La Seleçaõ sera l’équipe nationale la plus souvent rencontrée par le Luxembourg au terme de cette campagne qualificative pour la Coupe du monde au Qatar. Une idylle née il y a soixante ans. Espacé à ses débuts, le flirt est carrément devenu frénétique ces dernières années.
On va finir par croire que les boules chaudes existent. Les tirages au sort manquent cruellement d’originalité pour le Luxembourg. La Biélorussie était revenue comme un boomerang ces dernières années. Le Portugal n’est pas mal dans le genre. Jugez plutôt: dix matches en quinze ans et bientôt 19 en soixante ans.
La France, la Belgique et les Pays-Bas peuvent aller se rhabiller. Partenaires privilégiés des Lions Rouges en raison de leur proximité dans des temps plus anciens où on ne voyageait pas aussi aisément que de nos jours, les trois pays vont se faire griller par la Seleçaõ. Le compteur devrait afficher 19 le 12 octobre 2021 en soirée. Le conditionnel étant toujours de mise en ces temps incertains où la vérité d’une semaine est rarement celle de la suivante. L’affiche ravira ainsi les amateurs de valeurs refuges et les milliers de Portugais qui résident ici au pays. Elle plaira moins aux amis de la diversification qui se languissaient de retrouver la Mannschaft, quinze ans plus tard, voire l’Angleterre, 21 ans après le 0-6 londonien.
Mais comment bouder son plaisir à l’idée d’admirer Cristiano Ronaldo, Diogo Jota, João Félix, Bruno Fernandes et Bernardo Silva pour ne citer qu’eux ? Enfin, façon de parler puisque cette satanée pandémie clouera les spectateurs devant leur petit écran.
Cette première rencontre à domicile pour le Luxembourg – la deuxième de la campagne après le déplacement en Irlande – ne manquera pas de piment. Placée tôt dans l’agenda, elle poussera le Portugal à ne rien laisser au hasard. Dans un Groupe A dans lequel seule la Serbie semble pouvoir lui tenir tête, la Seleçaõ aura à cœur de se mettre rapidement à l’abri pour assurer une sixième participation consécutive à une coupe du monde. « Fernando Santos est un entraîneur très méfiant. Il ne tombera pas dans le panneau d’aligner une équipe B ou une formation uniquement composée de jeunes joueurs », avertit Álvaro Cruz, l’entraîneur de l’Avenir Beggen. Fin connaisseur du football portugais et en contact régulier avec le sélectionneur, Álvaro Cruz explique un peu mieux comment son pays d’origine parvient à rester constant dans les performances de haut niveau depuis près d’un quart de siècle. « Il n’a jamais été question de transition nette. Tout s’est opéré en douceur et Fernando Santos est un maître en la matière pour garder l’équilibre entre les piliers et les jeunes qui montent. Il a aussi l’art d’éliminer les polémiques dès qu’elles naissent. Ce n’est d’ailleurs plus du tout la mode chez nous de prendre du recul avec la sélection pour des raisons banales comme ce fut le cas à une époque. » Les confrontations à l’apparence plus faciles face au Luxembourg et l’Azerbaïdjan seront des occasions uniques pour les chasseurs de statistiques pour soigner leur bilan. On pense en premier lieu à Cristiano Ronaldo. L’absence de spectateurs dans les enceintes et le fiasco du nouveau stade du Luxembourg sont deux freins à la fête que constitue toujours la venue de la sélection portugaise. « Nous ne nous en lassons jamais », reconnaît Alvaro Cruz. « Le public portugais est tellement fier de son équipe nationale et passionné que la redondance de l’affiche ne l’affecte pas du tout. Bien au contraire! »
Puis et à y regarder de plus près, les trajectoires des sélections portugaise et luxembourgeoise épousent certaines crêtes communes. Toutes proportions gardées bien sûr.
Un premier pic au cœur des années 60. La sélection de la FLF épate l’Europe avec son épopée de 1963 au Championnat d’Europe. Elle élimine en huitième de finale les Pays-Bas avec notamment un match retour gagné à Rotterdam (2-1) qui laisse le Vieux Continent sans voix. Il fallut ce diable de Danois d’Ole Madsen pour arrêter les Lions Rouges en quart de finale. Deux ans plus tard, le Portugal bluffe à son tour la planète Foot à la Coupe du monde anglaise de 1966. La Seleçaõ se glisse en demi-finale après s’être notamment extirpée d’un groupe comprenant le Brésil puis après avoir retourné la table contre la Corée du Nord qui menait trois buts à rien. Ce jour-là, Eusébio se fend d’un quadruplé. L’Angleterre arrêtera le Portugal en demi-finale. Ces deux temps forts seront suivis d’une longue période de disette. Le Portugal se hissa bien en demi-finale de l’Euro 1984 mais cette embellie resta sans lendemain. Il a fallu attendre l’aube des années 2000 pour entrevoir le bout du tunnel. Le Brésilien Scolari conduit la Seleçaõ en finale de son Euro 2004. C’est finalement Fernando Santos qui recueillera les fruits de ces longues années en décrochant l’Euro 2016 face à la France en finale. Le Portugal rajoutant la Ligue des Nations à son palmarès en 2019.
Le Luxembourg, lui, y est bien allé de son coup d’éclat en 1996 lors d’une campagne qualificative qui lui rapporta dix points, mais c’est avec la création du Centre National de Mondercange et le travail initié par Guy Hellers et poursuivi par Luc Holtz que les premières dividendes furent récoltées. Pêle-mêle, les Lions Rouges battent la Suisse, la Biélorussie, la Macédoine et vont jusqu’à tenir la France en échec à Toulouse en 2017. Clairement, le Luxembourg ne boxe plus dans la même catégorie que Saint-Marin et a pris de l’avance sur Malte. Un renouveau qui passe par l’épanouissement de nombreux joueurs à l’étranger. Suffisant pour faire douter le Portugal ?
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