Complètement fou ! Pour ce qui étaient ses derniers Jeux, Tom Habscheid est allé chercher le bronze à Paris. À 38 ans, l’athlète revient avec nous sur ce moment hors du temps qui vient compléter un palmarès déjà extrêmement fourni. Cette médaille obtenue aux Jeux est la première pour le pays depuis 40 ans, et vient récompenser une carrière exceptionnelle de régularité pour le lanceur.
MENTAL! : Quel regard portes-tu sur cette aventure parisienne ? Comment c’était ?
Tom HABSCHEID : C’était vraiment une belle aventure. Tous les Français et même Européens, il y avait une bonne ambiance. C’était incomparable avec Tokyo où il y avait la période COVID, ou bien même Rio. Ce sont les meilleurs Jeux auxquels j’ai pu participer, car ce n’était pas loin de la maison et il y avait beaucoup de Luxembourgeois qui étaient au stade pour me soutenir, donc c’était vraiment magnifique.
Avec du recul, et maintenant que tu as obtenu le bronze, tu n’ambitionnais pas un peu la médaille en allant à Paris ?
Non, vraiment pas. Mon objectif principal était vraiment d’améliorer la performance que j’avais pu faire à Tokyo (NDLR : 13,92m). Je savais évidemment que je pouvais faire quelque chose à Paris, mais je ne voulais pas le dire publiquement, que ce soit dans la presse ou à mes proches, que je visais la médaille. Je ne voulais même pas me le dire à moi-même, car c’est de la pression psychologique et je ne voulais pas me mettre cette pression d’y aller pour la médaille. Finalement, tout s’est bien déroulé et je repars avec cette fameuse médaille donc c’est parfait.
Comment te sens-tu avec quelques semaines de recul ? Est-ce que tu réalises ?
Je réalise surtout qu’une médaille paralympique ou olympique, c’est le « next level ». Je vois une vraie différence avec les autres compétitions. J’ai eu quelques médailles, que ça soit aux championnats du monde ou aux championnats d’Europe, mais ce n’est rien quand on compare avec une médaille paralympique. C’est vraiment la plus belle de mes médailles. Je suis beaucoup ce qui se dit dans la presse, et j’ai pu constater que tous les Luxembourgeois suivaient la compétition, ce qui n’est pas le cas pour les autres compétitions par exemple. Les Jeux, c’est autre chose ! Et de sentir tout ce soutien des Luxembourgeois m’a apporté un surplus de motivation.
« Je réalise surtout qu’une médaille paralympique ou olympique, c’est le next level »
Qu’as-tu ressenti au moment de ce deuxième jet à 14,97m qui t’a propulsé en tête du concours à ce moment-là ?
À vrai dire, au moment du jet, j’ai d’abord pensé que je n’avais pas si bien lancé que ça. Évidemment, je me suis un peu trompé car le lancer était finalement très bon, mais au moment de lâcher le poids, je ne l’ai pas bien senti. Je ne l’ai pas senti dans les doigts, puis après, j’ai regardé où il avait atterri sur l’aire du lancer et je me suis dit : « Ah ok, c’est finalement pas mal, il est bien ! ». Je pensais même pouvoir faire encore mieux, mais finalement ce deuxième essai est resté mon meilleur sur ce concours.
Tu as reçu la médaille des mains de la grande-duchesse Maria Theresa, ce qui rajoute quelque chose à ce moment déjà historique. Tu réalises que tu as écrit une page de l’histoire du sport luxembourgeois ?
Effectivement, c’était un beau moment. Je ne réalise pas encore que c’est quelque chose d’historique. C’est vrai que 40 ans, c’était une longue attente. Peut-être que je réaliserai d’ici la fin de l’année, mais je ne sais pas. J’ai encore besoin d’un peu de temps, car j’ai encore beaucoup de choses dans ma tête à l’instant t et je n’ai pas eu le temps de vraiment réaliser tout ça.
On sait que la 4e place à Tokyo avait été difficile à digérer, comment as-tu fait pour trouver la force de retourner travailler pour aller chercher cette médaille qui te manquait ?
Je ne sais pas vraiment. Je l’ai juste fait. Ce n’est même pas lié à mon entourage, c’est uniquement moi qui ai eu cette motivation de retourner travailler. Comme la plupart du temps dans ma vie. Évidemment, tu as toujours des gens qui t’aident, et c’est normal, mais j’ai fait la majeure partie du boulot pour me remotiver, notamment psychologiquement.
On pensait que les Jeux de Tokyo étaient tes derniers. A-t-on une chance de te voir voir à Los Angeles, ou bien c’est vraiment terminé ?
Pour le coup, c’est vraiment fini. Pour moi, ces Jeux Paralympiques à Paris, c’était la compétition parfaite. Tout était parfait. J’ai fait six super lancers, avec une belle continuité tout au long du concours. Il y a un des lancers qui était encore meilleur que les autres, mais je n’ai pas fait un seul 0, je n’ai pas fait d’erreur dans la compétition. Le moment était bien, le stade était plein… Je m’en fous de la couleur du métal, de savoir si c’est une médaille d’or ou de bronze, c’est la médaille qui compte. C’était le moment parfait pour arrêter selon moi, car c’est le plus beau des succès de ma carrière.
« Je m’en fous de la couleur du métal, c’est la médaille qui compte »
On a bien compris que c’étaient tes derniers Jeux, mais tu ne vas plus refaire une seule compétition ? Tes derniers jets ont eu lieu à Paris ?
Non c’est vraiment fini. Je n’ai pas envie de recommencer à lancer un peu à droite à gauche, aux championnats nationaux ou autre. Je préfère fermer le classeur de cette carrière, avec une fin en apothéose.
Est-ce que tu sens que le regard des gens a changé te concernant ?
Je n’ai pas encore pu me poser ses questions concernant ma notoriété puisque c’est assez récent, mais je crois que oui. Depuis cette médaille, je suis très sollicité, je parle tout le temps avec des gens. Je crois que les Luxembourgeois sont tous très fiers de ce que j’ai pu réaliser. Il y a beaucoup de nos concitoyens qui ont regardé la compétition, et je pense que c’est une très bonne publicité pour le sport paralympique. Je dois encore un peu travailler en terme de communication pendant plusieurs mois, notamment avec la Sportspress en décembre, et de nombreuses autres occasions où je vais devoir être un peu partout pour parler avec les sponsors et autres médias. C’est encore un peu de boulot que je dois réaliser.
Est-ce que tu prends plaisir à réaliser tout ce travail de communication autour du paralympisme et du handisport ?
J’avoue en avoir un petit peu marre. Je suis un enfant issu d’un petit village au Luxembourg, où j’ai toujours été les pieds sur terre, donc ce n’est pas forcément ce que je préfère. Mais je fais tout ce travail de communication pour le sport paralympique. Je considère que c’est à moi d’avoir ce rôle d’ambassadeur et de mettre en avant le sport paralympique dans sa globalité, que ce soit auprès des sponsors, des collègues, pour le boulot. Même si ce n’est pas forcément ma tasse de thé de tout le temps parler et de participer à tout un tas d’évènements, je dois le faire maintenant car c’est le moment parfait après ce que j’ai réalisé à Paris pour le faire, et mettre en avant tous ces athlètes trop souvent mis de côté ou oubliés.
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