Mehdi Terki : « Une pression constante et malsaine »

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Terki
Le désormais ancien capitaine d'Hesperange explique les raisons de son départ.

Capitaine d’Hesperange, et grand artisan du premier titre de l’histoire de son club, Mehdi Terki devrait être un homme comblé, après avoir atteint ses objectifs, et à quelques mois de jouer des matchs européens, rêve de toujours. Pourtant, le milieu de terrain a pris la décision de quitter le Swift, sans connaître l’ivresse des chocs continentaux, déçu par une direction avec laquelle il ne partage rien. Le joueur est passé dans nos locaux pour un entretien vérité.

Pourquoi prendre la décision de quitter le club ?

C’est simple : moi et la direction, on ne s’entend pas. Pas du tout. Elle a une vision qui est très différente de la mienne, et j’arrive à un âge où un projet comme la Thaïlande, cela me correspond parfaitement. J’ai toujours rêvé d’aller jouer en Asie, et c’est une opportunité que je ne pouvais pas laisser passer.

Est-ce que tu peux développer un peu en quoi consistent vraiment les désaccords avec la direction ?

Tout le monde connait Hesperange. La façon de gérer, de ramener quarante joueurs, de mettre la pression tout au long de l’année pour des broutilles, moi, cela m’a vraiment fatigué… Je remercie quand même Flavio Becca car il m’a accordé sa confiance au sein d’un bel effectif, mais à part ça… Ce club est trop amateur, sur beaucoup trop de points. Quand je vois ma vision sur mon avenir de footballeur, et ce qu’ils veulent développer, cela ne correspond absolument pas. On veut tous jouer la Coupe d’Europe, ça oui, mais le cheminement pour y arriver est, selon moi, malsain. 

« ce beau groupe ne m’a pas empêché d’être épuisé par tout ce qui se passait là-haut, et la pression malsaine constante »

Est-ce que tu t’es rendu compte de tout ceci récemment ?

Dès le départ de Mokulu, j’ai commencé à bien comprendre comment cela fonctionne ici. À dire vrai, dès le premier match nul après mon arrivée, j’ai compris au vu de la réaction ce qui ne fonctionnait pas. Ils sont trop dans l’excès… Quand tu perds, c’est dans l’excès, quand tu gagnes, c’est dans l’excès… Alors qu’une direction, son rôle, c’est de temporiser et d’amener de la tranquillité au groupe. Je croyais profondément en la capacité de l’effectif à aller chercher ce titre, avec un très bel effectif, un super coach qui a réussi à agencer tout ça, et une vraie motivation. Mais cela ne m’a pas empêché d’être épuisé par tout ce qui se passait là-haut, et la pression malsaine constante. 

Il y-a-t-il eu du plaisir malgré tout cette saison ?

Au sein du groupe, oui. Comme j’ai dit, je sentais vraiment que ce club pouvait aller chercher le titre, avec un entraineur qui a parfaitement su gérer un effectif trop large, de la solidité à tous les niveaux, et un groupe soudé. Et je tiens aussi à dire que cette lutte avec Dudelange a été assez géniale à vivre. J’en ai parlé avec certains joueurs du F91 lors de la cérémonie du Dribble d’Or : c’était très agréable d’avoir une telle lutte, l’interdiction de faire un faux pas… C’était fatigant, mais très stimulant.

Ne pas participer à cette campagne européenne après avoir enfin atteint le graal, n’est-ce pas un peu dur ?

C’est mon plus grand regret. Une des raisons principales de mon arrivée ici, c’était l’accessibilité à des rencontres européennes. Quand tu parles à Prempeh, Couturier, et qu’ils te racontent leur vingtaine de match en coupe d’Europe, ça fait rêver… C’est clairement pour cela que je suis venu ici. Déjà l’an dernier, j’étais très déçu de ne pas avoir eu de qualification. Je me suis donc dit qu’il fallait absolument remporter le titre cette saison pour goûter à ce rêve. Et malgré ce rêve, avec tout ce qui s’est passé cette année, je suis content de partir.

Il n’y a donc aucun regret ?

Sur la décision de partir, absolument pas. Pour moi, c’est la bonne décision. Après, l’avenir nous dira si j’ai eu raison ou tort. Mais en effet, de ne pas jouer les matchs européenns, ça, c’est dur…

Il y avait donc une vive tension avec la direction. Et avec les joueurs ?

La cassure avec la direction, ça n’est pas un secret. Et c’est d’ailleurs des deux côtés ! Maintenant, heureusement, l’équipe a été formidable, et très forte mentalement. On était une vraie bande de copains. J’ai rarement été dans un groupe aussi agréable. J’aimais venir à l’entraînement, et même parfois après, on allait manger ensemble ou regarder des matchs de Champions League. Le coach a mis en place le fait qu’une fois par mois, on se retrouve tous pour fêter les anniversaires de tous les joueurs avec une soirée pizza, c’était fantastique. Quand on fait le stage en Espagne, il n’y avait pas de clan, pas de tension. J’ai même vu des joueurs qui ne se comprenaient pas en termes de langue jouer à deux au ping-pong jusqu’à pas d’heure (rires) ! L’équipe était top, tout simplement. J’ai fait de belles rencontres. En plus d’être des très bons joueurs, c’était des très bonnes personnes.

« S’il y avait les bonnes personnes aux bons postes, avec la bonne expérience, personne ne pourrait rivaliser avec Hesperange »

En tant que capitaine, as-tu pu avoir des dialogues avec la direction, ou cela n’a-t-il pas vraiment été possible ?

Je n’ai pas l’impression qu’elle veuille entendre ce que j’ai à dire ou aucun des joueurs (rires) ! On sait comment Flavio gère les choses. C’est un peu sa marque de fabrique, que tout ne soit pas dans la tranquillité. Je pense que dans le fond, il aime travailler dans ce climat assez tendu, empli de confrontations.

Que retiendras-tu de ces années à Hesperange ?

D’abord, j’ai été agréablement surpris du niveau du championnat. Je pensais sincèrement que c’était moins fort. Les infrastructures étaient aussi de qualité. Il y a aussi la qualité de vie avec le groupe, un coach, Pascal Carzaniga, pour moi clairement le meilleur au Luxembourg, qui m’a énormément protégé vis-à-vis de la direction et que je tiens particulièrement à remercier, et évidemment ce titre de champion.

Beaucoup de gens disent qu’avec une meilleure gestion, Hesperange aurait une marge d’avance bien plus élevée avec le reste du championnat. Tu partages ce constat ?

Bien sûr. S’il y avait les bonnes personnes aux bons postes, avec la bonne expérience, personne ne pourrait rivaliser avec Hesperange. Avec les moyens et les joueurs qu’ils ont, pour moi, si c’est bien structuré, il devrait faire une poule de Conference, voire d’Europa League, chaque année. Le club grandirait, et cela pourrait tirer le championnat luxembourgeois vers le haut, et être une vitrine pour le football ici.

« on m’a vite fait comprendre qu’ils ne me laisseraient jamais partir ailleurs en bgl. Flavio ne m’a jamais répondu, et son nouveau bras droit m’a simplement dit que c’était mort… »

As-tu eu des hésitations à rester au Luxembourg ?

Sincèrement, ici, je me suis très vite dit que j’avais trouvé un pays où je me sentais bien, où je me suis fait des amis et dans laquelle la vie est agréable. J’ai commencé à parler à quelques clubs au Luxembourg qui étaient intéressés et intéressants. Maintenant, avec la règlementation au Luxembourg, je savais que cela serait compliqué de pouvoir partir dans une autre équipe. J’ai demandé une réunion pour pouvoir potentiellement partir dans un autre club de BGL Ligue, et on m’a vite fait comprendre qu’ils ne me laisseraient jamais partir. Flavio ne m’a jamais répondu ni donné de rendez-vous, et son nouveau bras droit m’a tout simplement dit que c’était mort.

Est-ce que tu aurais signé dans un autre club du pays, si la possibilité avait été là ?

J’aurais bien aimé être dans un club et faire de l’ombre à Hesperange. J’aurais peut-être réussi à les empêcher d’être champion l’an prochain (rires) !

Tu dis avoir été agréablement surpris du championnat luxembourgeois. Est-ce que tu penses qu’il a encore une grande marge de progression ?

Absolument. J’en ai parlé à plusieurs joueurs ici qui ont des années d’expérience, et ce qui en ressort, c’est que chaque saison, le niveau du championnat augmente. Chaque année la formation s’améliore, des jeunes partent en Allemagne ou en France. Forcément, la qualité technique grandit toujours. Les terrains sont de mieux en mieux, mais il y a en effet encore une marge de progression. Pétange est un excellent exemple :  ce que ce club fait, cela tient vraiment la route, et c’est un projet sur le long terme. Si le Luxembourg continue sur ce chemin, on finira par arriver à une vraie professionnalisation. C’est là-dessus selon moi que la fédération devrait tirer pour aller encore plus vite.

Comment s’est fait cette signature en Thaïlande ?

J’avais déjà eu des contacts l’an dernier avec leur directeur sportif, qui est belge. Cela ne s’était pas fait pour plusieurs raisons, notamment par mon désir de vouloir honorer mon contrat à Hesperange. Il est revenu à la charge cette année, et cela s’est fait très rapidement. Il m’a envoyé le contrat et deux heures après, c’était signé. 

Dans nos colonnes, tu avais parlé de ton désir de devenir entraîneur. Partir en Asie, est-ce que ça peut compliquer ce projet ?

Non, je ne le vois pas comme ça. Déjà, cela t’ouvre sur un autre horizon, un autre football, une autre culture, une nouvelle expérience de vie qui t’apporteront beaucoup. Je voulais faire mon UEFA A au Luxembourg, et pourquoi pas reprendre une année d’études. J’avais tout organisé, malheureusement, cela tombe à l’eau. Mais je sais qu’à Bankgok, je peux passer ma licence A d’entraîneur. Et je vais continuer de m’informer, de m’enrichir, de rester à la page sur les nouvelles évolutions. Ici ou là-bas, le projet continue.

Quel est le sentiment qui prédomine à l’instant ? L’appréhension, l’excitation, l’inquiétude, le soulagement ?

Je suis déjà parti en Thaïlande trois fois donc je ne pars pas à l’inconnu. J’ai aussi un ami qui a joué quatre ans dans ce club, donc je sais comment cela fonctionne en termes d’organisation, en interne, entraînement, etc… Je suis juste très excité, et j’ai vite envie d’être au 15 juin pour commencer l’entraînement et voir le niveau de mes propres yeux.

De Thailande, est-ce que tu regarderas les matchs européens de tes anciens coéquipiers, ou est-ce que tu préfères ne pas regarder tout cela ?

Bien sûr que je regarderai ! J’ai encore beaucoup d’amis ici, on était comme une petite famille. Je ne leur souhaite que le meilleur et d’atteindre une poule. Depuis que je suis arrivé, je l’ai toujours dit : le plus gros ennemi d’Hesperange, c’est Hesperange. Ce n’est pas l’adversaire qui est le risque. C’est à l’intérieur du club,  comment le tout est géré lors des défaites et matchs nuls, les crises qui peuvent être amenés pour rien et empirer le tout… Si le Swift arrive à régler tout ça, il peut faire un très beau parcours, et je serai le premier à soutenir mes coéquipiers avec qui je garde d’excellents contacts. De toute façon, quand tu passes par Hesperange, c’est clair : soit tu ne peux plus supporter certains, soit vous êtes soudés pour la vie (rires) ! Il n’y a pas d’entre-deux. On voit tout de suite la vraie face des gens dans le dur, et j’ai vu qu’il y avait des belles personnes dans cette équipe.

admin

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