990, Jägermeister s’est peu à peu retiré, faute de budget. L’entrée du sport automobile dans le XXIe siècle s’est accompagnée d’une professionnalisation et d’une nécessité d’investir plusieurs millions d’euros, ce que l’entreprise allemande n’était pas prête à faire. Cela fait désormais plus de vingt ans que le « stag » n’a pas bramé sur les circuits, et c’est une retraite que l’on regrette bien.
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